Les portes de la Chine fermées aux opérateurs économiques maliens depuis au moins 7 ans

Tandis que ses ressortissants pillent nos richesses et inondent nos marchés de produits dont la qualité est plus ou moins irréprochable, Beijing a fermé ses portes à nos opérateurs économiques. «Cela fait au moins 7 ans que la Chine refuse le visa aux commerçants maliens. Le sésame est délivré au compte-gouttes pour le délai dérisoire d’un mois», déplore Samba, un jeune commerçant du Grand marché de Bamako.

«Nous avons protesté par tous les moyens légaux, en vain», ajoute-t-il. Mais, selon beaucoup de ses camarades, «la situation perdure parce que les autorités maliennes n’en ont jamais fait leurs affaires. Les opérateurs économiques maliens sont les seuls à être frappés par cette mesure discriminatoire en Afrique de l’ouest. Dans des pays comme la Côte d’Ivoire, le Congo-Brazzaville… les autorités ont haussé le ton. En Côte d’Ivoire, la Chine est revenue sur sa décision quand le gouvernement ivoirien a décidé d’appliquer la réciprocité à l’égard des Chinois voulant se rendre dans le pays. Et il est temps que le gouvernement malien agisse de même s’il est réellement préoccupé par les intérêts du peuple».

De l’excellence des relations partenariales sino-maliennes, il en avait été pourtant beaucoup question lors de la 1ère édition du Forum de coopération Chine-Mali organisé du 25-26 octobre 2022 au CICB. Une initiative qui a aussi essuyé beaucoup de critiques. Ils sont en effet nombreux ceux qui pensent que les échanges économiques se font de plus en plus au détriment du milieu d’affaires malien et, de façon générale, de l’économie malienne.

Ce partenariat est-il pour alors mutuellement avantageux pour les acteurs de tous les secteurs de notre pays ? Ils sont nombreux à en douter. D’abord, le transfert de technologies et d’expertises qui est réellement indispensable à l’émergence économique de notre pays laisser à désirer. Sans compter que de nos jours, comme les entrepreneurs du BTP (Bâtiments et Travaux publics), les opérateurs économiques sont écrasés dans leur propre pays par la concurrence chinoise depuis qu’ils sont privés de visa d’entrée en Chine pour les affaires.

«Après le secteur des BTP, les Chinois sont en train de s’accaparer aussi du secteur du commerce en faisant de nous des sous-traitants condamnés à se contenter de la portion congrue. C’est pourquoi ils font tout pour nous empêcher de nous rendre en Chine pour négocier et commander nos marchandises», dénonce Aïssata, une femme d’affaires. «Aujourd’hui, je me suis retournée vers Dubaï (Emirats arabes unis) et Istanbul (Turquie) comme beaucoup de femmes d’affaires du Mali. Il est vrai que la marge bénéficiaire est réduite à ce niveau, mais c’est mieux que ce que la Chine nous impose depuis des années», a-t-elle précisé. A son avis (partagé par la majorité de nos interlocuteurs) le Mali doit s’inspirer du Kenya où les décideurs politiques veillent à ce que opérateurs économiques chinois n’imposent leurs propres lois pour leurs intérêts/

Comme le dit si bien un observateur (analyste économique), il est vraiment louable aujourd’hui que le Mali et la Chine veuillent construire «une communauté de destin dans la nouvelle ère pour concrétiser les objectifs du Forum sur la coopération sino-africaine (FOCAC) et renforcer davantage la coopération bilatérale dans tous les domaines». Mais, dénonce-t-il, «la Chine ne peut pas continuer à vouloir construire des relations solides et fructueuses avec le Mali et créer des situations frustrantes voire révoltantes pour les populations maliennes …».

En dehors de cette histoire de visa, a-t-il déploré, «des ressortissants de la Chine sont de plus en plus impliqués dans l’exploitation frauduleuse des richesses du pays comme l’or et le bois. Et cela commence à irriter les populations de ces zones». De nos jours, il est indéniable que la Chine apporte au Mali un soutien inconditionnel et indéfectible, surtout au niveau des relations internationales. Mais, cela ne peut pas justifier que nos décideurs ferment les yeux sur les mauvais comportement des entreprises et des opérateurs économiques privés venus de l’Empire du milieu pour s’enrichir aux dépens des populations locales, de l’environnement, du Trésor public…

Pour que la coopération sino-malienne soit mutuellement fructueuse, il est par exemple important que le transfert de technologies soit une réalité palpable ; que les hommes et les femmes d’affaires maliens puissent se rendre en Chine et commercer avec leurs partenaires chinois.

C’est à cela que le gouvernement malien, l’ambassade de Chine au Mali et le Club des amis de la Chine au Mali doivent travailler à travers une profonde réflexion pour remettre les populations au centre de l’avenir des relations sino-maliennes. Et cela d’autant plus qu’il est clair qu’on ne peut pas rêver de bâtir une nouvelle ère partenariale en nourrissant la grogne des acteurs économiques du pays, en exploitant les richesses de l’autre sans aucun égard pour les lois nationales et sans aucune considération pour les populations riveraines des ressources convoitées !

Naby