Si l’entreprise est semée d’embûches pour tout président des Etats-Unis, la rhétorique de campagne incendiaire du magnat de l’immobilier et ses décrets migratoires controversés -pour l’heure bloqués par la justice- lui rendent la tâche encore plus ardue.
Après une première journée à Ryad centrée sur l’annonce de méga-contrats d’armements -« des emplois, des emplois, des emplois », s’est réjoui Donald Trump- le locataire de la Maison Blanche, qui tente de faire oublier ses ennuis à Washington, passe à un autre registre.
Il fera devant une trentaine de dirigeants de pays musulmans réunis à Ryad, un discours soulignant ses « espoirs » pour une « vision pacifique » de l’islam.
Comme c’est le cas depuis son arrivée au pouvoir, il devrait se garder de toute critique sur la question des droits de l’homme, bafoués selon les organisations internationales de défense de ces droits dans plusieurs pays arabes, dont l’Arabie saoudite.
Revendiquant un contraste marqué avec son prédécesseur démocrate Barack Obama sur ce thème, M. Trump assure qu’il préfère agir dans la discrétion, gage, selon lui, d’une plus grande efficacité.
Son influent conseiller à la sécurité nationale, le général H.R. McMaster, a promis un discours « source d’inspiration » mais aussi « franc ».
« Il sera très direct en évoquant la nécessité d’affronter l’extrémisme et le fait que nombreux sont ceux dans le monde musulman qui n’ont, non seulement pas fait assez, mais aussi encouragé cet extrémisme, au-delà des belles paroles de surface », a expliqué un responsable de la Maison Blanche sous couvert d’anonymat.
Quels mots ?
Quels mots choisira le président septuagénaire ? Quel ton adoptera-t-il?
Utilisera-t-il l’expression « terrorisme islamique radical », qui provoque des grincements de dents dans le monde musulman mais dont il avait fait l’une de ses signatures durant la campagne électorale, reprochant aux démocrates, qui l’évitent, de manquer de clarté et de détermination.
En décembre 2015, peu après avoir lancé sa campagne, Donald Trump proposait de fermer purement et simplement l’accès aux Etats-Unis à tous les musulmans, le temps, disait-il, « de comprendre ce problème ».
La proposition -rapidement abandonnée- avait provoqué une levée de boucliers, ses nombreux détracteurs rappelant que la Constitution américaine interdit toute discrimination religieuse.
« Je pense que l’islam nous déteste. Il y a énormément de haine », lançait-il en mars 2016.
Plus d’un an plus tard, et dans ses habits de président de la première puissance mondiale, il est cependant probable qu’il opte pour un registre sensiblement différent.
Sauf si, comme cela lui arrive fréquemment, il s’éloigne de son texte et de son téléprompteur, et se lance dans une tirade aux conséquences imprévisibles.
Dans une allocution restée célèbre, quelques jours seulement après les attentats du 11 septembre 2001, revendiqués par Al-Qaïda, George W. Bush s’était rendu dans une mosquée de Washington.
« L’islam, c’est la paix », avait-il lancé, insistant sur le fait que « le visage de la terreur » n’avait rien à voir avec cette religion pratiquée par des centaines de millions de personnes à travers le monde.
Barack Obama, lui, avait choisi l’université du Caire, en juin 2009, pour exposer, en début de mandat, sa vision de l’islam.
En commençant en arabe par un « Salam aleikum » (« que la paix soit sur vous ») à l’adresse des 1,5 milliard de musulmans du monde, il avait appelé à mettre fin « au cycle de la méfiance et de la discorde ».
Voyage en Egypte
M. Trump devrait, en tout état de cause, profiter de l’occasion pour durcir encore le ton face à l’Iran, pour le grand plaisir des monarchies sunnites du Golfe qui redoutent l’influence de leur grand rival chiite.
Avant ce discours très attendu, le président américain a entamé dimanche matin un marathon de rencontres bilatérales avec des dirigeants de la région.
En présence de son homologue et « ami » égyptien Abdel Fattah al-Sissi, il a annoncé son intention de se rendre prochainement en Egypte.
« Vous êtes une personnalité unique capable de faire l’impossible », a lancé M. Sissi, déclenchant les rires des délégations présentes. « Tout à fait d’accord! », a répondu, ravi, M. Trump.
Il a ensuite participé à un sommet avec les dirigeants des six monarchies sunnites du Golfe (Arabie saoudite, Bahreïn, Emirats arabes unis, Koweït, Oman, Qatar).
Lundi matin, le 45e président des Etats-Unis quittera Ryad pour Israël, deuxième étape d’un voyage extrêmement dense qui le mènera aussi dans les Territoires palestiniens, au Vatican, à Bruxelles et en Sicile pour les sommets de l’Otan et du G7.
(©AFP / 21 mai 2017 11h43)