«Le Covid-19 dans les villes africaines : Effets, réponses et politiques» ! Tel est le thème du rapport dévoilé le 16 juin 2020 à Addis-Abeba (Ethiopie) par la Commission économique pour l’Afrique (CEA) et ses partenaires. Ce document analyse la situation actuelle sur le continent africain et les efforts fournis pour atténuer la pandémie mondiale dans le contexte des villes africaines.
Produit par la CEA, ONU Habitat, le Fonds d’équipement des Nations unies pour le développement (FENU), Cités et gouvernements locaux unis d’Afrique (CGLU Afrique), la Banque africaine de développement (BAD) et Shelter Afrique, le rapport, virtuellement lancé ce mardi, propose des réponses pour des interventions à court, moyen et long terme dirigées par les gouvernements nationaux et locaux avec le soutien des institutions internationales et régionales de développement.
Pour relever d’une manière adéquate les défis de COVID-19, cinq recommandations clés ont été identifiées dans le rapport. Il s’agit d’appliquer des stratégies locales de communication et d’engagement communautaire ; soutenir les PME et l’économie informelle ; approfondir des réponses décentralisées face au COVID-19 grâce au renforcement des capacités des collectivités locales ; cibler les établissements informels par des mesures adaptées ; mettre en place des mécanismes pour favoriser un accès rapide au logement et prévenir les expulsions forcées ; et d’intégrer la planification et la gestion urbaines en tant que priorités clés pour les stratégies de relance et de reconstruction vers la résilience à long terme.
Dans leurs remarques lors du lancement virtuel, les responsables des organisations partenaires conviennent que la Covid-19 a révélé «la grande vulnérabilité des villes africaines aux effets des chocs, et leurs capacités limitées à atténuer et à se remettre des effets associés». Et cela au moment où «les villes africaines continuent de croître rapidement dans des conditions de graves déficits d’infrastructures et de services, d’absence d’emplois productifs adéquats, de faibles capacités et institutions de planification et de gestion…».
Un environnement où l’informalité, la pauvreté et les inégalités persistent en tant que manifestation des contraintes structurelles sous-jacentes de l’urbanisation de l’Afrique. «Dans ces conditions, et sans réponses politiques délibérées et investissements adéquats», les villes peuvent bien devenir des passifs pour une croissance et une transformation futures inclusives et résilientes», a rappelé le rapport.
Préciser et accroître le rôle de la gouvernance locale
Il a également noté que, compte tenu des effets économiques et fiscaux de la Covid-19 sur les économies nationales et de la nécessité de garantir aux populations un accès à une alimentation adéquate, un logement, une eau potable et des installations sanitaires sûrs et à des informations fiables, il est manifeste qu’il y a un besoin d’accroître et de préciser le rôle des gouvernements locaux.
«Ces autorités sont importantes pour faire progresser l’engagement communautaire, soutenir la communication sur les risques et la sensibilisation et faciliter les mesures d’adaptation», peut-on lire dans le rapport. La Covid-19 a montré qu’il est «important de réhabiliter la fonction de stabilisation et de redistribution des transferts financiers des gouvernements nationaux aux gouvernements locaux et régionaux».
Et le document faire apparaitre la nécessité de renforcer les économies locales comme l’une des réponses les plus efficaces pour réduire la sensibilité des économies nationales aux pandémies comme la Covid-19 et aux cycles de l’économie mondiale, indique le rapport.
«L’ampleur des effets économique et financier du coronavirus en Afrique a été sévère à toutes les échelles, du national au local», a déclaré Mme Edlam Abera Yemeru, Chef de la Section de l’urbanisation et du développement, à la CEA dans ses remarques lors du lancement. Et d’ajouter, «les effets économiques de la Covid-19 sont particulièrement graves en raison des vulnérabilités sous-jacentes des économies africaines. La pandémie met en évidence des vulnérabilités sous-jacentes préexistantes dans l’économie des villes africaines qui rendent grave les effets urbains de la crise».
Elle a indiqué qu’à Addis-Abeba (Éthiopie), par exemple, les conséquences de la crise sanitaire sur les hôtels sont graves. Ainsi, 88 % des hôtels membres de l’association des hôtels d’Addis-Abeba étant partiellement ou complètement fermés en raison d’une faible occupation. Les pertes mensuelles sont estimées à 35 millions de dollars américains et 15 000 travailleurs pour l’instant ont été licenciés. Selon la Conférence des Nations unies sur les investissements dans le monde, le flux d’investissements directs étrangers en Afrique devrait, en raison de la pandémie de la Covid-19, connaître un repli entre 25 % et 40 % courant 2020.
«A l’avenir, la reprise économique et la reconstruction locales devront être au cœur des stratégies de relance économique et de reconstruction du continent et des pays, et des plans de relance connexes», a souligné Mme Yemeru. Et pour elle, «les priorités doivent concerner la création de villes économiquement résilientes».
Kader Toé