Zone d’extraction minière industrielle et artisanale par excellence, le cercle de Kéniéba, bien qu’il regroupe quatre grandes sociétés minières et une ruée d’orpailleurs dont la plus part venue des pays voisins comme le Burkina Faso et la Guinée-Conakry, vit dans des conditions de précarité. Elle profite très peu de sa richesse naturelle.
Pour le chef de village de Mamarouya, situé à une centaine de kilomètres de la ville de Kéniéba, Douka Danfaga, malgré la richesse de leur sous-sol, le village a un manque crucial en eau potable, en infrastructures routières et sanitaires. « Comment comprendre que Mamarouya, qui est une zone d’extraction d’or n’a pas d’infrastructures routières et sanitaires conséquentes. Idem pour l’école. La plupart des exploitants que vous voyez viennent de pays voisins comme le Burkina Faso et la Guinée-Conakry. Pourtant leurs sous-sols sont aussi riches en or. Pourquoi venir chez nous, c’est parce que nous ne sommes pas bien organisés. Si on ne réagit pas vite, le jour où notre sous-sol s’appauvrira, ils quitteront tous Mamarouya laissant derrière eux la désolation. Notre village seul ne peut pas gérer le monde qui est là pour l’orpaillage. Nous sommes certes vieux, mais que sera l’avenir de nos enfants si nous ne prenons pas garde ? Que les autorités entendent notre appel. Nous vivons mal ».
S’inscrivant dans la même logique, Bakary Monékata, un autre habitant de Mamarouya s’indigne. « On a besoin du soutien de tous. Comment comprendre que notre village, tant riche en sous-sol vit aujourd’hui dans une précarité totale. Ce sont les étrangers qui viennent exploiter notre sous-sol et partir ».
Fanta Kéita, une septuagénaire, habitante de la ville de Kéniéba, assure qu’ »en dehors de Kéniéba, les gens pensent que les populations ici nagent dans le bonheur. Il suffit d’être ici pour savoir les réalités. Comment comprendre que nous vivons dans de telles conditions misérables alors que même qu’en Occident on parle de la richesse du sous-sol de Kéniéba. Nous n’avons d’autre chose à faire que de nous asseoir dans l’humiliation. Nos enfants vivent dans le chômage. Les sociétés minières ont rongé nos terres cultivables. Nous invitons les autorités à venir débattre sur ce problème avec nous ».
« Comment comprendre que le Mali qui est le troisième producteur d’or en Afrique, et que Kéniéba, son point focal vit dans les mêmes conditions, que nos ancêtres. Nous, jeunes de Kéniéba sommes au chômage. Les sociétés minières recrutent plus les étrangers que les enfants de Kéniéba. Quelle désolation ! » s’insurge Mamadou Magassa, un jeune leader de Kéniéba.
Lassana Camara, président de la Fédération locale des orpailleurs du cercle de Kéniéba, invite le gouvernement à revoir la situation des sociétés minières qui réclament leurs permis d’occupation partout sur leur sol. Selon lui, la région de Kayes ne bénéficie que de 1 % de son or. Dans ce pourcentage, la mairie prend 60 %, 25 % vont au conseil de cercle et 15 % à la région. Comment comprendre cela ?
Pour organiser les orpailleurs et créer des comptoirs dans le but de canaliser la production d’or dans la zone, les responsables de l’union des comptoirs et raffinerie d’or du Mali sont à pied d’œuvre depuis quelques mois afin de donner à la population son dû.
Ousmane Sagara