«Paix, Sécurité et Réconciliation Nationale» était cette année le thème de la Journée panafricaine des femmes célébrée tous les ans le 31 juillet. Une opportunité pour les Maliennes de magnifier et de célébrer l’engagement des pionnières de la lutte d’émancipation de la Femme dans le pays et sur le continent. C’est aussi une occasion de faire le point de la lutte pour tirer les enseignements pour réajuster le tir éventuellement. Il est aisé aujourd’hui de constater que l’extravagance affichée par certaines de nos épouses, sœurs et filles ne peuvent qu’écorner l’image de la Femme. Tout comme, les Maliennes voire les Africaines ont tout intérêt à ne pas forcément s’inspirer des Occidentales.
Le 31 juillet 1962 en Tanzanie, des femmes leaders du continent ont décidé de créer l’Organisation panafricaine des femmes (OPF) pour assurer un développement intégré et harmonieux de la gent féminine en Afrique. Un événement célébré chaque année à l’échelle continentale, renforçons les synergies au delà de nos frontières.
Célébrée cette année dans le pays sur le thème de «Paix-Sécurité et Réconciliation Nationale», cette journée a offert aux Maliennes l’occasion de rendre hommage aux braves pionnières de la lutte d’émancipation de la femme et des peuples. Ces amazones qui étaient présentes dans toutes ces luttes et qui ont fièrement porté la voix des femmes du Mali sur le continent et dans le monde.
Malgré des avancées non négligeables, les Maliennes sont convaincues que le chemin de la promotion, de l’émancipation et de l’autonomisation reste encore long et semé d’embuches. D’où la nécessité de continuer le combat des pionnières.
Et cette lutte à toutes les chances de vite aboutir si les femmes comprennent que certaines attitudes ne peuvent qu’écorner leur image, donc nourrir certains préjugés ou porter préjudice à la pertinence et à la légitimité de certaines revendications. Aujourd’hui, extravagance, ostentation et mégalomanie sont le propre de nombreuses femmes qui ont réussi à émerger. Ainsi, les cérémonies sociales (baptêmes, mariages et mêmes les funérailles) donnent lieu à des étalages de fortune, à des gaspillages énormes. Juste pour entendre les griottes chanter leurs louanges, pour se faire voir.
Au moment où dans de nombreux pays africains (Côte d’Ivoire, Ghana, Nigéria, Rwanda, Togo, Bénin…) des femmes cherchent à faire fortune pour bâtir de vrais empires économiques afin de contribuer à l’épanouissement (socioéconomique) de leurs sœurs et au développement de leurs pays, nos «Grobinew» (Gros bonnets) ne pensent qu’au paraître ! Un comportement irresponsable qui, malheureusement, ne fait que s’aggraver avec le temps. Entourées d’un océan de misère, ces femmes brillent par leur extravagance et leur arrogance à travers un déplorable boucan griotique et médiatique.
Des dizaines voire des centaines de nos francs Cfa exhibés ou distribués sous le feu des projecteurs à des griots ! Cela est devenu aujourd’hui le sport favori de nombreuses femmes nanties dans ce pays. Et cela le plus souvent aux côtés des proches qui tirent le diable par la queue ou dans un environnement dépourvu de services de santé de qualité, système éducatif au point, système de transport calamiteux, difficulté d’obtention d’eau et d’électricité ?
Bien sûr que tout cela n’est pas bien évidemment de la faute de ces «pauvres» Dames dont l’origine de la fortune, dans la plupart des cas, est plus que douteuse. Et pas de doute qu’elles trouvent leur bonheur et s’épanouissent dans cette exubérance ostentatoire.
S’émanciper sans sacrifier nos valeurs
Mais, dans un pays en guerre où le tissu social est en lambeaux et où la majorité de la population vit dans la pauvreté, il est indécent de faire une si grande ostentation de richesses, de faire montre d’une telle exubérance voire d’une telle extravagance qui est à la limite de l’indécence.
Ce «gaspillage» est de nos jours l’une des pires formes de perversion de notre société en panne d’émergence. «Au Mali, le matérialisme épicurien emporte sur le spiritualisme platonique. Le plaisir semble devenir la raison d’être des personnes qui ne vivent que pour le présent sans se soucier de l’avenir de leurs familles et du futur de leur patrie…», a déploré dans un Twitt M. Séga Diarra, politologue et président du Mouvement «BI-TON».
