Grand commis de l’Etat, qui a assumé plusieurs charges, dont celles de ministre de la Fonction Publique, puis de ministre des Affaires Etrangèreset de la Coopération Internationale et, à partir de 2002, de Premier ministre, il sait que les défis qui l’attendent sont nombreux et titanesques.
Au nombre de ceux-ci figure, en bonne place, le parachèvement du dialogue inter-Maliens, dont le 5ème round devrait incessamment débuter dans la capitale algérienne. Il devrait être sanctionné par la signature à Bamako d’un accord de paix global et définitif, mettant fin à une crise qui n’a que trop duré.
Ici, le nouveau Premier ministre est en terrain connu. On pourrait même affirmer, sans risque de se tromper, que c’est le doigté avec lequel il a conduit les discussions préliminaires, en qualité de Haut représentant du chef de l’Etat, qui lui a valu le très convoité portefeuille de Premier ministre.
En effet, dans le document intitulé «Projet d’accord pour la paix et la réconciliation au Mali», les instructions du Président de la République ont été globalement respectées. Les fameuses lignes rouges, relatives à l’indivisibilité du territoire du Mali et à la préservation du caractère laïc de la République ont été respectées.
Mieux, nulle part dans le document aucune mention n’est faite de la fantomatique république de l’Azawad. En lieu et place du projet des séparatistes, on a privilégié la solution de la décentralisation renforcée, en l’occurrence la régionalisation, avec des assemblées régionales et des exécutifs régionaux dont les membres seront élus au suffrage universel.
Mais ce dossier, à l’image des sables mouvants du Sahara, et au regard du contexte géopolitique, qui se caractérise par la déstabilisation des Etats souverains par des groupes armés sans foi ni loi qui, sous la couverture de la religion, s’adonnent à des activités criminelles en tous genres, à l’image du trafic de drogues, d’armes, de cigarettes, d’êtres humains, est loin d’être gagné d’avance. Pour ne pas dire que c’est un casse-tête chinois.
Les récents et tragiques événements de Nampala et de Djoura, perpétrés sûrement par des ennemis de la paix, qui font tout pour empêcher la signature de l’accord et transformer, du coup, le Septentrion de notre pays en une zone de non-droit, en témoignent éloquemment.
Sous ce chapitre de la sécurité, Modibo Kéïta aura également comme challenge la mise à niveau de l’armée malienne, en la dotant d’effectifs adéquats, bien formés, disposant de matériels à hauteur de mission, y compris les moyens aériens – hélicoptères et avions de combat – adaptés à la traque des groupes armés dans le désert.
Beaucoup reste à faire dans le domaine de la relance économique. Modibo Kéïta doit faire en sorte que les taux de croissance et les performances macroéconomiques se ressentent positivement dans le panier de la ménagère, la poche du chef de famille et l’assiette du consommateur. Une des pistes pour atteindre cet objectif est d’amener l’Etat à payer ses dettes intérieures, pour que l’argent recommence à circuler.
Il s’agit aussi de d’accélérer la cadence des investissements, afin qu’ils impactent de façon significative la création de l’emploi, la réduction de la pauvreté et la création de la richesse. Dans cette optique, les 32 projets de la coopération sino-malienne, en particulier, doivent devenir des réalités.
A terme, il s’agit aussi d’accroître, de façon substantielle, la part de l’industrie dans le Produit Intérieur Brut (PIB), qui s’est réduit au fil des ans comme une peau de chagrin. Modibo Kéita doit s’attaquer avec vigueur à l’hydre à cent têtes de la corruption et de la délinquance financière et à l’assainissement et à la modernisation de l’administration, conditions sine qua non d’un développement économique et social digne de ce nom.
Reste le redressement de l’école, l’avenir même du pays, qui est dans un état piteux depuis des décennies. Pour accomplir ces douze travaux d’Hercule et relever ces défis titanesques, le Premier ministre Modibo Kéïta aura besoin de toute son énergie, son génie, sa diplomatie, son expérience. Et de s’entourer d’une équipe de choc, comprenant des hommes et des femmes de valeur, de compétence et de conviction. Nous lui souhaitons bon vent.
Yaya Sidibé
Source: Le 22 Septembre 2015-01-12 00:16:55