Journal Alternance : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Sambala Sidibé Je suis Sambala SIDIBE, Géographe Environnementaliste, membre du Comité Exécutif de l’Adéma PASJ (dernier congrès d’octobre 2021), secrétaire général adjoint de la section VI-Bamako et secrétaire Général de la sous-section de Dianéguela. Au plan professionnel, je suis à l’Agence Nationale Pour l’Emploi (Chef de Département Formation Promotion de l’Emploi).
- A: Actualité oblige, quelle est votre lecture de la crise que traverse le Mali ?
- S : D’une manière générale, chaque Nation ou Pays, dans son évolution connait des moments de crise, le Mali vit actuellement son moment. Il y a 20 ans ce sont les pays comme le Liberia, la Siéra Léone, la Côte d’Ivoire qui étaient au centre des crises.
Ma lecture de la crise actuelle du Mali se résume à une faillite collective aggravée par la crise Libyenne. En effet, le dysfonctionnement ou les entraves à nos valeurs et principes démocratiques et sociétales ont conduit le Mali dans cet état. L’illustration de cette situation est le nombre de coup d’Etat, soit 4 en 60 ans d’Indépendance (1 coup d’état chaque 15 ans).
La faillite du Mali se constate à tous les niveaux, l’émiettement de la classe politique (plus de 200 partis), de la société civile (au tant d’association que de famille ou responsables religieux , syndicaux etc …) bref, le Mali apparait comme s’il n’y a aucun dénominateur commun entre les citoyens : tout est désuni ! L’Internet et les réseaux sont venus en rajouter.
Les fléaux dont souffrent le Mali à savoir la corruption, le népotisme, le favoritisme (etc. ) ont gangréné tous les secteurs. A ces contre valeurs, il faut ajouter le non-respect de la parole donnée, l’ingratitude, toutes choses que nos aînés, il y a seulement 20 ans, considéraient comme des crimes de lèse-majesté.
Il faut inverser cette tendance en définissant le type de société que nous voulons et quelle cellule familiale à bâtir en adaptant nos valeurs sociétales aux exigences de notre temps. Il est clair que la roue du développement ou de la modernité doit tourner dont il faut s’adapter ou se faire entrainer.
J.A : les sanctions de la CEDEAO et de l’UEMOA prises à l’encontre du Mali sont-elles légales Quelles peuvent être ses conséquences sur l’économie malienne ?
- S : L’adhésion du Mali à la CEDEAO et à l’UEMOA s’inscrit dans le cadre du respect des dispositions de notre Constitution qui stipule que « …le Mali est prêt à renoncer une partie de sa souveraineté pour l’intégration Africaine ». Ces organisations ont, d’ailleurs, été créées sous l’égide du Mali qui a beaucoup contribué à l’amélioration des textes dont le fameux texte additionnel portant sur la démocratie et la bonne gouvernance.
Je rappelle que la CEDEAO et l’UEMOA ont par le passé pris des sanctions contre certains pays ; le Niger (sous la présidence de Alpha O.KONARE), la Côte d’Ivoire en 2010 (sous la présidence de ATT).
Pour ce qui concerne le Mali, c’est la deuxième fois, en 2012 et cette fois ci en -2021-2022. La légalité de ces sanctions est sans ambiguïté dès lors qu’il s’agit du respect des règles et principes de nos organisations communes. Cependant, pour ce qui concerne l’UEMOA, la logique aurait prévalu de prendre les décisions dans un état membre.
Les conséquences de ces sanctions, sans être économiste ou financier, vont entrainer le ralentissement de l’activité économique, le dysfonctionnement dans les marchés et la spéculation.
Je profite de votre interview pour inviter les autorités de la transition à privilégier le dialogue, la concertation pour trouver une issue heureuse à cette crise avec nos organisations sous régionales.
J.A : Apres le Mali, la Guinée Conakry et le Burkina peut-on dire que la spirale de coups d’États en Afrique de l’ouest est la conséquence de la mal gouvernance et d’une démocratie mal enseignée ?
S.S : La démocratie est une valeur universelle que chaque peuple applique en tenant compte de ses valeurs et de son environnement socio-politique. Notre société, de tous les temps, applique le dialogue et la concertation comme mode de gestion du pouvoir du niveau village jusqu’au sommet. Chaque fois que ces ressorts prennent un coup, il y a crise dans la société.
Les coups d’état survenus dans nos pays (Mali, Guinée et Burkina) illustrent une insuffisance dans la gestion démocratique de nos Etats. La Gouvernance, il s’agit en fait de la Bonne Gouvernance, est le respect des règles et principes de gestion dans la transparence et la redevabilité. C’est aussi, la capacité de nos gouvernants à transcender les problèmes politiques en dehors de tout clivage partisan. Cependant les 3 cas de coups d’état ne sont pas similaires. Pour le Mali, c’est la mauvaise gestion des élections, notamment les résultats des législatives de 2020 par la Cour Constitutionnelle ; la Guinée, c’est le mandat de trop de Alpha CONDE alors que le Burkina Faso est victime de l’insécurité que le Président du Faso n’est pas parvenu à trouver une solution.
Dans tous les cas, je pense que « l’Harmattan Sahélien » des coups d’état ne peut pas se prospérer, l’échec du cas de la Guinée Bissau est illustratif même si le contexte sous régional et régional se caractérise pour une grande propagande et une confusion généralisée et entretenue.
