Le ministère public a estimé que Diaby, accusé d’atteinte aux biens publics portant sur un montant de près d’un milliard de FCFA, était susceptible, si remis en liberté provisoire, de mener des concertations frauduleuses avec les témoins ou même, vu le montant en cause, prendre la clé des champs. Il a été suivi par la Cour, qui a décidé de garder l’ex régisseur en prison et de renvoyer l’affaire à une nouvelle session.
Selon les faits inscrits dans l’arrêt de renvoi, à la suite de la plainte du Directeur Général de l’Hôpital Gabriel Touré, le 30 août 2007, une information a été ouverte contre le Régisseur des recettes de l’hôpital, Zoumana Diaby, pour atteinte aux biens publics portant sur la somme de 1 020 143 880 francs CFA. Ce montant représentait des déficits cumulés de la régie des recettes dévoilés à la faveur d’un contrôle interne et de deux missions d’inspection et de vérification.
Il ressort également de l’arrêt que, courant 2006, une mission de vérification systématique de l’hôpital, menée par l’Inspection des Finances, a permis de mettre à jour de graves irrégularités au niveau de la régie des recettes, pour la période allant du 1er janvier 1999 au 31 juillet 2006. A l’issue de cette inspection, les recettes compromises du fait du régisseur étaient estimées à 930 209 861 francs CFA, 710 474 918 francs CFA au titre des recettes non versées à la banque et 219 734 943 francs CFA au titre d’annulations factices de quittances de cession.
Ces faits ont été notifiés au régisseur Zoumana Diaby, auquel il a été accordé un délai pour se justifier, dans le cadre d’une «procédure contradictoire» en perspective. Le 21 août 2007, à l’arrêt de caisse de la régie des recettes lors de la passation de service entre le Directeur Général partant et son remplaçant, il a été constaté, pour la période du 1er janvier 2007 au 21 août 2007, une différence de 89 934 199 francs CFA entre les recettes enregistrées et les avoirs en caisse. Le régisseur, après avoir reconnu ce déficit, est parti sans laisser d’adresse connue.
Ce n’est finalement qu’en cours de procédure qu’il sera appréhendé par les enquêteurs de la Brigade Financière et Economique. L’inculpé, tout en reconnaissant l’écart constaté lors de l’arrêté de caisse du 21 août 2007, impute ce déficit à une défaillance du logiciel de gestion installé au bureau des entrées du Gabriel Touré. Quant à l’écart de 930 209 861 francs CFA décelé par la précédente mission d’inspection, Zoumana Diaby soutient qu’il serait dû à des remboursements de prestations non effectuées ainsi qu’à des annulations de quittances, par suite de doubles emplois, erreur ou surcharges. Selon l’inculpé, des justificatifs, constitués de bordereaux de versements bancaires ont à cet effet été transmis aux inspecteurs.
En dépit des dénégations de l’inculpé, l’arrêt de renvoi poursuit qu’il ressort du dossier plusieurs éléments de preuves à sa charge. En sa qualité de régisseur, Zoumana Diaby était chargé de collecter, auprès des guichetiers, les encaissements, puis de les verser à la banque. A cette fin, chaque guichetier, à la fin de la journée, lui remettait le montant des recettes perçues, après contrôle des actes établis. Lors de l’encaissement des recettes, le régisseur signait une quittance établie au nom du guichetier versant, à laquelle était joint le tirage informatique de la cession.
Il signait également le cahier de versement dont disposait chaque caissier. Le régisseur, après versement des recettes à la banque, dressait un état de versement portant sur les différentes cessions encaissées, les numéros des quittances et des bordereaux de versement à la banque et les montants correspondants.
Les vérifications menées par l’Inspection des Finances sur les exercices 1999 à 2006 ont révélé que le régisseur Zoumana Diaby avait encaissé auprès des différents caissiers des recettes qu’il n’avait pas reversées à la banque. Le montant ainsi compromis, estimé aux termes du rapport d’inspection du 03 novembre 2006, à 710 474 918 FCFA, découle du rapprochement entre les cahiers de versement des caissiers et les bordereaux des versements effectués à la banque par le régisseur. Les Inspecteurs de finances ont concomitamment décelé que Zoumana Diaby procédait à des annulations factices de quittances de cession. Ces annulations, dont le montant n’a pas été restitué à la partie versante, ont porté sur la somme de 219 734 943 FCFA.
L’inculpé devait à nouveau être épinglé sur les mêmes pratiques, tant à la suite du contrôle interne effectué par l’agent comptable de l’hôpital que lors de l’arrêté de caisse au cours de la supervision de la passation de service entre les anciens et nouveaux directeurs de l’hôpital. Un écart de 62 694 759 FCFA a été décelé par le contrôle interne. Zoumana Diaby a reconnu ce déficit suivant attestation de reconnaissance du 09 août 2007, dont copie a été versée au dossier. Par la même occasion, il s’était engagé à rembourser les fonds compromis, même si, lors de son interrogatoire devant le Juge, il devait revenir sur cette déclaration, affirmant que ce remboursement était conditionné à des vérifications qu’il envisageait de faire ultérieurement.
Youssouf Diallo
Le 22 Septembre 02/10/2011