En juin 2020, l’Union africaine et l’UNICEF ont lancé la campagne «Mon nom est personne », une initiative conjointe visant à promouvoir le droit de chaque enfant en Afrique à une identité légale, et donc à la justice.
Alors qu’à peine la moitié des enfants de moins de 5 ans vivant sur le continent sont enregistrés à la naissance, privant ainsi des millions d’autres de la possibilité de jouir de leurs droits fondamentaux, la campagne appelle les gouvernements et les parties prenantes concernées à accélérer les mesures qui se sont avérées efficaces pour fournir aux enfants une identité légale.
La pandémie de COVID-19 pose toujours un défi à l’accès aux services de base tels que l’enregistrement des naissances. Cependant, certains pays ont réalisé des progrès en s’assurant que les services d’enregistrement des naissances restent accessibles même pendant la pandémie, une indication de l’efficacité des bonnes pratiques durables préconisées et soutenues par la Commission de l’Union africaine et l’UNICEF, pour faire de l’enregistrement universel des naissances en Afrique une réalité d’ici 2030. Dans une tribune conjointe de l’UA et de l’UNICEF publiée, la campagne « Mon nom est personne » plaide pour une accélération des progrès des systèmes d’enregistrement des naissances.
La campagne « Mon nom est personne », « Pour chaque enfant une identité légale, pour chaque enfant l’accès à la justice », identifie l’enregistrement des naissances comme un élément-clé pour l’accès à une justice adaptée aux enfants, l’acte de naissance étant un document essentiel pour que chaque personne puisse prouver son identité légale, et une base sur laquelle les enfants peuvent établir une nationalité, éviter le risque d’apatridie et espérer une protection contre la violence et l’exploitation. « L’enregistrement des naissances joue un rôle essentiel pour prouver le droit d’un enfant à accéder à la justice. Les idéaux de l’Agenda 2063 de l’Afrique et de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant ne seront pas atteints sans la garantie, la protection et la promotion des droits de l’enfant en tant que moteurs de la renaissance de l’Afrique » a déclaré S.E. Amira el Fadhil, Commissaire à la santé, aux affaires humanitaires et au département social lors de la réunion ministérielle de novembre 2020.
Un certificat de naissance peut également être exigé pour accéder aux systèmes de services sociaux, notamment la santé, l’éducation et la justice. Prenons l’exemple de cette fillette de 9 ans, Ada, dont le rêve de devenir médecin est menacé par l’absence d’identité légale qui l’empêche de se présenter aux examens de l’école primaire. Grâce à des services d’enregistrement des naissances décentralisés, accessibles et abordables, Ada et des millions d’autres enfants ont la possibilité de se présenter aux examens, d’obtenir leur diplôme et de poursuivre leurs rêves. La campagne préconise également de tirer parti de l’enregistrement des naissances en utilisant les écoles comme plateformes pour identifier les enfants non enregistrés et en s’appuyant sur les systèmes de protection sociale et de l’enfance pour atteindre les enfants les plus vulnérables afin de contribuer à la couverture universelle.
La preuve de l’âge est nécessaire pour aider à prévenir le travail des enfants, le mariage des enfants et le recrutement des mineurs dans les forces armées. Parmi les défis qui continuent d’entraver la réalisation de l’enregistrement universel des naissances en Afrique, il y a la faible priorité accordée à l’enregistrement civil dans les plans et budgets nationaux, et le manque d’engagement fort de la part des gouvernements.
L’enregistrement des naissances n’est pas gratuit dans la plupart des pays et certains parents ne sont pas en mesure de payer les frais directs et indirects. En outre, dans la plupart des pays francophones, les enregistrements tardifs ou différés sont passibles d’amendes. C’est le cas de Jabari et Ebele, les parents d’Izegbe, un nouveau-né qui doit être enregistré à la naissance. Les parents connaissent cependant trop bien d’expérience les difficultés rencontrées lors de l’enregistrement de leur enfant. Cela souligne la nécessité de moderniser le système d’enregistrement des faits d’état civil pour permettre l’utilisation d’équipements, d’applications et de plateformes numériques et mobiles afin d’obtenir des processus d’enregistrement et de déclaration plus simples et plus systématiques.
Les plans de relance COVID-19 offrent l’opportunité d’investir dans un enregistrement numérique moderne mais contextualisé des naissances afin de transformer les systèmes largement basés sur le papier en un système numérique, améliorant ainsi l’efficacité, affirme la campagne « Mon nom est personne ». Pour accélérer l’enregistrement des naissances, il est urgent d’investir dans des solutions numériques adaptées au contexte, qui permettront un enregistrement efficace, sûr et abordable des naissances. Le passage au numérique des systèmes d’enregistrement des faits d’état civil et des statistiques de l’état civil nécessite des ressources techniques et financières, d’où la nécessité de mettre en place des mécanismes de coordination solides, tant au niveau intergouvernemental qu’avec les partenaires du développement. C’est ce que montre cette animation sur l’importance de l’interopérabilité entre les systèmes d’enregistrement des faits d’état civil, de santé et de vaccination ; le rôle important du secteur de l’éducation ; et l’importance de la numérisation des systèmes et de la décentralisation des services au niveau local.