Il est de la responsabilité des Démocrates et Républicains de l’Afrique (partis politiques, société civile y compris les syndicats) de trouver une ou des solutions aux maux et problèmes de l’Afrique.
J.A : votre parti a tenu son congrès ordinaire, un bureau du Comité Exécutif a été élu est-ce le retour de l’unité et de la cohésion ?
S.S : L’Adéma Parti Africain pour la Solidarité et la Justice (Adéma PASJ) est un acteur majeur de la scène politique national, voir sous régional et international ; bref la voix de l’Adéma PASJ porte plus haut. Pour aller à son 6e congrès ordinaire, le Comité Exécutif d’alors a lancé le processus de renouvellement des structures ou organes du parti. Il est vrai que ce processus ne s’est pas passé sans problème dans certaines sections comme par exemple en commune VI du District de Bamako.
Le congrès, qui s‘est tenue les 16, 17 et 18 octobre 2021, a élu un Comité Exécutif de 89 membres avec à sa tête, le camarade Président Marimantia DIARRA. Ce congrès s’est tenu dans un climat apaisé, sans grande tension grâce à la maturité des différents courants qui animent le parti. J’ai noté un fort rajeunissement de la Direction du parti, plus de 60% des membres sont des jeunes qui sont encadrés par les anciens du parti qui ont fait montre de leurs expériences politiques dans le parti.
De par sa composition, de la qualité des camarades membres actuels du CE (Comité Exécutif) et surtout le mode de gouvernance instauré, l’unité et la cohésion du parti se trouvent confortées.
Ce qui est évident, la gestion du parti a changé et les militants, militantes de l’Adéma PASJ sont de plus en plus confiants. Cette image du parti contribue à conforter la démocratie au Mali.
Notre vision est « œuvrer par l’Adéma PASJ pour construire le Mali démocratique et prospère ».
J.A: l’ADEMA aura-t-il son candidat à la prochaine présidentielle ou accompagnera-t-il comme d’habitude ?
S.S : L’Adéma Parti Africain pour la Solidarité et la Justice (Adéma PASJ), en tant que parti politique, a pour objectif principal la conquête et l’exercice du pouvoir. A titre de rappel, l’Adéma PASJ a soutenu son « propre candidat » en 1992, 1997 (Alpha Oumar KONARE), 2002 (Soumaila CISSE) et 2013 (Dramane DEMBELE).
Par contre en 2007(Amadou Toumani TOURE) et 2018 (Ibrahim Boubacar KEITA), paix à leurs âmes, l’Adéma PASJ a inscrit son soutien dans le cadre des alliances électorales. Il est vrai que ces soutiens ont entrainé beaucoup de remous dans le parti.
Pour ce qui concerne les Présidentielles à venir, les textes prévoient le choix d’un candidat Adéma PASJ mais ces mêmes textes n’excluent pas une alliance politique et électorale. Au moment où je m’entretiens avec vous, le processus de désignation du candidat de l’Adéma PASJ n’est pas lancé surtout qu’on ne sait pas le calendrier de l’actuelle transition. Cette fois ci, je pense que les cadres du parti vont tirer les leçons des expériences antérieures pour éviter les scénarios de 2002, 2013 et 2018.
J.A: Vous êtes chef de département formation Promotion de l’Emploi (DFPE) à l’ANPE, pouvez-vous dresser un bilan des actions que vous avez menées ?
S.S : L’Agence Nationale Pour l’Emploi est une des plus anciennes structures dédiée à l’emploi. Elle est issue de L’Office Territoriale de la Main d’œuvre qui a été créée en 1954. L’ANPE a pour objectif de contribuer à la mise en œuvre de la Politique Nationale de l’Emploi du Mali. Elle intervient dans les domaines de l’intermédiation, de l’auto emploi ou l’entreprenariat, du perfectionnement-reconversion, entre autres.
Il est vrai que je suis à l’ANPE et responsable du Département en charge de la formation, de la promotion de l’emploi, il ne me revient pas de dresser un bilan des actions ici, mais ce qui est sûr, l’équipe du département dont j‘ai la responsabilité de diriger contribue à l’atteinte des résultats de l’ANPE et cela à la satisfaction de la Direction Générale.
J.A: quel est votre mot de la fin ?
S.S : Je voudrais, tout d’abord vous remercier pour cette opportunité de m’adresser aux lecteurs de votre Journal Alternance, voir au-delà, pour partager mes idées ou mon point de vue sur les sujets que nous venons d’évoquer et qui sont d’intérêt national.
L’occasion est opportune pour appeler aux forces politiques, sociales et religieuses à un sursaut national autour du minimum consensuel dans l’intérêt général de notre pays qui est un bien commun à nous tous. Ce minimum consensuel doit se faire dans un dialogue franc, sincère et constructif et de façon inclusive.
Je souhaite, de tout cœur, que les autorités de la transition contribuent à la réalisation de ce minimum consensuel et œuvrer au dialogue et à la négociation pour faire le Mali, rien que le Mali.
Bonne lecture et heureuse année 2022. Vivement la paix et la concorde au Mali dans une Afrique solidaire. Je vous remercie.
Propos recueillis par Youssouf Sissoko
Source: L’Alternance