Le mot consensus a encore refait surface dans le jargon politique au Mali, sept ans seulement après sa mise entre parenthèses, à la suite de l’ignoble coup d’Etat perpétré par une junte militaire en complicité avec certains hommes politiques avides de pouvoirs. Amadou Toumani Touré, ATT, considéré comme le précurseur de la gestion consensuelle au Mali, a été voué aux gémonies par ses détracteurs qui ont qualifié son mode de gestion de véritable partage de gâteaux. Aujourd’hui, face au blocage généralisé, le consensus semble faire l’unanimité au sein de la classe politique. ATT avait donc raison.
Le Mali va renouer avec la démocratie consensuelle, avec à la clé l’implication de tous les acteurs sociopolitiques dans la gestion des affaires publiques. En d’autres termes, l’on s’achemine vers la mise en place d’un gouvernement d’union nationale, pour non seulement juguler la crise multidimensionnelle, mais aussi et surtout, procéder aux différentes réformes indispensables pour un véritable ancrage démocratique et une amorce de développement. C’est ainsi, que la majorité, l’opposition et la société civile vont accorder leurs violons, face à la crise multidimensionnelle et aux différentes réformes en cours, pour aller vers le consensus. Elles semblent trouver au consensus l’une des alternatives crédibles pour sauver le bateau Mali en détresse depuis 2013. Par cette unanimité, le consensus semble renaitre de ses cendres après avoir été vilipendé et piétiné. Son précurseur, ATT, a été qualifié d’apatride ayant livré le pays aux brigands et autres fossoyeurs de la République.
Le temps semble être le meilleur juge, sinon qui pouvait imaginer, il y a sept ans qu’on allait prôner le consensus après l’avoir dénoncé ? L’histoire vient de donner raison à l’ancien Président Amadou Toumani Touré qui a cru jusqu’à sa chute à cette recette politique qu’est le consensus, pour sortir le Mali de l’ornière. ATT était convaincu que seule la gestion consensuelle pouvait sortir le Mali de la crise. C’est pourquoi, il a fait
de ce concept son crédo. Pour lui, l’un des idéaux politiques pour un pays en construction est le consensus qui n’est nullement une invite autour du plat pour le festin de la République. Le consensus est sans nul doute ce qu’il faut pour relever le Mali qui s’est effondré à la suite du coup d’Etat du 22 mars 2012 et dont l’une des conséquences a été l’invasion du pays par une horde des groupes djihado-indépendan
tistes. Il a manqué au nouveau Président fraichement élu en 2013, ce reflexe et cette vision politique que le Mali post-coup d’Etat avait besoin de tous ses fils pour le tenir débout. IBK, après sa brillante élection, aurait dû prolonger la transition pour maintenir le tempo et poursuivre sans grand chamboulement l’œuvre de réconciliation et de reconstruction entamée par son prédécesseur Dioncounda Traoré. Mais, au lieu de cela, il a cédé à la pression de son entourage et s’est laissé guider par son instinct grégaire et revanchard en jetant l’anathème sur tout ce que son prédécesseur avait fait. Aujourd’hui, c’est dos au mur qu’il accepte le principe du consensus et avec lui la quasi totalité de la classe politique et de la société civile. Tard vaut mieux que jamais. Donc, il revient à IBK de donner un contenu à la démocratie consensuelle, à la lumière de toutes les leçons tirées dans la gestion des affaires publiques sous ATT.
Youssouf Sissoko