Protégeant plus ses intérêts que ceux du Mali et lorgnant les richesses naturelles du Sahel, la France continue de manier habilement la politique du bâton et de la carotte pour intimider Bamako.
A peine l’encre de l’annonce de la suspension de la coopération militaire séchée, voilà la France qui revient à de meilleurs sentiments !
Quelle mouche a pu piquer Paris ?
Surtout que le chef de la Transition malienne, le colonel Assimi Goïta a répondu à cette suspension de coopération militaire par un silence glacial qui a dû pousser le président Macron à revoir ses cartes.
« A l’issue de consultations avec les autorités maliennes de transition et les pays de la région, la France prend acte des engagements des autorités maliennes de transition », endossés par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) et a « décidé la reprise des opérations militaires conjointes ainsi que des missions nationales de conseil, qui étaient suspendues depuis le 3 juin dernier » a signalé Paris dans un communiqué, le vendredi dernier.
Comment cela pouvait-il en être autrement avec les intérêts stratégiques que Paris a au Mali et dans le Sahel en général ?
Quid des gisements aurifères en passant par les exploitations d’hydrocarbures dans le septentrion malien, au Tchad, jusqu’au mines d’uranium du Niger, la France n’est-elle pas attachée aux mamelles nourricières sahéliennes ?
Comment alors la France ne doit-elle pas se résigner à collaborer avec un régime militaire, fût sans « légitimité démocratique » ?
Toute honte bue, la France néocoloniale, dont plus de 5.000 militaires sont déployés au Sahel, est donc obligée de reprendre ses opérations conjointes avec les forces armées maliennes, après avoir suspendu sa coopération bilatérale à la suite du second coup d’Etat au Mali en mai, a annoncé le ministère des Armées.
Ainsi, après le second putsch en neuf mois qui a fait du colonel Assimi Goïta le chef de cet Etat crucial pour la stabilité au Sahel, la France avait déclaré, il y a un mois, suspendre les opérations conjointes avec les forces maliennes, avec lesquelles elle coopère depuis des années contre les jihadistes.
Un groupe de colonels avait poussé à la démission en août 2020 le président malien Ibrahim Boubacar Keïta.
Les putschistes s’étaient ensuite engagés sous la pression internationale à une période de transition limitée à 18 mois et conduite par des civils.
Mais le 24 mai dernier, le colonel Assimi Goïta, jusque-là vice-président de la Transition, a fini par défenestrer le président Bah N’Daw et le Premier ministre Moctar Ouane, avant de se faire proclamer président de la transition par la Cour constitutionnelle.
“La France reste pleinement engagée, avec ses alliés européens et américains, aux côtés des pays sahéliens et des missions internationales”, pour combattre les groupes jihadistes qui sévissent au Sahel, a conclu le Quai d’Orsay.
Alors, que le président Emmanuel Macron avait auparavant annoncé un prochain désengagement progressif de la France du Sahel.
Pour réduire la voilure au Sahel, la France compte beaucoup sur la montée en puissance du groupement de forces spéciales européennes Takuba, créé à l’initiative de Paris pour accompagner les unités maliennes au combat. Ce qui a poussé la ministre française des Armées à…
rabattre ses cartes ! « Aujourd’hui, nous ne voyons pas d’inflexions, de réticences ou de remise en cause liées à la situation » politique au Mali, a assuré Florence Parly, estimant « d’autant plus important que nous consolidions Takuba que nous lui voyions un rôle majeur dans les prochaines années ».
Takuba rassemble aujourd’hui au Mali 600 hommes : la moitié sont des Français, les autres des Estoniens, des Tchèques, des Suédois et des Italiens.
La Roumanie s’est également engagée à y participer.
Une évolution qui intervient quand le Mali tente de diversifier sa coopération militaire en se rapprochant davantage de Moscou. Comme pour dire « Paris ne nous trimballera pas ! ».
Baba Djilla SOW