Les transferts d’argent de la diaspora devraient reculer de 23% cette année, en raison de la pandémie de Covid et de ses conséquences économiques (image d’illustration). PIUS UTOMI EKPEI/AFP
Ce n’est pas une bonne nouvelle pour les ménages africains, les transferts d’argent de la diaspora devraient reculer de 23% cette année, en raison de la pandémie de Covid et de ses conséquences économiques.
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Rue de Tolbiac à Paris, à la porte d’une agence de transferts de fonds, il y a foule. Aminata, une jeune Malienne qui travaille dans le domaine de la santé est venue envoyer de l’argent à sa famille à Bamako.
« Sachant qu’ils sont en difficulté là-bas, il fallait envoyer de l’argent, même si c’est peu. Ils sont vraiment en difficulté là-bas. »
Et vous arrivez à leur envoyer régulièrement de quoi tenir ?
« Du mieux que l’on peut. De toute façon on est obligé de donner, tout en tenant compte de nos dépenses ici. »
Si en France de nombreux travailleurs ont bénéficié des mesures de protection sociale, ce n’est pas le cas en Afrique. Cette femme est venue envoyer de l’argent à son frère qui travaille dans le tourisme en Namibie. Un secteur à l’arrêt depuis le début de la pandémie.
« Tout est bloqué, les aéroports, tout ça, donc il ne peut pas faire son travail. Donc c’est pour le dépanner. C’est la première fois que je fais cela parce qu’il a toujours été indépendant. Je sais que son activité ne tourne plus. C’est pour cela que je l’ai fait de mon propre gré. »
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Ces travailleurs africains savent cependant qu’il est leur sera difficile dans les mois à venir d’aider les familles restées au pays. Cette année, la Banque mondiale prévoit que les transferts d’argent de la diaspora vers l’Afrique sub-saharienne vont baisser de 23%. Ils représentent actuellement 48 milliards de dollars. Le problème n’est pas seulement africain, il est planétaire, selon l’économiste Dilip Ratha qui s’exprimait ici sur le site web de la Banque mondiale à la mi-avril.
« Il ne faut pas sous-estimer l’aspect humain de cette diminution des flux financiers. Si l’on regarde par exemple l’investissement direct étranger, ce sont des entreprises qui envoient l’argent et qui sont concernées. Mais avec les petites sommes que les migrants envoient, 50 dollars, cent ou deux cent, là on parle de centaines de millions, peut-être même d’un milliard de personnes dans le monde, qui sont concernées et affectées par cette baisse des transferts d’argent. »
La crise économique en Europe et aux États-Unis fragilisera un peu plus les travailleurs migrants. Beaucoup risquent de perdre leur emploi. Or, les flux qu’ils génèrent vers l’Afrique sont essentiel.
Dilip Ratha : « Quand les migrants envoient de l’argent à la maison, cela a un effet énorme sur la réduction de la pauvreté. Dans des pays comme le Népal, le soudan du Sud, la Somalie, ou Haïti, les transferts d’argent représentent 30% et parfois 50% du revenu national. Dans ces pays, les envois de fonds sont de véritables bouées de sauvetage pour un grand nombre de ménages, en particulier les plus fragiles. Si les transferts d’argent déclinent, ils tomberont dans la pauvreté. »
Dans certains pays, la baisse des transferts diasporiques aura des effets bien plus immédiats pour les ménages d’Afrique sub-saharienne que celle de l’investissement direct étranger, ou encore la diminution des cours des matières premières.
Par : Olivier Rogez