La France, pays de choix pour les investissements des groupes italiens

En mettant la main sur Carte Noire, le torréfacteur Lavazza a fait de la France son deuxième marché / © GETTY IMAGES NORTH AMERICA/AFP/Archives / Tibrina Hobson
La presse italienne se désole régulièrement de la déferlante française sur ses entreprises. Pourtant, celles-ci ne cessent d’accroître leur présence dans l’Hexagone, qui arrive en tête de leurs préférences à l’issue d’une année 2016 record.

Le nombre de projets italiens lancés en 2016 en France a ainsi augmenté de 68% sur un an, passant de 84 à 141, selon des chiffres détaillés mercredi à Milan (nord) par l’Ambassade de France en Italie et Business France.

Ces projets, qui se répartissent entre création d’entreprises, extension de sites ou reprise d’entreprises en difficulté, ont permis la création ou le maintien de 3.228 emplois, dans des domaines aussi divers que l’agriculture, le transport, la logistique ou la métallurgie.

Avec ce résultat, le meilleur atteint depuis dix ans, la France conforte sa place de premier pays où investissent les entreprises italiennes à l’étranger (29% des projets contre 25% en 2015).

Selon Paul Hunsinger, ministre conseiller pour les affaires économiques basé à Rome, trois raisons fondamentales expliquent ce « grand intérêt des entreprises italiennes: le dynamisme des entrepreneurs italiens; l’attractivité de la France grâce aux nombreuses réformes engagées et aux mesures prises pour faciliter les investissements étrangers », et le fait que les relations entre Rome et Paris sont « excellentes ».

En 2016, 1.117 projets d’investissements étrangers ont été lancés en France. Les Etats-Unis arrivent en tête avec 16% du total, suivis de l’Allemagne (17%) et de l’Italie (13%).

Deux régions françaises accueillent plus de la moitié de ces investissements italiens, l’Ile-de-France et l’Auvergne-Rhône-Alpes. Et sans surprise, ils proviennent en majorité du nord de l’Italie (Lombardie et Piémont).

Plus de 2.000 entreprises italiennes sont présentes en France où elles emploient plus de 100.000 personnes. Dans le sens inverse, quelque 3.200 filiales d’entreprises françaises en Italie emploient plus de 200.000 salariés.

Porte d’entrée sur l’Afrique

La France est le troisième pays investissant dans la péninsule, avec un total de 51 milliards d’euros, tandis que les investissements italiens vers la France s’élèvent à 20,2 milliards.

Une différence qui s’explique par les spécificités de leurs tissus industriels: « la France, qui a plus de grandes entreprises, investit massivement à l’étranger tandis que l’Italie avec son fort tissu de PME exporte davantage », explique Paul Hunsinger.

Alors que l’Italie s’inquiète régulièrement du rachat par la France de ses joyaux, comme Gucci, Fendi ou Parmalat ces dernières années, des opérations importantes ont eu lieu récemment dans l’autre sens.

Le torréfacteur Lavazza a ainsi mis la main sur Carte Noire, lui permettant de faire de la France son deuxième marché, tandis que Campari s’est emparé de Grand Marnier. Plus récemment le constructeur naval Fincantieri est devenu l’actionnaire principal des chantiers de Saint-Nazaire (STX France).

Le sujet est sensible, à tel point que la fusion entre Luxottica et Essilor a donné lieu à des avis différents, dans la presse des deux pays, sur qui prenait le contrôle de qui…

Mais « voir si la France achète l’Italie ou si l’Italie achète la France n’est pas un sujet intéressant. Ce qui compte c’est le développement économique », estime ainsi Riccardo Samiolo, directeur financier du groupe italien Came, qui a investi en France.

Les atouts de l’Hexagone? Etre notamment « un point d’entrée vers les pays de l’Afrique sub-saharienne et du Maghreb », dit-il, en soulignant que « la France apprend comment approcher ces pays » et « la manière d’exporter » pour ceux voulant commencer à le faire.

Autres forces: « il est facile de travailler en France. Elle offre un environnement économique +clair+ et régulé », ajoute M. Samiolo.

Philippe Pereyron, directeur général opérationnel de SoluStil, groupe en difficulté ayant été racheté dans sa majorité en février par l’italien Cellino à ArcelorMittal, souligne que cette opération est « une vraie réussite ».

« Au début, nous étions inquiets… Mais on a vite compris que leur intention était de développer le groupe et notre clientèle. Nous avons retrouvé la confiance de nos anciens clients et notre chiffre d’affaires augmente », se félicite-t-il, en soulignant que le dialogue et les prises de décisions sont beaucoup plus simples et rapides que dans un grand groupe international.

(©AFP / 04 mai 2017 11h20)