Jeudi matin, à Konna, des foules venues des quatre coins de la région rejoignent l’un des plus grands marchés portuaires à ciel ouvert, en plein centre du Mali. Nous sommes dans la région de Mopti.
L’on assiste à un véritable chassé-croisé dans la rue bruyante et improvisée, remplie de marchandises. Pendant ce temps, il est impossible de ne pas remarquer les va-et-vient incessants des marchands dont les sandales giflent sans cesse le sol poussiéreux lorsqu’ils se déplacent entre les étals offrant, entre autres, poissons, bétail, céréales, oignons séchés, ignames, dattes, viande, thé, bois, fruits et légumes.
« Les affaires vont bien de nos jours, nous venons ici pour vendre tous les jeudis. Sans peur. Je suis heureux de voir les Casques bleus et nos forces de sécurité maliennes ici. Cela me rassure et je me sens protégé des braqueurs », explique Djénéba Kassogué, une vendeuse de fruits et de boissons fraîches de Mopti.
Elle se souvient avoir bravé les 65 km de route menant à Konna, il y a trois ans, craignant de se faire voler. Le marché étant désormais sécurisé et fonctionnant à plein régime, cette vendeuse de fruits et de boissons fraîches peut maintenant subvenir aux besoins de sa famille de trois enfants.
Le marché de Konna a rouvert ses portes fin 2013 à la suite de violences ayant obligé les civils à fuir, dévastant l’économie locale. Depuis lors, les forces de police des Nations Unies (UNPOL) et celles de sécurité malienne effectuent des patrouilles conjointes régulières sur le marché qui permettent de renforcer la confiance de la communauté locale et de contribuer à une paix durable dans la région, devenue le nouvel épicentre du conflit du Mali.
« Afin de prévenir les attaques sur les terrains de foire et de renforcer la confiance de la communauté, nous effectuons des patrouilles régulières coordonnées pour dissuader les criminels. Cela apporte un sentiment d’espoir à la population », explique le commandant de patrouille de la police des Nations Unies, Beman Sanogo, avant de poursuivre : « nous avons plusieurs patrouilles coordonnées avec la police malienne. Nous avons coordonné des points de rencontre et nous partons en patrouille ensemble ».
Les patrouilles à pied sur le marché portent leurs fruits
Vêtus de leurs uniformes, qui se distinguent dans la foule, les 12 officiers de l’unité de police constituée du Togo (FPU), entrent dans le marché en pleine effervescence. Situé à un emplacement stratégique, le marché dynamise les activités commerciales du cercle de Mopti. Il rassemble également des commerçants itinérants et des habitants des villages voisins proches du fleuve Niger.
« Des patrouilles sont organisées pour rassurer la population, pour l’aider à surmonter son sentiment d’insécurité. Au début de la crise, les gens n’osaient pas sortir, craignant les groupes armés et les attaques », a déclaré Beman Sanogo.
L’ampleur sans précédent de la violence qui a commencé en 2012 a entraîné un déplacement généralisé et une répétition des violations des droits de l’homme à l’encontre des civils vivant dans cette zone. Jadis paisible, Mopti était connue sous l’appellation de « Venise du Mali » car située au confluent du fleuve Niger et son affluent le Bani. Les violences ont éclaté lorsque les rebelles séparatistes Touaregs se sont saisis d’une grande partie du Nord du Mali, à la suite d’un coup d’État militaire dans la capitale Bamako, favorisant un exode massif des populations. La situation va empirer après l’immixtion des groupes armés dans le conflit et leur infiltration progressive dans les communautés du centre du pays.
La recrudescence des conflits intercommunautaires entre les éleveurs peuls et les agriculteurs Dogon et Bambara, ainsi que les conflits intracommunautaires opposant les Peuls, associés aux attaques de groupes extrémistes violents, ont tous contribué à aggraver l’instabilité dans cette région.
Plus de 1 500 incidents violents ont causé la mort de 1 323 civils et blessé 611 autres, pour le seul centre du Mali, depuis janvier 2017.
Pourtant ce jeudi, le marché semblait calme et paisible, les marchands se réjouissant de voir la patrouille conjointe sur le terrain. « C’est très bon, cela nous permet de travailler librement, » a déclaré Abbas Diallo, debout devant une petite épicerie. « Je pense que c’est rassurant pour la population. Je veux que ça dure », a-t-il ajouté.
Patrouiller nuit et jour pour protéger les civils
L’amélioration progressive de la sécurité depuis l’arrivée des soldats de la paix a entraîné une reprise de l’économie locale à Konna, ville isolée de 36 000 habitants du centre du Mali.
Les mesures prises par la Minusma pour aider à réduire le nombre de victimes dans le pays semblent porter leurs fruits : « en renforçant la formation, en augmentant le nombre de patrouilles de 50 par jour en moyenne, en tirant parti des patrouilles conjointes tous les jours, 24 h / 24 et 7 j / 7, nous avons des progrès significatifs vers la diminution du nombre de victimes », a déclaré Issoufou Yacouba, commissaire de police des Nations Unies au Mali.
Il n’y a pas si longtemps, des touristes du monde entier se bousculaient dans cette partie du Mali et remontaient le fleuve Niger en direction du nord jusqu’à la ville légendaire de Mopti. Aujourd’hui, la région jouit de la triste réputation de nouveau cœur du conflit malien.
Pour autant, malgré des conditions de travail extrêmement difficiles et les défis logistiques qui l’accompagnent, la police des Nations Unies reste déterminée à aider, à protéger les civils et à instaurer une paix durable dans ce pays enclavé du Nord-Ouest africain.
Bureau de la Communication Stratégique et de l’Information Publique
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