LE MALI INDEPENDANT AURA CINQUANTE HUIT ANS LE 22 SEPTEMBRE (Première partie)

Bilan d’un parcours politique fait de hauts et de bas
Le 22 Septembre 2018, le Mali soufflera ses 58 bougies de son accession à l’indépendance.
Que de chemins parcourus, que d’obstacles surmontés, que d’actes posés, mais aussi et
surtout, que d’espérances déçues et d’angoisses causées par des hommes qui ont laissé le
destin de tout un peuple basculer entre les mains de certains pendant un temps bien
déterminé.
Le Mali a été le berceau de trois grands empires : l’empire du Ghana, l’empire du Mali et
l’empire songhaï. Il est par la suite une colonie française de 1895 à 1960. Quelques années
après son indépendance, il subit la dictature de Moussa Traoré avant de connaître un régime

démocratique (depuis le début des années 1990). Bilan d’un parcours politique fait de hauts
et de bas.
MODIBO KEITA
Le Soudan Français accéda à l’indépendance le 22 Septembre 1960 et devient la République
du Mali après l’échec de l’éphémère Fédération avec le Sénégal de Léopold Sédar Senghor.
Modibo devient le premier président de la république du Mali. Pendant huit ans, le régime
socialiste a œuvré pour la relance de l’économie et l’amélioration des conditions de vie des
citoyens. Voici quelques grandes réalisations du régime de Modibo Keita En octobre 1960, la
Société malienne d’importation et d’exportation (Somiex) est créée et se voit attribuer le
monopole des exportations des productions locales et de l’importation des produits
manufacturés et de biens alimentaires comme le sucre, le thé et le lait en poudre, et leur
distribution à l’intérieur du pays
Le 1er juillet 1962, le gouvernement créé le Franc malien qui remplace le franc CFA. Le franc
malien n’est pas convertible et la détention de l’ancienne devise est interdite. Cette décision
aggrave les dissensions avec les commerçants. L’un d’eux est emprisonné pour détention de
francs CFA. Le 20 juillet 1962, une manifestation de commerçant est violemment réprimée,
faisant plusieurs morts. Fily Dabo Sissoko, Hamadoun Dicko, ancien responsable du Parti
progressiste soudanais sont arrêtés avec Kassim Touré, chef de file des commerçants de
Bamako. Ils sont jugés pour complot contre l’État par un tribunal populaire du 24 au 27
septembre 1962 qui les condamne à la peine de mort, peine commuée en condamnation à
perpétuité. Ils mourront au bagne de Kidal dans le Nord du Mali. Le 22 janvier 1968, Modibo
Keïta dissout l’Assemblée nationale et décide de gouverner par ordonnance. Son régime fut
renversé le 19 novembre 1968 par un Comité Militaire de Libération Nationale, CMLN, dirigé
par le Lieutenant Moussa Traoré
MOUSSA TRAORE
Le 19 novembre 1968 des officiers militaires, dont les capitaines Yoro Diakité et Mamadou
Cissoko et les lieutenants Youssouf Traoré, Kissima Doukara et Moussa Traoré renversent le
régime de Modibo Keïta. Le président est arrêté au retour d’un voyage officiel dans la région
de Mopti. Un Comité militaire de libération nationale (CMLN) est formé qui met en place un
régime d’exception. Le 23 novembre 1968, un gouvernement placé sous l’autorité du CMLN
est constitué avec le capitaine Yoro Diakité comme Premier ministre. Le capitaine Charles
samba Cissokho et le chef d’escadron de gendarmerie Balla Koné sont nommés
respectivement ministre de la Défense nationale et ministre de l’Intérieur, de l’Information
et de la Sécurité. Deux personnalités modérées du régime de l’US-RDA font partie du
gouvernement: Jean-Marie Koné qui a négocié les accords franco-maliens, nommé ministre
des Affaires étrangères et Louis Nègre qui conserve son poste de ministre des Finances
auquel s’ajoute le Plan et les Affaires économiques.
Le 7 décembre 1968, la constitution du 22 septembre 1960 est abolie et remplacée par la Loi
fondamentale. Le CMLN est l’organe suprême du pays, son président, Moussa Traoré, est

