Limogeage des DAF et chute de Gbagbo : Réactions de la classe politique et de la société civile


Younoussi Touré, président de l’URD

Le président de l’Union pour la République et la démocratie (URD), Younoussi Touré a soutenu que les changements de DAF étaient inattendus. Donc, a-t-il dit, on ne peut faire que des supputations. La première est relative au changement de gouvernement qui nécessite un changement de style, de management, de gouvernance. En fait, ce qui doit s’appliquer pour une meilleure gestion des deniers publics. Peut-être qu’on veut, aussi, a-t-il souligné, donner la main libre à l’ensemble des départements. Une autre interprétation est, peut-être, que  jusqu’à présent,  la gestion globale des DAF n’a pas donné satisfaction du point de vue éthique. Il faut rappeler qu’il y a eu quand même des réformes dans l’administration des DAF qui sont devenus des directeurs de finances et du matériel, séparés des ressources humaines. Cela a peut être créé, a-t-il dit, une autre destination. Concernant la chute de Laurent Gbagbo, Younoussi Touré a expliqué que ‘’si celle-ci doit faire redémarrer la paix et la stabilité, la consolidation de l’unité nationale en Côte d’Ivoire, on espère trouver une nouvelle voie parce que la guerre n’a rien arrangé et a bloqué tout espoir de réconciliation nationale et de progrès dans  l’intégration sous régionale. L’UEMOA est l’organisation la plus avancée et la Côte d’Ivoire y détient 40% de création des richesses. Ce rôle a été fortement entamé avec la durée de la crise. Si la Côte d’Ivoire retrouve ses marques, elle y gagne, la sous région y gagne et l’UEMOA aussi. ‘’ Il a souhaité qu’Alassane Ouattara puisse rétablir l’ordre et la quiétude pour que la Cote d’Ivoire retrouve sa place. L’autre leçon, a-t-il fait remarquer, est que nous devons tout faire pour éviter les conflits post électoraux. La gestion des élections, a dit le président de l’URD, compte parmi les facteurs qui raffermissent la démocratie et cela ne doit pas aboutir à une crise.

Boubacar Touré, secrétaire à la communication du RPM

Répondant la question relative au limogeage des DAF, Boubacar Touré, secrétaire à  la communication du Rassemblement pour le Mali a déclaré : ‘’ après le remplacement du Vérificateur général, le remplacement partiel du gouvernement, le tour des DAF, en se référant à la mission assignée à l’équipe gouvernementale qui est l’organisation d’élections transparentes acceptées par tous et la lutte contre la pauvreté et la corruption, on peut dire que la décision du président de la République et du Premier ministre, décision qui relève tous les DAF,  est un signal fort. La décision est à saluer. La question est-ce un problème d’homme ou de système ? Si je salue cette initiative présidentielle et je m’interroge quand même quand on voit le rôle des DAF dans les dispositifs de gestion dans tous les départements et l’incidence de ce rôle sur la gestion administrative, financière du pays et surtout sur l’économie, en général, je me dis que la réflexion doit aller au-delà des hommes parce que si jamais, c’est le système qui favorise ce qu’on peut reprocher aujourd’hui, ça risque d’être une symphonie inachevée. Pour cela, après avoir vivement salué ladite décision, j’invite le gouvernement à une profonde réflexion sur le système afin que l’essentiel de leur mission puisse aboutir au bonheur de nous tous. ‘’ Boubacar Touré s’est aussi exprimé sur la chute de Laurent Gbagbo.  De l’indépendance de la Côte d’Ivoire à l’arrestation du président Laurent Gbagbo, a-t-il souligné, on peut noter que ce pays est resté en quête de la création d’une Nation plurielle. Une Nation s’acceptant dans la différence. Hélas ! a regretté le secrétaire à la communication du RPM, à la mort du président Houphouët Boigny, le pays a connu le coup d’Etat, la rébellion et une élection ensanglantée. Il a ajouté : ‘’ je ne saurais continuer sans présenter les condoléances les plus vives et sincères aux victimes ivoiriennes et non ivoiriennes, africaines et non africaines et j’espère que l’arrestation de Gbagbo sera le point de départ de la naissance d’une nation dans laquelle le Bété, le Agni, le Dioula, etc. le Chrétien, le Musulman, l’Animiste et l’Athée s’accepteront tous comme fils de la Nation ivoirienne. J’estime que la gestion d’un résultat électoral ne mérite pas un tel gâchis. ‘’ En 2002, a-t-il dit, l’exemple a été donné au Mali, cela devrait être suivi par les protagonistes de la crise ivoirienne. Il a déploré, a-t-il fait savoir, les excès de tous ordres enregistrés lors de cette crise et reste convaincu  ‘’qu’aucune raison ne saurait justifier cela. ‘’

