Le Président de la République, chef suprême des Armées et le Puissant Président de la Commission Défense de l’Assemblée Nationale, l’honorable Karim Keita, ont fait des déclarations tout aussi scandaleuses que compromettantes, relatives à l’acquisition des hélicoptères de combat des Forces armées du Mali. Ces affirmations qui ont valeur d’aveux doivent servir de pistes au Procureur des pôles économiques pour ouvrir sans délai des enquêtes afin de savoir les prix exacts des équipements miliaires acquis sous IBK. Si la Justice ne s’acquitte pas de son devoir le plus élémentaire, il revient au peuple d’exiger des enquêtes afin de situer les différentes responsabilités et sévir contre tous les coupables de détournements. La justice malienne n’a-t-elle pas une autre occasion de redorer son blason ?
Le président de la République, IBK, certainement de bonne foi, avait affirmé lors d’une de ses visites dans la région de Mopti que les hélicoptères sont cloués au sol faute de maintenance appropriée. Il a répété la même phrase à nos confrères de Jeune Afrique lors d’une interview. Comme si cela ne suffisait pas, c’est au tour de son fils Karim Keita, de surcroit président de la Commission Défense de l’Assemblée Nationale, d’enfoncer le clou lors d’un colloque à Paris en affirmant : « les hélicoptères que nous avons achetés ne peuvent plus voler, ça marchait au début mais vraisemblablement on a un problème d’entretien depuis l’achat, je me demande si, on n’a pas été floué à l’achat ».
Rien que sur la base de ces deux allégations des deux plus hautes personnalités impliquées dans l’achat des équipements militaires, à savoir le Président de la République et celui de la Commission Défense de l’Assemblée Nationale ; les Procureurs anticorruption que sont ceux des pôles économiques doivent s’autosaisir de cette affaire pour éclairer la lanterne du Peuple. Autrement dit, l’affaire des hélicoptères cloués au sol ne serait que la face visible de l’Iceberg de la vaste arnaque du peuple par ses dirigeants. Par conséquent, un audit général de tous les achats des équipements militaires s’impose désormais.
Pour rappel, de l’adoption de la loi d’orientation et de programmation militaire à nos jours, c’est plus de mille milliards de francs CFA qui ont été débloqués pour équiper les FAMA. Mais au finish, les Forces Armées Maliennes, n’ont été ni équipées encore moins formées pour faire face à leurs missions régaliennes. Pire, les outils qui ont fait l’objet de grande communication et d’une publicité sans commune mesure se trouvent être aujourd’hui des mauvais équipements. Doit-on croiser les bras et se taire face à la vaste spoliation de nos maigres ressources ? Il revient désormais au peuple souverain d’exiger des enquêtes pour savoir les prix réels de ces hélicoptères et de tous les équipements militaires acquis sous IBK. La justice est fortement interpelée pour donner rapidement une suite à cette rocambolesque affaire. En plus de la justice, la classe politique malienne, toutes tendances confondues, est également interpelée, si tant est qu’elle se batte pour le Mali, afin d’exiger que la lumière soit faite sur cette affaire dite des hélicoptères cloués au sol, alors qu’ils ont été acquis à des prix d’or. Que dire de la Société civile, cette autre sentinelle dont la vocation première est de veiller aux intérêts du Peuple ? Elle a de la matière désormais et sa crédibilité est en jeu. Du Haut Conseil Islamique, aux communautés apostoliques, en passant par les organisations de la Société Civile tous doivent se mobiliser et demander des comptes aux gouvernants. La Plateforme de lutte contre la corruption, et le chômage des jeunes, PCC, a désormais une autre occasion à saisir, elle qui a porté plainte contre les 8000 fonctionnaires qui n’ont pas déclaré leurs biens. La PCC est d’autant plus interpelée qu’elle est aujourd’hui l’une des plates-formes qui ont fait de la lutte contre la corruption leur principal cheval de bataille.
En somme, les sorties du Président de la République et du Président de la Commission Défense de l’Assemblée Nationale sont des preuves suffisantes qu’il y a eu des manquements graves des principes qui régissent les passations de marchés. Alors ne faut-il pas engager une procédure judiciaire contre X pour détournements des deniers publics, corruption, démoralisation des troupes, voire même pour haute trahison, si la responsabilité des ministres et du Président de la République venait à être prouvée ?
Youssouf Sissoko