Ce combat pour l’émancipation, l’autonomisation, l’équité genre… peut produire les effets escomptés s’il repose sur des valeurs maliennes et africaines, et non sur le complexe culturel, le mimétisme. De notre constat, il y a trop de préjugés dans les analyses de la situation de la Femme dans notre société. Loin de nous la volonté de nier «les discriminations», «les inégalités», «les stigmatisations»… Mais, ce sont toutes là des considérations occidentales, des valeurs qu’une autre société s’est imposée comme norme. On juge la Malienne à l’aune de valeurs occidentales.
Et pourtant, elle est dans un environnement qui, certes, lui impose des handicaps, mais lui offre aussi des avantages. Le plus important à nos yeux, c’est que la Malienne soit heureuse dans son environnement socioculturel, économique et politique. Et pour cela, elle ne doit pas être forcément vue comme une Occidentale dont l’émancipation, l’indépendance, la liberté… a aussi des avantages et des inconvénients.
Une Malienne a beau dépenser tous ses revenus dans les produits pour dépigmenter, sera-t-elle une femme blanche ? Loin de là. Au mieux, elle s’expose à être rejetée par ses sœurs Noires et dédaignées par les Blanches. Il en est de même que de s’accrocher aux valeurs occidentales pour s’émanciper.
Une universalité sournoise imposée aux autres cultures
Comme nous le défendions récemment dans une analyse, il ne saurait y avoir de normes standards de «Droits humains». Et surtout que ce sont les valeurs occidentales qu’on essaye d’imposer au reste du monde sous le couvert d’une sournoise universalité qui est le lit des préjugés les plus inacceptables.
Nos filles étaient excisées (et certaines le sont malheureusement encore) parce que nous pensions que cela était une bonne chose et non parce que nous sommes des sauvages. Nous n’avions pas atteint ce niveau d’essor scientifique pour comprendre que certains problèmes dramatiques de santé maternelle et infantile étaient liés à cette pratique.
Et c’est ce qu’il fallait faire comprendre à ceux qui sont accrochés à cette pratique. Et ce n’est pas en les considérant comme des sauvages qui mutilent leurs filles qu’on allait y parvenir… Maintenant que les Associations et ONG ont changé le fusil d’épaule, la lutte contre l’excision (mutilation génitale féminine est péjorative) commence à réellement produire les effets escomptés.
Cette lutte engagée par les fondatrices de l’OPF peut vite aboutir si les Femmes apprennent à compter d’abord sur elles-mêmes et à développer une solidarité à toute épreuve. Et, c’est un autre constat personnel, les femmes instruites font très peu d’efforts pour agir en modèles, en références… Au lieu d’aider leurs sœurs à progresser, elles les regardent souvent de haut et n’hésitent pas généralement à les écraser du poids de leur instruction si l’occasion se présente…
Autant de pièges que nos Nyeleninw de l’émancipation doivent déjouer pour que leur lutte puisse aboutir et réellement bénéficier à la société, à la nation, et surtout aux femmes !
Moussa Bolly
De la «CFA» à l’OPF
L’Organisation panafricaine des femmes, appelée à l’origine conférence des femmes africaines, est née le 31 juillet 1962 à Dar-es-Salam, en Tanzanie. Sa création a été initiée par des Africaines qui avaient le souci de cohésion et d’unité pour que les femmes se donnent les mains afin de se battre contre la colonisation. C’était dans un contexte où la moitié de l’Afrique était encore sous domination coloniale.
Pour l’histoire, le 31 juillet a été consacré «Journée de la femme africaine» à l’occasion du premier congrès de l’Organisation Panafricaine des Femmes (PAWO en anglais) qui s’était tenu à Dakar (Sénégal) le 31 juillet 1974.
La date historique souvent retenue pour cette journée est le 31 juillet 1962. Ce jour là, à Dar-es-Salam (Tanzanie), des femmes de tout le continent africain (dont Aoua Kéita) s’étaient réunies pour la première fois et avaient créé la première organisation de femmes : la «Conférence des Femmes Africaines» (CFA).
Le rôle historique joué par les femmes en Afrique, indiquent des observateurs, témoigne de leur capacité de réaliser et conduire les changements sur le continent. En 1962, les peuples africains se libéraient alors peu à peu de la tutelle des pays colonisateurs.
La libération totale du continent africain, l’élimination de l’apartheid et l’instauration d’une justice commune qui défend les droits de l’Homme en tant qu’être humain… devenaient alors les objectifs prioritaires du mouvement. De cette époque à nos jours, des avancées incontestables ont été réalisées dans la promotion, l’émancipation et l’autonomisation de la Femme. Mais, il reste aussi du chemin à parcourir !
MB