« Trois anecdotes sur la décentralisation et le développement
1- On n’intimide pas facilement une femme Torodo
Lorsqu’un Oriental demanda à mon aïeul si tous les hommes de son pays étaient aussi braves que lui, il répondit : «Ils le sont, mais les femmes y sont encore plus courageuses». Ceci, pour dire qu’il sera difficile pour ceux qui le souhaitent d’intimider la Gouverneure Ami Kane.
Or, cette intimidation est l’une des armes de ceux qui aiment le chaos : «Tu nous as ôté le pain de la bouche» ou encore «Tu t’attaques seulement aux plus faibles» ou encore «C’est la loi, oui mais…». Après avoir critiqué l’ancien Gouverneur pour incompétence, voilà qu’ils critiquent celle qui a pris son courage à deux mains. Notons que beaucoup deviennent braves face aux femmes ou à ceux qu’ils croient sans puissances. Ces mêmes personnes aiment à citer la propreté de Kigali, comme si l’ordre s’y était établi sans dommages pour tous. De même qu’ils aiment à évoquer Sankara, ignorant ou feignant d’ignorer que celui-ci avait rasé des quartiers entiers de Ouagadougou.
2- Main basse sur les terres
J’ai appris un jour que j’étais devenu, comme tous les élus de ma commune, propriétaire d’un terrain, seulement parce que j’étais conseiller communal et que le Conseil avait voté l’attribution d’un terrain à chacun des élus… Imaginez l’arbitraire d’une telle situation. C’est donc ainsi, comme le dit l’expression, qu’en «mettant de l’huile sur la bouche de chacun», on s’assure du silence de tous. Je pense fermement que la décentralisation a donné trop de pouvoirs à des élus qui n’étaient pas encore prêts à assumer cette délégation de l’autorité de l’État. Dieu merci, le fleuve est hors du champ de leurs prérogatives, sinon ils l’auraient déjà morcelé.
3- Prise en otage de l’avenir par l’incivisme
Allant visiter le champ d’un grand-frère à Tienfala, nous fumes tous les deux choqués de voir que la Forêt classée de Tienfala qui, au temps de notre enfance, était dense, est non seulement dénuée de ses grands arbres, mais est en passe de devenir un dépotoir où les camions vont larguer les ordures ménagères des Bamakois. Qui plus est, alors que le site est protégé, certains tentent d’y construire, d’abord timidement, avant de passer par l’intimidation, une fois qu’ils seront suffisamment nombreux pour faire peur aux politiques qui, eux-mêmes, ne sont pas rassurés, car n’étant pas exempts de responsabilité. Le fait est que tant que les Maliens voudront une chose et son contraire, ils n’obtiendront ni la chose, ni son contraire. Dieu veille.
Madani TALL