Après le dépouillement d’un peu plus du tiers des bureaux de vote, le PS avait remporté la moitié des suffrages contre 28% à son rival du parti démocratique (droite). Traditionnel faiseur de roi, le Mouvement socialiste d’Intégration (LSI) remporterait 15% des suffrages.
Mais Edi Rama, au pouvoir depuis 2013, pourrait bien ne pas avoir besoin de ce parti et atteindre seul la barre de la majorité absolue des 71 députés sur 140. Cela semble désormais l’enjeu des résultats officiels complets attendus lundi.
Si les responsables politiques observaient un silence prudent, les médias albanais ne s’embarrassaient pas de précautions lundi matin, saluant « la victoire des socialistes », selon le titre du quotidien Gazeta Shqiptare. Son concurrent Tema promettait même à Edi Rama « un deuxième mandat avec une majorité écrasante » au parlement.
L’intéressé n’a pas proclamé sa victoire mais peinait à cacher sa satisfaction sur son compte Facebook, où cet artiste-peintre de 53 ans est très actif.
Il y a souhaité « aux Albanais une belle journée » et y a publié une carte de l’Albanie repeinte dans la couleur rose du parti socialiste, et frappée de l’inscription « +75 », allusion apparente au nombre de sièges sur lequel il table.
Selon les médias albanais, dans la nuit, il avait déjà envoyé des messages aux députés de son camp pour leur annoncer que leur parti resterait aux affaires.
– La faiblesse de Basha –
« Le premier ministre Edi Rama a réussi à convaincre les Albanais que pour mettre en œuvre la réforme de la justice et installer un Etat de droit, il avait besoin d’un deuxième mandat », analyse Alexander Cipa, un analyste indépendant.
Ce sont des préalables de Bruxelles pour engager des négociations d’adhésion. L’Albanie est officiellement candidate à l’UE depuis 2014.
Selon Alexander Cipa, Edi Rama a également bénéficié de l' »échec important de l’opposition de droite, même dans ses fiefs traditionnels », explicable en partie par la « faiblesse de (son) nouveau leader », Lulzim Basha, 43 ans. Ce juriste n’a pas réussi à endosser le costume trop grand de la figure tutélaire de la droite albanaise, Sali Berisha, 72 ans.
Les partis se sont mutuellement accusés « d’intimidation » ou « d’achat de votes », mais le scrutin s’est déoulé dans une ambiance apaisée par rapport aux élections précédentes, sans incident important relevé lundi en milieu de matinée.
– Faible participation –
S’il devait se confirmer que ce scrutin s’est tenu sans heurt notable ni accusations de fraudes lourdes, ce serait une première. Organisé devant 3.000 observateurs dont 300 étrangers, ce serait bienvenu pour convaincre Bruxelles d’ouvrir les négociations.
Aux yeux d’Edi Rama, le pays a progressé sur son chemin européen depuis qu’il en a pris les rênes: « Une chose est certaine, le traitement du cancer qui a pris en otage l’Albanie a déjà commencé ».
Une allusion à la réforme d’un système judiciaire corrompu. Mais la Commission européenne relevait encore en novembre 2016, dans son dernier rapport, que « la corruption continue de prévaloir ».
Pour de nombreux albanais, le développement économique prime. Et au-delà de la chaleur et de la fin du ramadan invoquées par Lulzim Basha, la désillusion dans ce secteur pourrait expliquer une participation inférieure à 50%, surtout que les deux grands partis présentaient des programmes sociaux-économiques proches, d’inspiration libérale.
L’Albanie, l’un des pays les plus pauvres d’Europe, continue de souffrir, avec un salaire moyen de 340 euros qui en fait un des pays les plus pauvres d’Europe. Le chômage, qui touche un jeune sur trois, alimente l’exode massif: pour 2,9 millions de personnes restées au pays, 1,2 millions d’Albanais ont émigré, un record mondial.
(©AFP / 26 juin 2017 11h04)