Si les causes lointaines des rebellions cycliques au Mali, au Niger et au Tchad sont à rechercher dans la porosité des frontières héritées de la colonisation et l’extrême pauvreté, la cause immédiate de la crise au sahel serait la chute du guide Libyen. L’effondrement de la Libye a été minutieusement préparé par la France qui a embarqué certains pays et organisation dans cette aventure, comme les Etats Unis, la Grande Bretagne et l’OTAN. Ainsi pour se venger des présidents récalcitrants qui ont refusé de soutenir cette opération, comme ATT, Sarkozy a laissé entrer sur le territoire malien des Touaregs lourdement armés en provenance de la Libye et leur a promis l’indépendance de leur enclave qui est Kidal. La gravissime crise du sahel est partie de là. Face à l’enlisement de cette crise et de ses conséquences sur la tranquillité mondiale et surtout du prix fort que la France est en train de payer, Emmanuel Macron a décidé d’empêcher que les rebelles de l’Union des Forces de la Résistance, UFR déstabilisent le régime tchadien. A-t-il pris conscience de la gravité de l’acte de son prédécesseur Sarkozy au Mali en laissant entrer les Touaregs ?
L’on se rappelle qu’au fort de la crise libyenne, le Président de la République du Mali ATT, avait, contrairement à la plus part des chefs d’Etats francophones, refusé de lâcher Kadhafi aux impérialistes occidentaux. Nicolas Sarkozy, alors président de la République Française, avait juré en 2011 d’en découdre avec Amadou Toumani Touré et son régime pour leur refus d’obtempérer aux ordres du maitre, qui est la France. ATT et le peuple malien, dans sa grande majorité, avaient soutenu sans ambages le Guide de la Jamahiriya arabe Libyenne, Mouammar Kadhafi. Après la chute de ce dernier, Sarkozy, sachant bien les failles des armées africaines en général et surtout celle du Mali, en particulier, a demandé à l’Algérie et au Niger de laisser un passage sur leurs territoires pour les Touaregs maliens venus de la Libye, avec armes et bagages. Sarkozy aurait même précisé que leur destination finale était le nord Mali.
C’est de là qu’est partie la gravissime crise du Sahel, qui a aujourd’hui des répercussions sur la paix et la tranquillité mondiale. Le Mouvement National de Libération de l’Azawad, MNLA, armé et politiquement formé par la France avec le seul objectif d’affranchir Kidal et tout le nord du pays de la tutelle malienne pour devenir une entité autonome, a été submergé par les djihadistes qui ont fini par le chasser de son territoire. Ainsi, la digue a sauté et le Sahel a été inondé par ce terrible phénomène qu’est le terrorisme. Malgré l’intervention des forces françaises, Serval, pour arrêter la progression des terroristes vers le sud du Mali, ils ont résisté et se sont même reconstitués après les frappes françaises et ont même changé de stratégie et de mode opératoire. C’est face à cette nouvelle stratégie que l’ONU a envoyé une mission de stabilisation, appelée MINUSMA, qui est venue en renfort aux forces françaises Barkhane et à l’armée malienne. Mais, avec la multiplication des attaques et à la complexité de la mission au Sahel, la France a sollicité les pays africains en mettant en place la force conjointe du G5 Sahel, regroupant le Mali, le Tchad, la Mauritanie, le Burkina Faso et le Niger. Parmi ces cinq pays, seul le Tchad a une armée aguerrie et rompue à la tâche. Elle paiera même un lourd tribut dans les attaques, avec plus d’une soixantaine de soldats tués. C’est au regard de ce colossal effort consenti par le régime Tchadien dans la lutte contre le terrorisme que la France a volé au secours d’Idriss Deby pour le sauver du naufrage, en stoppant net la marche sur N’Djamena de l’Union des forces de la résistance. Même si, officiellement, elle semble agir à la demande du gouvernement tchadien et au nom d’un accord de coopération militaire et technique, la réalité est que la France n’a pas voulu commettre l’erreur qu’elle a commise au Mali sous ATT.
Le départ de Deby ouvrirait, a n’en pas douter, la boite de pandore au Sahel. Sinon, pourquoi soutenir un régime non démocratique, un Président à vie. Le régime de N’djamena est tout sauf un model en matière de bonne gouvernance, du respect des principes démocratiques et de celui des Droits de l’Homme. Malgré tous ses défauts, la France a préféré le garder et tant pis pour le Peuple Tchadien qui souffre énormément.
En somme, Idriss Deby, le Président Tchadien doit sa survie politique et le maintien de son régime, à la France et à la lutte contre le terrorisme. L’important rôle que son armée joue dans ce combat contre le terrorisme semble largement plaider en sa faveur. Comme pour dire qu’à quelque chose malheur est bon.
Youssouf Sissoko