La question du rôle et du mandat de la MINUSMA et de la force Barkhane est sur toutes les lèvres après les multiples attaques perpétrées au centre et au nord sans grandes réactions de celles-ci. Et pourtant, la MINUSMA agit sous le chapitre VII de la Charte des Nations Unies, qui autorise l’usage de la force pour maintenir la paix. Pourquoi accepte-t-elle alors les massacres sous ses bottes ? La MINUSMA et Barkhane apparaissent aujourd’hui plus comme des forces d’occupation pour préserver les intérêts inavoués de certaines puissances et de leurs collaborateurs locaux.
C’est pourtant à l’unanimité que le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté la résolution 2423 ; prolongeant d’une année le mandat de la MINUSMA sous chapitre VII, le 28 juin 2018. Il a aussi maintenu à 13 289 le nombre de soldats et 1 920 membres de la police. Avec cette nouvelle prolongation de mandat, la détermination, du moins théorique de la force Barkhane et la montée en puissance des FAMa, nombreux étaient les Maliens qui croyaient enfin voir la fin de l’insécurité et de la chienlit qui ont pignon sur rue au nord et au centre. Ils ont été très vite désenchantés quand ils ont fait le décompte macabre des victimes, surtout civiles. Maintenant, l’insécurité va crescendo malgré la présence massive de toutes ces forces, la désillusion a cédé la place à la colère.
Interrogé sur le rôle de la MINUSMA, le patron de la mission a toujours laissé entendre que son rôle n’est pas de lutter contre le terrorisme, mais de stabiliser le Mali et protéger les populations civiles en danger. A partir du moment où ce sont les terroristes qui sèment la pagaille et tuent les populations civiles, il n y a pas de raison que la MINUSMA n’intervienne pas. A l’appui de ce qui précède, voici un extrait du texte de son mandat :
« Protection, sans préjudice de la responsabilité première des autorités maliennes, de civils menacés de violences physiques et d’une protection spécifique pour les femmes et les enfants touchés par les conflits armés ; soutenir les autorités maliennes, stabiliser les centres de population clés et d’autres zones où les civils sont menacés, notamment dans le centre et le nord du Mali, y compris dissuader les menaces asymétriques et prendre des mesures actives pour protéger les civils par des patrouilles actives dans les zones à risques et empêcher le retour d’éléments armés dans ces zones ; et l’enlèvement et la destruction des mines et autres engins explosifs et la gestion des munitions. » (Résolution 2423)
Quant à Barkhane, elle a son agenda clairement établi depuis l’invasion du Mali par la horde jihado-indépendantiste en 2012. Cette guerre a été sans nul doute une aubaine toute trouvée pour la France de signer son retour de la plus belle des manières. Car sous le prétexte de la lutte contre le terrorisme, la France de François Hollande a fait son come-back dans le pays de Modibo Keita, qui avait pourtant infligé la gifle la plus cinglante à la France après l’indépendance en ordonnant l’évacuation illico presto des bases militaires françaises de Kati, Tessalit et Gao. Autres temps autres mœurs, sa présence au Mali, si elle a été saluée après la libération de Konnan, agace maintenant plus d’un malien surtout que la mission pour laquelle elle est venue, à savoir la lutte contre le terrorisme, ne fait que s’exacerber.
En définitive, alors qu’il est encore temps, la MINUSMA et Barkhane doivent se ressaisir ; pour sortir de leur soutien aveugle à une minorité arabo-touareg, de la défense des intérêts des puissances occidentales au nom desquelles elles agissent en réalité, et faire face à leur mission de stabilisation du Mali. Il est à craindre que la révolte ne se mue en désaveu total de la France au Mali. Les deux pays ont pourtant l’occasion de pacifier.
Youssouf Sissoko