Le livre ‘’ Le Mali sous Moussa TRAORE’’, ouvrage collectif, qui, lors de sa parution en mars 2016, se vendait comme du pain tant au pays qu’ailleurs, a soulevé, parfois avec passion, diverses réactions émanant surtout d’une certaine intelligentsia nationale.
Nous avons relevé, pèle mêle, entre autres griefs véhiculés à l’endroit des auteurs, une falsification de l’histoire, voire une provocation en direction des acteurs du mouvement démocratique malien, artisans de la révolution de mars 1991, des victimes de ce mois de soubresauts si tristes et si désolants.
Cependant, l’esprit de pondération et le sérieux de ces auteurs sont connus et appréciés.
Ce sont des figures emblématiques jouissant de compétences avérées auxquelles, du reste, les prédisposaient les enseignements des vertus de sagesse, de pédagogie, d’authenticité et de transparence qu’ils ont reçus tout au long de leur éducation familiale, de leur formation, de l’école primaire au cycle supérieur.
Aussi, sans vouloir engager une polémique stérile et sans effet, nous voudrions souligner, en tout état de cause et à toutes fins utiles, que la vérité historique est d’une telle complexité que l’on ne peut en saisir toutes les facettes.
Et comme toute vérité, elle ne résulte ni de la thèse, ni de l’antithèse mais de la synthèse et non de prétextes quelconques.
Ce n’est pas sans raison que les historiens sont appelés, affectueusement et à juste étiquette, ’’des journalistes du passé’’.
Aussi, à notre entendement, des textes complémentaires appropriés, un travail méticuleux de fouille, individuel ou collectif, ne seront jamais de trop pour apporter encore des informations et des éclairages, en toute objectivité et clairvoyance, aux fins d’ enrichir, de fortifier les écrits sur le passé de notre pays, d’édifier davantage les chercheurs potentiels, ceux qui, pour leur propre gouverne, en l’occurrence, veulent en savoir un peu plus sur les actes posés par le Comité Militaire de Libération Nationale et l’Union Démocratique du Peuple Malien.
Le devoir de mémoire l’impose et, dans cette optique, la nouvelle parution peut constituer un joyau, opportunément pour les générations montantes.
On ne peut pas occulter les acquis du CMLN et de l’UDPM, les aspects saillants des chantiers ouverts ou réalisés, pendant plus de deux décennies, par de telles hautes instances nationales qui ont évolué, bon an, mal an, dans un environnement difficile et incertain (l’on se souvient des effets persistants de la sécheresse, des situations contraignantes liées, en particulier, à l’application des politiques d’ajustement structurel de la Banque Mondiale).
Que l’on estime ou non le Général Moussa Traoré, il faut reconnaitre, en toute honnêteté intellectuelle, qu’il a été et demeure la citadelle, le rempart contre la destruction de nos valeurs transtemporelles, de la propagation des comportements indécents, déviants.
Intègre, exemple vivant de courage politique (rappelez- vous des débats qu’il a tenus en 1987 avec l’ensemble des forces vives nationales de l’époque), d’abnégation, de rectitude morale et religieuse, il jouit d’un sens aigu de la notion de biens publics, d’alliance, tant horizontale que verticale.
Face au choc des civilisations, à la croissance des antivaleurs, son sens du patriotisme, de l’autorité de l’Etat, son don de la connaissance et du choix des hommes, son charisme, tout cela ne souffre d’aucun doute (‘’n’est pas chef qui le veut’’).
Républicain au nom prédestiné comme l’ont laissé entendre des hautes voix qui, publiquement, lui ont rendu des hommages, il a géré la vie nationale, voire supranationale (il a été Président de l’Organisation de l’Unité Africaine OUA) avec méthode, rationalité et rigueur.
