L’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et Bahreïn, ainsi que l’Égypte, ont rompu leurs relations diplomatiques avec Doha, lui reprochant son soutien aux islamistes et une complaisance à l’égard de l’Iran.
C’est une nouvelle escalade dans la crise entre le Qatar et ses principaux voisins du Golfe. Accusant Doha de financer le terrorisme, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, Bahreïn ainsi que l’Égypte ont annoncé ce lundi la rupture de leurs relations diplomatiques avec le Qatar. Le minuscule émirat a été également exclu de la coalition militaire qui intervient au Yémen contre les miliciens Houthistes pro-iraniens. C’est la crise la plus grave depuis plus de trente ans entre pays membres du Conseil de coopération du Golfe.
Pour «protéger sa sécurité nationale des dangers du terrorisme et de l’extrémisme», Riyad a décidé également de fermer ses frontières terrestres, aériennes et maritimes avec le Qatar. «L’Arabie saoudite a pris cette mesure décisive en raison des sérieux abus des autorités de Doha tout au long des dernières années (…) pour inciter à la désobéissance et nuire à sa souveraineté», a déclaré un responsable saoudien.
La compagnie Etihad Airways a annoncé suspendre tous ses vols en direction du Qatar.
«Le Qatar accueille divers groupes terroristes pour déstabiliser la région, comme la confrérie des Frères musulmans, Daech (acronyme en arabe de l’EI) et Al-Qaïda», a-t-il accusé. Selon lui, Doha soutient aussi «les activités de groupes terroristes soutenus par l’Iran dans la province de Qatif (est)», où se concentre la minorité chiite du royaume saoudien, ainsi qu’à Bahreïn, secoué depuis plusieurs années par des troubles animés par la majorité chiite de ce pays.
Doha a répondu en accusant ses voisins du Golfe de chercher à le mettre sous tutelle. Ces mesures sont «injustifiées» et «sans fondement», a réagi le ministère des Affaires étrangères du Qatar dans un communiqué. Elles ont un «objectif clair: placer l’État (du Qatar) sous tutelle, ce qui marque une violation de sa souveraineté» et est «totalement inacceptable».
Accusé de soutenir le terrorisme
L’Arabie et ses alliés émiriens, bahraïnien et égyptien ont deux griefs à l’égard du Qatar: son soutien aux Frères musulmans et une certaine complaisance à l’égard de leur ennemi iranien. Doha a longtemps accueilli des responsables Frères musulmans qui avaient été expulsés d’Égypte, de Syrie ou de Tunisie. Au début des printemps arabes – avec l’aval des Occidentaux, des États-Unis et de la France en particulier- Doha est apparu comme le pays qui pourrait «assagir» les islamistes qui venaient de prendre le pouvoir en Égypte et en Tunisie. L’échec de Mohammed Morsi au Caire a sonné le glas de l’islam politique, soutenu par Doha. Obsédés par la menace des Frères, les Émirats arabes unis sont en pointe dans la dénonciation du Qatar comme base arrière du mouvement islamiste. Reste que Doha abrite bel et bien une demi-douzaine de financiers du terrorisme, comme le relèvent plusieurs rapports officiels américains.
Contrairement à l’Arabie saoudite et aux Émirats, le Qatar n’a jamais affiché une politique foncièrement hostile à l’égard de l’Iran, pays avec lequel Doha partage un immense champ gazier dans les eaux du Golfe persique. «Le Qatar n’a jamais eu une lecture chiite-sunnite des événements qui se passent au Moyen-Orient», souligne ainsi un diplomate.
Soutenus par Donald Trump, Saoudiens et Emiriens ont fait de l’Iran leur ennemi numéro un. Dans la foulée de la visite du président américain à Riyad il y a un mois, Riyad et Abou Dhabi avaient accusé l’émir du Qatar Cheikh Tamim d’avoir tenu des propos désobligeants à l’égard de ses voisins et d’avoir minimisé la menace iranienne. Sur cette question des relations avec l’Iran, Doha n’est pas seul dans le Golfe: le sultanat d’Oman et Koweït refusent également de faire de l’Iran leur bête noire. Ces deux pays ne se sont d’ailleurs pas associés à la mise en quarantaine imposée ce lundi par Riyad à Doha.
LE FIGARO