A la tête d’un gouvernement de 38 membres depuis le 05 mai 2018, le premier Ministre Boubou Cissé a désormais du pain sur la planche. Confronté à l’épineuse question sécuritaire au nord comme au centre, il a réussi à apaiser, pour l’instant, la fronde sociale et fait face aujourd’hui à un grand défi qui est celui de la bonne organisation d’un dialogue politique inclusif pouvant être la thérapie à la mal gouvernance du pays et jeter les bases d’un Mali Kura. Pour réussir ce challenge, il lui faut de l’intelligence, de l’audace et de la déférence. Voici trois propositions pour mener ce dialogue à bon port.
Première proposition : le caractère inclusif une condition sine qua non
Si certains partis politiques, regroupements et associations de la société civile ont signé l’accord politique de gouvernance, beaucoup d’autres l’ont rejeté faute d’inclusivité et de consensus autour des termes et surtout des axes qui doivent être les pierres angulaires de la gouvernance pendant un temps bien déterminé. Pour faire assoir tous les acteurs autour de la table du dialogue, le premier Ministre doit faire des concessions et tenir compte des désidératas de l’aile dure de l’Opposition. Il doit pouvoir convaincre le chef de l’Etat à renoncer à certaines prérogatives afin d’atteindre l’objectif, celui de permettre à tous les acteurs politiques et de la société civile de participer au dialogue tant attendu par le peuple A-t-on besoin de rappeler que le Mali n’est pas un Etat normal et que par conséquent aucun don de soi ne serait de trop pour sauver le pays.
Deuxième proposition : Maintenir le statu quo autour des institutions
Considérant que toutes les institutions, excepté le Président de la République, sont dans une situation d’illégitimité, voire d’illégalité et cela à cause de la non-tenue des élections aux dates constitutionnelles. Convaincu que le Mali est dans une situation grave nécessitant la grande retrouvaille de tous ses fils et de toutes ses filles, il est un impératif absolu de maintenir le statu quo sur toutes les institutions. De l’Assemblée Nationale, au Haut Conseil des collectivités, en passant par les conseils de cercle et les Assemblées régionales ainsi que la Mairie du District et même les autres institutions nominatives, elles doivent toutes conserver leurs statuts. Toutes ces institutions pourraient être maintenues en l’état y compris le statut du chef de file de l’Opposition pour éviter d’autres polémiques stériles pouvant mettre un coup d’arrêt au processus que tous souhaitent inclusif. Autrement dit, la Constitution doit être mise entre parenthèses le temps de mettre en place les textes législatifs et règlementaires consensuels et nouveaux.
Troisième proposition : Des termes de référence consensuels pour un dialogue apaisé
Après avoir rassuré tous les acteurs sociopolitiques, surtout ceux de l’Opposition radicale et sollicité leur participation à ce dialogue, il vaudrait mieux confier l’organisation de ce forum ou du moins la présidence à un leader du FSD ou de la COFOP sous le regard bienveillant du gouvernement. S’agissant du dialogue proprement dit, après un large consensus sur les Termes de Référence, TDR, lesquels prendraient en compte toutes les préoccupations des Maliens du nord au sud d’Est en Ouest, sans discrimination aucune, il serait mieux de choisir des hommes et des femmes de toutes les obédiences politico-socio-religieuses.
Ainsi pour ne pas être un forum de trop, les recommandations qui seront issues de ce dialogue inclusif doivent être mises en œuvre par une équipe gouvernementale qui reflètera la configuration du dialogue inclusif. En d’autres termes, un gouvernement d’union nationale, ouvrant la voie à une transition de deux ans pour doter le pays des textes toilettés et modernes, serait nécessaire.
En somme, si le Premier ministre Boubou Cissé arrivait à réunir tous les acteurs sociopolitiques autour d’une même table afin de discuter de toutes les questions cruciales de l’heure et jeter les bases d’un nouveau Mali, il aurait réussi là où ses prédécesseurs ont échoué et il aurait inscrit son nom en lettres d’or dans les annales de l’histoire de notre jeune démocratie.
Youssouf Sissoko
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