Selon une dépêche de l’AFP du 25 juin, une source militaire malienne, le capitaine Ousmane Diarra, avait indiqué que l’armée malienne n’avait pas participé à l’attaque proprement dite. Ce qui avait suscité des interrogations et colère chez les Maliens au point qu’un député du Parena s’était saisi de la question lors des débats sur la Déclaration de Politique Générale du Gouvernement. Il s’inquiétait de la situation, d’autant plus qu’il ne s’agissait pas d’une première, l’armée mauritanienne étant intervenue au moins deux fois sur notre territoire: en juillet et en septembre 2010. Les autorités maliennes, il faut le dire, se sont fait remarquer par un grand déficit de communication sur la situation en particulier sur la participation de l’armée malienne.
Le député Parena a posé la question de savoir si la terre sacrée du Mali était sous notre contrôle. « Sommes-nous en train de perdre notre intégrité territoriale et notre souveraineté ? Pourquoi notre armée ne combat-elle pas AQMI ? Pourquoi ce sont les autres qui le font sur notre territoire ? Récemment, l’armée nigérienne a affronté une unité d’AQMI sur le territoire du Niger. Ne pouvons-nous pas faire comme eux ? Pourquoi les Mauritaniens entrent et sortent de chez nous comme ils le veulent ? » Autant d’interrogations sur les activités de notre armée nationale.
C’est à travers un communiqué tardif, diffusé sur l’Ortm que le ministère de la Défense et des Anciens Combattants informe que l’armée malienne a participé à cette opération dans le Wagadou. Selon ce communiqué, c’est dans le cadre des opérations conjointes engagés par ces pays que « les forces armées maliennes ont capturé le 25 juin 2011, 11 individus dans les environs de la forêt de Wagadou. Les prisonniers ont été mis à la disposition des services spécialisés pour des besoins d’enquêtes », précise le communiqué.
Opération conjointe « Benkan »
Joint, le Colonel Idrissa Traoré, Directeur de l’information et des relations publiques des armées (Dirpa), nous apprend que l’opération conjointe porte le nom de « Benkan ». Elle a été planifiée, les tâches reparties pour l’occupation de la zone et placée sous commandement malien. C’est cependant l’armée mauritanienne qui est tombée sur l’ennemi et qui a eu un appui de l’armée malienne, selon le Colonel Idrissa Traoré.
Tout compte fait, les captures de 11 individus du 25 juin n’ont pas eu lieu le même jour de l’assaut dit mauritanien, survenu vendredi 24 juin à 17 H 45 minutes. Les 11 personnes capturées par notre armée étaient-elles armées et en position de combat ? Pour le Directeur de la Dirpa, ce ne sont pas ces détails qui importent. « L’armée malienne a un objectif à atteindre : la sécurisation des biens et des personnes », a ajouté le Colonel.
Nos informations nous permettent de dire aujourd’hui que la base d’Aqmi était située et connue de toutes les parties prenantes dans la question. Il est donc difficile de soutenir que c’est à la suite d’une répartition des tâches que l’armée mauritanienne est tombée sur un campement d’Aqmi. Elle a plutôt donné l’assaut sur le territoire malien pour déloger ce camp d’Aqmi. Et cela s’est passé le 24. D’où sortent alors les 11 personnes capturées le 25 juin, le jour d’après ?
L’armée mauritanienne est venue chercher Aqmi
Au début du mois de juin, des militaires mauritaniens sont arrivés jeudi 9 juin à Ségou (240 km au nord-est de Bamako) pour une réunion, à huis clos, avec leurs homologues maliens. Cette réunion devait déboucher sur un plan de lutte contre Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) à leur frontière commune. L’objectif étant de dégager rapidement « un plan d’attaque contre Aqmi dans la forêt du Wagadou », proche de Nara, ville à environ 50 km de la frontière mauritanienne dans l’ouest du Mali.
« D’après des sources proches du dossier, des officiers de l’armée de l’air faisaient partie des deux délégations, laissant envisager un recours à des moyens aériens pour le projet d’opération », avait écrit l’AFP le 9 juin. Par ailleurs, dans un entretien le 6 juin avec l’AFP à Nouakchott, le président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz avait expliqué que son pays avait décidé de mener pendant plusieurs mois en 2010 et 2011 des opérations militaires contre Aqmi dans le nord du Mali pour porter un coup aux hommes de cette organisation.
«Tous ces gens-là nous viennent de l’autre côté» de la frontière mauritanienne, «il fallait agir pour prévenir les attaques» en Mauritanie, avait-il expliqué. Selon le président mauritanien, le retrait de l’armée mauritanienne du Mali, il y a environ deux mois, a été suivi de l’implantation de nouvelles unités d’Aqmi près de la frontière, en particulier dans la forêt de Wagadou, évoquant sans plus de détails des «dispositions» prises «pour répondre à cette situation». Ould Abdel Aziz annonçait que l’armée mauritanienne irait les chercher les éléments d’Al Qaida où ils se trouvent. Et c’est chose faite depuis le 24 juin.
B. Daou
Le Républicain 30/06/2011