Moussa Mara, président de Yelema

Le président du parti Yelema, le changement,  a soutenu qu’il n’a pas été bien informé des raisons des limogeages des DAF qui jouent un rôle essentiel. Cela peut, a-t-il assuré, entraîner des blocages. Il faut que les nouveaux Directeurs administratifs et financiers s’insèrent vite dans les processus pour que cela n’entraîne pas des retards dans l’exécution des activités des départements ministériels. D’autant plus que le gouvernement est sur un chantier qui comprend énormément d’activités. Concernant la chute de l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo, le président de Yelema a indiqué que toutes les personnes qui sont pour la démocratie et la transparence ne peuvent que se réjouir du changement. Le président reconnu, Alassane Ouattara, a-t-il ajouté, doit pouvoir exercer ses responsabilités, rassembler les Ivoiriens pour la réconciliation et le développement d’un pays qui a beaucoup d’atouts.

Moustaph Dicko, Directeur de cabinet du président de l’Assemblée nationale

Le directeur de cabinet de l’hémicycle pense que le limogeage des DAF est une surprise, car, c’est une première que l’ensemble des DAF soit relevé. Peut-être, a-t-il ajouté, que les autorités l’ont fait pour impressionner et faire en sorte que les choses aillent mieux. Interrogé sur les implications de cette affaire avec la lutte contre la corruption, il a souligné : ‘’l’effet de surprise effectivement pourrait laisser penser que cela entre dans ce cadre. Peut-être que cela pourrait changer les comportements et faire en sorte que les gens se disent qu’à tout moment, ils peuvent être relevés et donc les pousser à être plus prudents. Maintenant est-ce que c’est efficace ? Je ne sais pas. ‘’ Concernant la chute de Laurent Gabgbo, il a dit qu’il pense qu’il y a eu en Côte d’Ivoire des élections libres transparentes et crédibles. Un formidable mouvement des populations ivoiriennes, a-t-il soutenu, pour que le changement soit effectif. ‘’ Les gens se sont prononcés, a-t-il signalé, en toute liberté et confiance pour que définitivement la paix et la sécurité reviennent pour que la démocratie s’installe et pour que le peuple puisse choisir librement ses dirigeants. Je pense que ça s’est très bien passé. Comme le président sortant n’a pas voulu entendre la voix du peuple, comme il n’a pas voulu se plier au verdict populaire, il est tout à fait normal qu’on utilise tous les moyens pour faire respecter le choix du peuple ivoirien, comme de tous les peuples d’ailleurs. Les élections sont faites pour cela. Quand un peuple se mobilise à plus de 80% pour dire sa volonté, il est normal qu’on l’accompagne pour aller dans ce sens. Il y a eu beaucoup de violence, de morts et il reste simplement à souhaiter que les peuples africains soient plus  entendus et que ces situations ne se répètent sur le continent. Je pense que ça donne l’idée que dorénavant, tous les pouvoirs sont conscients du fait qu’ils ne puissent faire ce qu’ils veulent mais qu’ils doivent respecter la volonté populaire. ‘’

Djibril Tall, Secrétaire national de la Société civile et des Groupements socio professionnels du PDES

Djibril Tall a affirmé  que le limogeage des DAF répond au processus de lutte contre la délinquance financière et aux procédures de gestion des fonds publics. Conformément aux valeurs réglementaires et législatives qui réglementent cette procédure, a-t-il dit, l’ordonnateur secondaire délégué et l’administrateur de crédits jouent, chacun, leur rôle dans la gestion. Tout cela peut donc, a-t-il laissé entendre, être couronné par la transparence dans la gestion des fonds publics. Cela va rétablir, a souligné Djibril Tall, la moralité et établir un état de confiance entre les partenaires et l’Etat. ‘’ Au-delà, a signalé le Secrétaire national de la Société civile et des Groupements socio professionnels du PDES, il faudrait analyser globalement les procédures de gestion des fonds publics par rapport aux directeurs de services centraux et rattachés aux entreprises publiques à caractère administratif. Nous saluons vivement cet acte courageux et important pour assurer la bonne gouvernance de l’Etat. ‘’ Pour Djibril Tall, la chute de Gbagbo témoigne, pour l’ensemble des pays, de l’établissement de la démocratie. Le système des nations Unies était, a-t-il dit, le fondement de l’établissement des critères et principes établis pour départager les candidats. Donc concernant ces élections, a-t-il fait observer, c’était d’accord parties qu’elles devaient être validées par un contrôle préalable et sur la base de rapports moraux des bureaux de vote. Donc, on devait s’en tenir à ces résultats, a-t-il affirmé.