Bien que des progrès aient été constatés au fil des ans dans de nombreux pays d’Afrique, les systèmes d’enregistrement des faits d’état civil et de statistiques de l’état civil sont largement dominés par des projets isolés et des expériences ad hoc, sans lien avec les cadres de développement nationaux ou les orientations politiques. Le commissaire de l’Union africaine chargé du développement économique, du commerce, de l’industrie et des mines, l’ambassadeur Albert Muchanga, souligne la nécessité de mettre en place des systèmes d’enregistrement des faits d’état civil fonctionnels, qui permettront de donner une identité légale à tous les enfants africains. « La Stratégie africaine de transformation numérique (SDN) 2020-2030 est tributaire de systèmes d’enregistrement des faits d’état civil fonctionnant efficacement, de l’enregistrement des événements vitaux de chaque citoyen et de la collecte, de la compilation, de la production et de la diffusion régulières et continues des informations afin d’orienter les politiques et la planification, d’éclairer les décisions et de permettre à toutes les parties prenantes de suivre les progrès et de procéder aux ajustements nécessaires pour garantir la transparence et la responsabilité mutuelle dans tous les domaines liés au développement », observe-t-il.
« L’enregistrement des naissances doit être décentralisé par le biais des services de santé et de vaccination et de l’éducation, déclare Marie-Pierre Poirier, directrice régionale de l’UNICEF pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre. Le processus doit être simple, gratuit, numérisé et accessible au niveau local. Dans de nombreux pays d’Afrique, les gouvernements accélèrent l’enregistrement des naissances, faisant du passage au numérique lors de la pandémie de COVID-19 une opportunité pour qu’aucun enfant ne soit laissé pour compte. »
L’interopérabilité avec les services de santé est également déterminante pour faire progresser la décentralisation des services, comme l’illustrent des pays comme la Côte d’Ivoire, où l’enregistrement des naissances est actuellement relié à plus de 90% des services de vaccination du pays. En Tanzanie, même si la COVID-19 a posé des problèmes d’accès aux services pendant les deux premiers mois, grâce aux services décentralisés et intégrés des établissements de santé qui proposent spontanément des services à guichet unique pour l’enregistrement et la certification, le nombre cible d’enregistrements et de certifications pour 2020 a été atteint.
« Nous plaidons pour que les gouvernements révisent leurs lois et politiques et travaillent avec les communautés pour faire évoluer les attitudes et les comportements démontrant la valeur et les avantages de l’enregistrement des naissances, créer une demande en ce sens et rendre l’enregistrement des naissances gratuit et accessible pour tous. Nous devons investir et nous engager à réaliser l’enregistrement universel des naissances d’ici 2030 », estime le Dr Edward Addai, représentant de l’UNICEF auprès de l’Union africaine et de la Communauté Economique Africaine.
En 2020, la plupart des États membres d’Afrique se sont ralliés à la campagne « Mon nom est personne », ce qui a abouti à l’adoption d’une Déclaration lors d’un dialogue virtuel de haut niveau organisé en novembre 2020, qui appelle à la mise en œuvre des trois facteurs de changement – interopérabilité, numérisation et décentralisation.
« Afin d’assurer la continuité des activités pendant la COVID-19 et d’autres urgences, l’enregistrement de l’état civil doit être considéré comme un service essentiel, et les États membres de l’UA doivent mettre en place des stratégies pour assurer la continuité des activités et moderniser leurs systèmes pour faciliter son accessibilité et son efficacité. Cela peut se faire en reliant le secteur de la santé au système d’enregistrement des faits d’état civil et aux bureaux nationaux de statistiques, ainsi qu’en numérisant les services afin d’obtenir des services d’enregistrement efficaces, sûrs et abordables et des sources de statistiques vitales de qualité, opportunes et fiables », a déclaré le Pr Victor Harison, Commissaire aux affaires économiques, CUA lors de son discours à la conférence ministérielle de novembre 2020.
Tout en poursuivant l’accélération des pratiques, la Commission de l’Union africaine et l’UNICEF continuent de se mobiliser pour plus d’engagement et d’action, et recommandent aux Etats membres :
1. D’assurer une identité légale pour tous avec une priorité pour les communautés marginalisées, démunies et vulnérables.
2. De considérer l’enregistrement des faits d’état civil comme un service essentiel et d’assurer la continuité de la prestation de services malgré les fermetures.
3. D’augmenter le financement des systèmes d’enregistrement des faits d’état civil et de l’état civil.
4. De supprimer les frais pour les enregistrements tardifs et de prolonger ou supprimer les délais pour les enregistrements tardifs
5. De simplifier les procédures d’enregistrement et établir des dispenses pour les documents manquants.
6. D’améliorer la mise en œuvre de modèles de prestation de services innovants basés sur le modèle d’intégration et d’interopérabilité, de numérisation et de décentralisation des services d’état civil.
7. De former des agents d’enregistrement auxiliaires.
8. Un bilan de la mise en œuvre de la campagne « Mon nom est personne », ainsi que les recommandations adoptées seront présentés lors de la 6e Conférence des ministres au Mozambique en octobre 2021.
Pour plus d’information, veuillez conter :
Doreen Apollos, Direction de l’Information et de la Communication | Commission de l’Union Africaine | E-mail: ApollosD@africa-union.org | www.au.int| Addis Abéba | Éthiopie
Sandra Bisin, UNICEF Directrice de la Communication pour l’Afrique central et de l’Ouest: +221 77 819 2300, sbisin@unicef.org