Sa vision large des événements qu’il a souvent su prévenir au lieu de les subir, ses réussites dans mout domaines socio-économiques, sont irrécusables
Nul n’est infaillible : ‘’si l’erreur est possible, c’est qu’elle a été faite et si elle est impossible, c’est qu’elle se fera’’…
D’autre part, il semblerait que la période de la publication de l’ouvrage n’était pas propice et qu’il fallait, pour la diffusion, attendre une occasion autre que le mois de mars, symbole de l’instauration de la démocratie au Mali.
Mais force est de ne pas oublier, soit dit en passant, que le temps ne pardonne jamais à ce qui se fait sans lui, comme le soutient un adage chinois.
Par ailleurs, faut-il rappeler que les hommes qui ont gouverné ou gouvernent encore les pays africains en l’occurrence, admirés et ‘’encensés’’ au faîte de leur gloire, ont été des despotes pas du tout éclairés.
Des tyrans ont cumulé des fortunes mal acquises durant leur règne de fer, exercé, sans partage, les activités et fonctions au nom de leurs peuples, sans jamais se préoccuper d’allier opportunément souplesse et rigueur face aux difficultés structurelles et conjoncturelles.
‘’Corrompus absolument’’ par le pouvoir absolu, ils ont commis toutes sortes de tortures, de sévices, meurtri leurs citoyens, harcelé avec violence leurs adversaires, soit par folie passagère – la colère- soit par esprit de vengeance, excès d’autoritarisme, fureur, par instinct de conservation du pouvoir vaille que vaille, d’instauration de relais de sa transmission au sein de dynasties privilégiées.
Néanmoins, la qualité de leur leadership n’a cessé d’être louée, parfois sur fond de vastes campagnes de médiatisation.
Ils ont bénéficié de l’impunité, vivent librement sans aucune forme de procès.
Ils sont considérés, à tort pour les uns ou à raison pour les autres, comme des héros, des précurseurs, des monuments, des hommes d’exception, auréolés, tous azimuts, au nom d’une démocratie de façade, de l’opportunisme, du culte de la personnalité.
Certains sont en liberté sans jugement, au vu et au su de tout le monde.
Les ouvrages diffusés sur leur grandeur, leurs prouesses et exploits, sur le rayonnement de leurs œuvres globales n’ont pas été remis en cause, loin s’en faut.
Dans tous les cas, tout livre est une œuvre humaine et comme telle, n’est pas parfait dans tout son contenu.
Il est une vérité élémentaire de dire que la perfection est un objectif noble, mais difficilement atteignable du coup par l’être humain.
Cependant, la recherche de la qualité qu’a poursuivie le collectif des auteurs de l’ouvrage ‘’ Le Mali sous Moussa Traoré’’ a été une exaltante occupation.
Cet aspect si important dans la production écrite mérite d’être souligné en toute sérénité.
Ainsi, tout en évitant l’intoxication, les controverses, les commentaires tendant à distraire les lecteurs, il faut, pour l’information objective du grand public notamment, des débats ouverts et constructifs, des échanges fructueux, la saine confrontation des idées, des témoignages de faits par des sources soucieuses d’authenticité et de transparence, des hommes et des femmes au carrefour de tous les grands événements qu’a connus notre pays.
Le grand et célèbre écrivain français Victor Hugo ne disait-il pas, nous citons : ‘’ tout ce qui est constaté est contestable’’.
Enfin, si les quelques présentes mises au point contribueraient à calmer des esprits surchauffés, à atténuer la tension et la pression constatées dans certains milieux réfractaires à la diffusion de l’ouvrage collectif à grande échelle, nous aurions atteint notre but visé consistant à rapprocher les avis et observations pour des discussions pouvant déboucher sur des compromis , stimuler l’entente dans notre pays, asseoir l’ancrage et la visibilité de regain de confiance et de saines relations entre nos compatriotes dans un esprit réconciliant avec en toile de fond le pardon mutuel, le cœur a la bonne place.
Par Chirfi Moulaye HAIDARA