GAO : Les piques de Macron à l’Algérie et aux dirigeants du Sahel

GAO : Les piques de Macron à l’Algérie et aux dirigeants du Sahel

Si le président de la République semble satisfait des premières déclarations du nouveau chef d’Etat français qui a assuré ne pas laisser tomber le Mali aux mains des terroristes, IBK a certainement ressenti quelques coups portés à nos autorités et à celles de l’Algérie par Emmanuel Macron.

Lors de sa visite vendredi dernier à Gao, le nouveau président de la République française n’a pas fait dans la langue de bois. Si Emmanuel Macron a réaffirmé sa détermination à poursuivre la lutte contre les terroristes jusqu’à leur disparition totale, il n’a pas manqué de dire ses vérités aux différentes protagonistes de la crise malienne.

Aux signataires de l’Accord de paix, il a déclaré ceci : « Mon souhait, c’est que nous accélérions » pour confirmer les propos d’un de ses conseillers qui soutenait que « l’accord de paix souffre de la mauvaise foi » des uns et des autres. Pendant le tête-à-tête avec Macron, IBK aurait dégagé la responsabilité du gouvernement, nous a juré un de ses proches.

C’est à l’Algérie que le successeur de Français Hollande qui a pourtant contenté le grand voisin en déclarant en février dernier que la colonisation est un crime contre l’humanité même s’il avait quelques semaines après recadré ses propos, qu’il a donné le coup le plus dur.

« J’ai eu hier (Ndlr : jeudi) le président algérien Bouteflika au téléphone avant de survoler l’Algérie, par courtoisie, a indiqué M. Macron. Je lui ai fait part de ma détermination sur le sujet et de mon souhait de pouvoir parler de manière très franche ». Le président rappelait ainsi « une exigence renforcée à l’égard des pays du Sahel et de l’Algérie », car assènera-t-il, « on ne peut pas manifester quelque faiblesse que ce soit à l’égard de mouvements terroristes ».

« Je n’enverrai pas nos soldats se faire tuer si tous les gouvernements responsables de la situation localement ne prennent pas l’intégralité de leur responsabilité ». Autant il parle de l’Etat malien qu’à celui de l’Algérie dont l’attitude vis-à-vis du jihadiste malien, Iyad Ag Ghali, qui serait même sur le territoire malien, a été très régulièrement dénoncée par les services de renseignement français.
« En 2014, alors qu’elle avait Iyad Ag-Ghali, chef du mouvement jihadiste malien Ançar Eddine, à portée de fusil, la France a choisi de prendre l’avis d’Alger avant d’agir, plutôt que de le ‘neutraliser’ ou de le capturer vivant. Pas si peu fiers de cette marque de considération, les Algériens envoient à Paris un message aussi clair que l’eau de roche : « Ne vous occupez pas d’Iyad. Nous en faisons notre affaire », avaient révélé l’année dernière nos confrères du Monde.

Avec cette sortie, Emmanuel Macron donne le ton de son quinquennat comme il l’a assuré chez nos confères de Jeune Afrique : « J’agirai en Afrique en toute transparence, loin des réseaux de connivence ». Pourvu qu’il ne recule pas comme ses prédécesseurs.
Nabila

———————————————————
PREMIERE VISITE AU SAHEL : Macron confronté au sous-équipement de l’armée française
En coulisses, la visite du président de la République à Gao a aussi été l’occasion pour les militaires français de lui montrer combien l’armée française était sous-équipée et nécessitait un nouvel effort budgétaire. Manque de drones de surveillance, d’hélicoptères d’attaque et de transport, de blindés légers… Les besoins des forces françaises sont nombreux.

Pour le lui faire comprendre, le chef d’état-major des armées françaises, Pierre de Villiers, a embarqué le président à bord d’un hélicoptère Caïman pour aller survoler la dune rose, la grande attraction touristique de cette région de la boucle du fleuve Niger. Les pilotes ont alors expliqué au chef de l’Etat français que vu la vétusté du matériel, seul un hélicoptère sur quatre était en état de marche.
Le général Pierre de Villiers a également organisé une rencontre entre Emmanuel Macron et un soldat dont le blindé avait sauté sur une mine. Si son blindé n’avait pas été un véhicule de la dernière génération, il serait mort à l’intérieur. Cette rencontre est celle qui a le plus impressionné le président français à Gao.
L’opération ne « peut pas s’étendre plus car, compte tenu des distances, elle ne deviendrait plus qu’une opération de logistique », précise le général Xavier de Woillemont, commandant de Barkhane. « Les hélicoptères conditionnent toute la force », précise l’état-major, parce qu’ils permettent la réaction rapide en cas d’incident contre les forces maliennes et des raids simultanés des forces spéciales françaises en plusieurs points de la zone d’activité des groupes armés. Dans ce domaine, les renforts de l’Allemagne, vantés par Paris, restent limités : les hélicoptères ne peuvent résister aux températures extrêmes de Gao, a révélé la presse allemande.

SITUATION DE KIDAL : Emmanuel Macron maintient le flou

Lors de sa visite, vendredi dernier le nouveau président français a maintenu le flou sur la situation à Kidal, brisant ainsi l’espoir de ceux qui avaient cru qu’il allait définitivement trancher la question.

Comme on pouvait s’y attendre, la question Kidal est revenue dans les débats lors de la visite-éclair que le président nouvellement élu de la France a effectuée vendredi dernier dans notre pays.
Emmanuel Macron qui, jusqu’ici, était censé rompre avec les mauvaises pratiques d’antan, n’a pas tranché la question de Kidal.
Pour l’histoire après la libération des deux régions du Nord (Tombouctou et Gao) des mains des terroristes en 2013, l’armée française, à travers l’opération Serval, avait stoppé net l’avancée de l’armée malienne vers Kidal, alors occupé par les rebelles du Mouvement national de libération de l’Azawad. Depuis lors cette région échappe à tout contrôle des autorités.
La visite du nouveau président français le vendredi dernier à Gao était donc l’occasion rêvée pour remettre la question sur la table et sur la question. La réponse du jeune président n’a pas comblé les attentes.
En effet, le président français dans une longue phrase avec un brin de langue de bois a terminé ses explications sans convaincre ses interlocuteurs. « La France aujourd’hui, et depuis des mois et des années, travaille pour justement restaurer la souveraineté dans la province de Kidal pour que tout soit rétabli et depuis le début avec une grande détermination, je veux être clair ici avec les rumeurs et les bruits qui courent sur ce sujet : la France et la Minusma travaillent dans ce sens, en ce qui concerne le Mali la France continuera l’engagement militaire qui est le sien, qui permet à la fois la sécurisation et le retour à la souveraineté pleine et entière et l’éradication du terrorisme islamique, la première réponse que nous devons apporter à la situation du Mali : c’est précisément l’application de l’intégralité de l’accord d’Alger… » Qu’est-ce qu’il faut comprendre dans ce discours du président français ? Rien, si ce n’est qu’il n’avait pas de réponse à la question posée.

Cette réponse maintient à coup sûr le flou sur la situation de Kidal et fait vite déchanter ceux qui avaient vu en l’élection d’Emmanuel Macron la fin des anciennes pratiques entre la France et ses ancienne colonies
Issa Kaba, envoyé spécial de Renouveau TV à Gao