Avec 1,6 million d’habitants et la noix de cajou comme seule industrie, la Guinée-Bissau, coincée entre le Sénégal et la Guinée Conakry, est l’un des pays les plus pauvres du monde. Pourtant, les Mercedes, BMW, Audi et 4X4 Nissan sont nombreux dans le centre-ville de la capitale ; et leur présence même témoigne de la vitalité du narcotrafic.
En effet, c’est par Bissau que transitent des tonnes de cocaïne en provenance d’Amérique Latine, à destination de l’Europe. « Dans mon entourage, certains ont pu s’acheter trois à quatre BMW, alors qu’ils sont au chômage. Les militaires leur donnent de l’argent, et en échange, ils transportent de la cocaïne », confie un jeune chauffeur de bus.
Un pays sans Etat ?
Selon l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, depuis 2009, il n’y a pas officiellement et de saisies de drogue dans le pays. Ce qui ne veut pourtant pas dire que la cocaïne ne circule plus dans cet Etat contrôlé par l’Armée qui, selon Christophe Champin, est « un maillon essentiel du trafic de cocaïne ». Et le confrère de FRI, d’indiquer : « De nombreux experts estiment que le trafic continue en Guinée-Bissau, même s’il a régressé ». En fait, depuis avril 2010, les trafics ont repris de plus belle. Quant à incarcérer les narcotrafiquants…
En fait, la Guinée-Bissau ne dispose que d’un semblant de prison : une maison délabrée où les prisonniers peuvent entrer et sortir à loisir. Dans cette pseudo prison, les conditions de détention sont dramatiques. «Dans les caves où sont enfermés des prisonniers, il n’y a pas d’aération. La situation sanitaire est affreuse, et les détenus ne sont pas nourris », dénonce Luis Vaz Martins, président de la Ligue bissau-guinéenne de défense des droits de l’homme.
Et puis, « il y a autre chose », comme le reconnaissent certains magistrats : dans ce pays sans Etat, les cartels disposent de relais jusqu’au sein des ministères, et même dans les cercles présidentiels. Ce qui n’arrange guère les affaires de ceux qui tentent de faire la chasse aux trafiquants sud-américains et à leurs sbires nigériens : il s’agit, entre autres, des policiers, des magistrats et des journalistes.
Par Oumar Diawara « Le Viator »
Le Coq 28/11/2010