La structure de cet essai qui se laisse lire facilement est d’une grande simplicité. Elle campe un roi « stabilisateur » de l’émotionnel, du réel et du futur.
Le stabilisateur de l’émotionnel est un jeune prince qui apprit très tôt le métier de Roi dans le royaume qui a séduit Lyautey, qui s’est vite rebellé contre l’occupation coloniale et qui entretenait, via Abdelkrim, Chef de guerre du Rif, des relations épistolaires avec Ho-Chi Min. Parce que rappelle Martinez, qu’aux côtés du mythique Giap, tombeur de la France, c’est un général marocain Ben Omar qui fut parmi les premiers à entrer à Dien Bien Phu… Cela part du sang et parle au cœur.
Le cœur de Mohammed VI, lui, s’est saisi de la tragédie des migrants : il n’en peut plus, le Maroc doit leur ouvrir ses bras alors que partout l’Autre fait peur et que les ressources à partager sont rares. Il y a aussi les pauvres. Le Roi va chez eux, dans les campagnes, au bord des routes, à leurs tables. Il est le militant du bonheur national brut, l’œil rivé sur les logements sociaux, les routes à faire, la transition énergétique à réussir. Ce faisant, il ne perd pas de vue la nécessité de forger un islam modelé au milieu de courants extrêmes qui sèment la désolation chez les voisins et dans le monde.
D’être, pour reprendre la belle formule de Martinez, en même temps commandeur des croyants et tranquillisateur des Chrétiens ». Des juifs aussi. De la diversité du Maroc et de la protection de ses atouts, tous ses atouts. Dont les presque six millions de Marocains de la diaspora encouragés à investir chez eux… C’est aussi ce qui fait prendre au Roi la route de l’Afrique subsaharienne où l’auteur s’attarde sur l’hôpital militaire marocain de campagne qui combla l’attente de milliers de malades maliens un moment.
Sans parler du programme structurant de formation de 500 imams maliens au Maroc. « Le Roi paratonnerre » en somme. Y compris vis-à-vis de la relation algero-marocaine, « une ligne de tension » sur laquelle le Roi fait, selon Martinez, office stabilisateur, conscient des deux Algérie : celle de l’Etat mais aussi et surtout celle du peuple liée au Maroc par le nombril.
Pour ce qui est du Roi stabilisateur du futur, Martinez exalte le pragmatisme et l’acte d’Histoire, rappelant que c’est par une seule marche que Hassan II a ajouté à son territoire la moitié de la superficie française. Mohammed VI a donc de qui tenir, en oeuvrant à l’opérationnalité de l’Union du Maghreb Arabe, en professant une communauté de destin pour les peuples méditerranéens, ainsi qu’une diplomatie de la fraternité afro-arabe avec le reste de l’Afrique.
Le tout sur un énorme pari : celui du Maroc émergent, puissance économique, carrefour technologique et hub politique. C’est toute la portée de Vision 2050, le défi d’avenir que Mohammed VI tient à relever, dans un contexte où le pétrole déprime plus qu’il ne développe et où la seule aune qui vaille est l’amour pour son peuple.
Adam Thiam
Source: Le Républicain-Mali 29/05/2015