chef de l’État. Le CMLN promet l’adoption rapide d’une nouvelle constitution et des
élections dans l’année à venir.
Yoro Diakité est démis rapidement de ses fonctions de Premier ministre qui sont attribués au
chef de l’État. Du 10 septembre au 26 novembre 1970 il occupe les fonctions de ministre de
la Défense, de l’Intérieur et de la Sécurité. Il est démis de ces fonctions au profit de Kissima
Doukara. Rayé des cadres de l’armée, il est arrêté pour tentative de coup d’État le 7 mars
1971 et condamné le 31 juillet aux travaux forcés à perpétuité dans une mine de sel où il
meurt de mauvais traitement deux ans plus tard. Le capitaine Malick Diallo, ministre de
l’Information est condamné en même temps et à la même peine. En octobre 1971, Moussa
Traoré prend le titre de colonel.
Moussa Traoré fait approuver le 2 juin 1974 une nouvelle constitution créant la 2e
république par référendum. Le Oui l’emporte par 99,71 % mais l’opposition qualifie ce
référendum de « farce ». Le 30 mars 1976, le parti unique Union démocratique du peuple
malien (UDPM) est créé. Le régime autoritaire met en place également l’Union nationale des
jeunes du Mali afin de contrôler la jeunesse et réduire l’influence du syndicat étudiant,
l’Union nationale des élèves et étudiants du Mali (UNEEM), qui avait des liens avec des partis
clandestins comme le PMT, le Parti malien pour la démocratie et la révolution (PMDR) et le
Comité de défense des libertés démocratiques au Mali (CDLDM). Le 16 mai 1977, Modibo
Keïta meurt, officiellement d’un œdème pulmonaire. Cependant, aucune autopsie n’ayant
été pratiqué, les raisons de sa mort sont incertaines : manques de soin, empoisonnement
sont des raisons invoqués par les proches de l’ancien président. Le 27 juin 1990, un poste de
gendarmerie est attaqué à Ménaka. C’est le point de départ de l’insurrection armée menée
par le Mouvement populaire de l’Azawad de Iyad Ag Ghali.
Le 15 octobre 1990 est créée l’Association des jeunes pour la démocratie et le progrès
(AJDP). Le 18 octobre 1990, le Comité nationale d’initiative démocratique (Cnid) est créée à
Bamako par Mountaga Tall et Demba Diallo, afin d’agir à visage découvert pour le
multipartisme. Une semaine plus tard, le 25 octobre 1990, l’Alliance pour la démocratie au
Mali est créé par des militants du PMT, du PMDR, du FDPM et de l’US-RDA créent l’Alliance
pour la démocratie au Mali (Adéma), présidée par Abdrahamane Baba Touré. Ces
associations vont mobiliser la population, en organisant des marches à Bamako et dans
d’autres villes du pays. Le 10 décembre 1990, le Cnid organise une manifestation pacifique
qui réunit 10 000 personnes à Bamako. Le 30 décembre 1990 une marche unitaire est
organisée par le Cnid et l’Adéma à Bamako. Entre 30 000 à 50 000 personnes y participent.
Le régime interdit d’activité l’Adéma et le Cnid le 18 janvier 1991. Le 18 janvier 1991, une
nouvelle manifestation est organisée à Bamako. Mountaga Tall, le leader du Cnid est blessé
par un tir de grenade lacrymogène. Le lendemain, une manifestation a lieu à Ségou. Le 3
mars 1991, une marche unitaire rassemble le Cnid, L’adéma, l’Association des jeunes pour la
démocratie et le progrès (AJDP) et la Jeunesse libre et démocratique (JLD). Le 17 mars 1991,
l’Adema, le Cnid et l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM) organisent une
marche silencieuse en souvenir de Cabral, leader étudiant assassiné le 17 mars 1980.

Le Comité de coordination des associations et des organisations démocratiques,
communément appelé Mouvement démocratique voit le jour le 22 mars 1991. Il est
constitué par le Cnid, l’Adéma, l’AJDP, la JLD, l’Union nationale des travailleurs du Mali
(UNTM), l’Association malienne des droits de l’homme (AMDH), l’AEEM et le barreau…
AMADOU TOUMANI TOURE
Le 26 mars 1991, Moussa Traoré est arrêté par le lieutenant-colonel Amadou Toumani
Touré. Un comité de réconciliation nationale est formé par les militaires Le Comité de
réconciliation nationale rencontre les organisations démocratiques regroupées au sein du
Comité de coordination des associations et des organisations démocratiques (CCAOD). Ils
décident de constituer le Comité transitoire pour le salut du peuple (CTSP), qui comprend dix
militaires et quinze représentants des organisations démocratiques dont 4 représentations
des associations de jeunes et deux du mouvement de rébellion du nord. Le CTSP, présidé par
Amadou Toumani Touré assume les fonctions de gouvernement provisoire31.
Le CTSP organise une conférence nationale du 29 juillet 1992 au 12 août 1992 afin d’élaborer
une nouvelle constitution et définir le processus électoral. Le multipartisme est reconnu et
une charte des partis politiques est établie par l’ordonnance CTSP du 10 octobre 1991. Les
maliens approuvent par référendum le 12 janvier 1992 la nouvelle constitution. Le oui
l’emporte avec 98,35 % des suffrages. Des élections municipales sont organisées la semaine
suivante le 23 février et le 8 mars puis des élections législatives le 23 février et le 8 mars. Sur
les 48 partis déjà créés, 22 participent aux élections et 10 obtiennent des élus. L’Adéma-Pasj,
avec 76 députés sur 116, obtient une large majorité absolue. Le nouveau gouvernement
signe un pacte national de réconciliation avec les Touaregs le 11 avril 1992 qui prévoit
notamment : l’intégration des ex-rebelles dans les services publics (corps en uniforme et
administration générale) et dans les activités socio économiques; l’allégement du dispositif
militaire dans les régions du Nord; le retour de l’administration et des services techniques
dans le Nord; la reprise des activités économiques et la mise en œuvre de programmes de
développement socio-économique d’envergure pour le moyen et le long terme.
A suivre….