Un défi face aux solutions inégales et discriminatoires proposées par la
société
À chaque rentrée scolaire, les mères qui sont encore étudiantes doivent
relever un défi de taille : concilier leurs études avec les responsabilités
familiales et, dans certains cas, un emploi. Ce défi impose une charge
mentale considérable, et les réactions sur ce sujet sont nombreuses,
reflétant des points de vue divers selon la situation de chaque femme.
«C’est comme une course contre-la-montre. Je suis constamment sous
pression. Je dois préparer mes enfants pour l’école, gérer les tâches
ménagères, assister aux cours et trouver du temps pour mes devoirs. À la fin
de la journée, je suis épuisée, mais je n’ai pas le choix. Il faut continuer» ! La
confession est de Fatoumata Diallo, étudiante et mère de deux enfants. Pour
ce qui est de Mariam Koné, elle se sent tout simplement impuissante face à la
situation. «Parfois, j’ai l’impression que c’est impossible de tout gérer. J’ai
envisagé de quitter l’école à plusieurs reprises. Ma famille me soutient, mais
cela reste très difficile. Le soutien psychologique n’est pas vraiment présent, et
je me sens souvent isolée», avoue-t-elle. Pour beaucoup, la difficulté est
aggravée par les attentes sociales envers les mères. En tant que femmes,
elles sont fréquemment les principales responsables des tâches domestiques.
Même si, reconnaît Aminata Traoré (mère d’un enfant en bas âge), «mon mari
m’aide, mais la société attend encore que ce soit la femme qui s’occupe de
tout à la maison». Et de souligner, «même lorsque je rentre tard des cours,
c’est à moi de préparer le dîner».
D’autres témoignages vont dans le même sens. Awa Maïga, mère de trois
enfants et inscrite en comptabilité, regrette le manque de soutien. «J’ai
toujours le sentiment que les mères étudiantes sont invisibles. Tout le monde
parle des difficultés des jeunes mères ou des étudiantes, mais rarement des
deux combinées. Je pense qu’il faut sensibiliser davantage les gens, y
compris dans nos propres familles», se plaint-elle. Si certaines mères peinent
à tout gérer, d’autres refusent d’abandonner malgré les sacrifices. «Pour moi,
tout ça en vaut la peine. Mon rêve est de décrocher mon diplôme et je suis
prête à faire tous les sacrifices pour mes enfants. Même si je dors peu et que
je suis souvent stressée, je ne veux pas baisser les bras», souligne Sira
Traoré, mère célibataire et étudiante en droit des affaires.
Les mères étudiantes doivent aussi composer avec les impacts
psychologiques. «La charge mentale est réelle. Parfois, j’ai l’impression de
craquer. Mais, je pense que nous devons aussi parler de l’impact émotionnel
sur nos enfants. Mon fils me voit stressée et il s’inquiète pour moi. Cela me fait
mal de savoir que je ne suis pas toujours là pour lui», avoue Aminata Kéita,
inscrite en Sciences humaines. Même si des initiatives voient le jour, elles
restent habituellement limitées et inaccessibles pour certaines. «Là où je vis, il
n’y a pas d’infrastructure pour m’aider. Je dois voyager plusieurs heures
chaque jour pour aller à mes cours. Les crèches sont hors de prix et je dois
compter sur ma famille pour garder mes enfants. C’est une situation
épuisante», souligne Hadja Kouyaté, une mère vivant en périphérie de
Bamako. Elle fait donc face à des défis supplémentaires liés à la distance et à
l’isolement.
Les réactions ne viennent pas seulement des mères. «Je suis impressionné
par le courage de ma femme. Elle gère tout, nos enfants, son travail et ses
études. J’essaie de l’aider du mieux que je peux, mais je pense que la société
doit faire plus pour reconnaître ce que les mères étudiantes traversent»,
défend Seydou Diarra, père d’une petite fille. Cependant, d’autres hommes
comme Moussa Mangara ont une vision plus traditionnelle des rapports
femmes/hommes. «Les femmes devraient se concentrer soit sur leur
éducation, soit sur leur famille, mais pas essayer de tout faire en même temps.
Cela crée du stress inutile», dénonce ce dernier.
En tout cas, la gestion du temps pour les élèves ou étudiantes mères reste un
défi colossal. Face à des responsabilités multiples et à une charge mentale
parfois écrasante, ces braves dames doivent également continuer à faire
preuve de résilience. Malheureusement, les solutions proposées par la société
restent encore insuffisantes, inégales et généralement discriminatoires. Des
initiatives pour les soutenir existent, mais elles doivent être étendues et
soutenues par des politiques publiques. Les mères étudiantes ne devraient
pas avoir à choisir entre leur avenir académique et leur famille. Elles méritent
d’être accompagnées dans ce parcours semé d’embûches !
Sory Diakité
diasporaction.fr