Amidou Diabaté, 1er vice président du Parena

Le 1er vice président du Parena, Amidou Diabaté, a rappelé que le président du parti s’était exprimé sur RFI, concernant la chute de Laurent Gbagbo. Tiébilé Dramé avait notamment déclaré : ‘’Autant je pense que Laurent Gbagbo et le FPI auraient pu éviter à la Côte d’Ivoire, à notre sous région, cette crise, cette stratégie. Il aurait été tellement beau au lendemain de cette élection qu’il accepta de s’incliner devant le verdict des urnes. ‘’

Marimantia Diarra, secrétaire général de l’Adéma-Pasj

Le secrétaire général du Parti africain pour la solidarité et la justice, Marimantia Diarra, a fait savoir qu’il ne pourrait donner qu’un avis personnel sur la question du limogeage des DAF, puisque le Comité exécutif doit se réunir aujourd’hui sur la question. Concernant la chute de Laurent Gbagbo, il a fait remarquer que l’Adéma-Pasj souhaitait que Gbagbo respecte le choix des urnes. Comme il ne l’a pas fait, a-t-il ajouté, le parti de l’Abeille ne peut condamner la manière dont il a quitté le pouvoir.

Housseiny Amion Guindo, président de la Codem

Le président de la Convergence pour le développement du Mali (Codem), Housseiny Amion Guindo, a soutenu qu’il observe comme tout le monde, la décision du président de la République et du Premier ministre. Il respecte la décision. Il ne sait toutefois pas à quelles fins la décision a été prise. C’est, dit-il, une affaire à suivre.  La crise ivoirienne, a-t-il affirmé, a donné beaucoup d’enseignements aux jeunes. Avec l’implication de l’Union européenne, de la France, de l’ONU, c’est, a-t-il déclaré, l’indépendance de nos pays qui est en jeu. Il a regretté qu’à travers nos institutions, nous n’arrivions pas à régler nos problèmes. ‘’ Suite à la dépendance économique, nous retombons, a-t-il affirmé, sur la dépendance politique. C’est pourquoi, à la Codem, nous disons : comptons sur nos propres forces. ‘’

Mohamed Tabouré, directeur de Sanfin

Le directeur du journal Sanfin, Mohamed Tabouré, pense que le limogeage des DAF est une mesure liée au consensus d’ATT et à ses projets électoraux. Ce n’est pas, a-t-il assuré, une mesure de lutte contre la corruption sur une base consistante. C’est une mesure, a-t-il fait remarquer, qui vise à faire en sorte que tout ce qui est source d’accumulation d’argent pour le financement des élections par les partis politiques et leurs représentants au gouvernement, soit réduit. C’est donc, a-t-il estimé, lié directement aux élections. Il a, par ailleurs, déclaré que la chute calamiteuse de Laurent Gbagbo, qui était un cauchemar pour les populations ivoiriennes, est un soulagement. Toutefois, il a jugé que ça se passe dans des conditions révoltantes pour la conscience anti-impérialiste africaine. Mais Gbagbo, a-t-il dit, n’est pas un anti-impérialiste et la France profite de la situation pour renforcer sa main mise sur son protectorat en Côte d’Ivoire. Il a ajouté : ‘’ la lutte doit continuer pour en finir avec l’ivoirité, ethno fasciste et la domination impérialiste française en Côte d’Ivoire.

Mamadou Thiam, député  URD

Mamadou Thiam, député  élu à Kayes, a d’abord fait état de la sensibilité du sujet et a estimé que tous les Maliens se réjouissent de la chute de Gbagbo, parce que, a-t-il dit, c’est le respect des urnes. Il a espéré que cela débouche finalement à la paix.

Ousmane Sidibé, assistant du président de la CCIM

L’assistant du président de la Chambre de commerce et d’industrie du Mali (CCIM) a affirmé qu’ils n’avaient pas de relations avec les DAF, mais qu’ils ont plutôt entendu dire que ce sont les gros commerçants qui avaient des liens avec les DAF. Il a indiqué que la situation en Côte d’Ivoire les affectait beaucoup à cause du blocage des marchandises. Même les produits locaux des petits commerçants souffraient, a-t-il affirmé, de cette crise. ‘’ Il y a maintenant un soulagement, a-t-il souligné, car, les commerçants détaillants ont repris la route. ‘’

Mme Coulibaly Salimata Diarra, présidente de l’Ascoma

La présidente de l’Ascoma, Mme Coulibaly Salimata Diarra a affirmé que Gbagbo a perdu les élections et que c’était normal qu’il parte. Elle a fait état de la souffrance du peuple ivoirien et de la mort des innocents. C’est heureux, a-t-elle dit, que ce soit fini. ‘’On ne peut que se féliciter de son départ, ‘’ a-t-elle déclaré. Elle aurait, cependant, souhaité que la CEDEAO qui avait demandé aux Nations Unies de les autoriser à agir, jouent son rôle dans cette crise. On n’a pas donné à la CEDEAO, a-t-elle dit, la possibilité de s’affirmer sur la scène africaine, car elle a été bloquée dans son initiative.

Propos recueillis par Baba Dembélé

Le Républicain 20/04/2011