En effet, des communautés paysannes rencontrées au cours d’une récente visite de terrain dans les champs, dans la région de Mopti, nous ont signalé les impacts négatifs des aléas climatiques sur leurs cultures. La Tabaski s’annonce donc dans un contexte économique de défis. La marche, la semaine dernière, des partants volontaires à la retraite ne fait que refléter les défis multiformes que traverse notre pays. Par ailleurs, il faut signaler que ce sont des Musulmans qui sont montés au créneau dimanche 30 octobre au Centre international de conférence de Bamako, pour dire que l’heure est grave.
Au cours de ce débat animé par des leaders religieux, le conférencier Thierno Hady Thiam avait notamment indiqué que les Musulmans vont ‘’ désormais rester debout, faire de la politique et apporter le changement. ‘’ La classe politique va-t-elle accepter l’irruption de ces nouveaux acteurs dans son secteur? A propos de l’arrivée des Libyens dans notre pays, le conférencier avait aussi indiqué qu’un grand danger nous guette, car le Mali n’est plus à l’abri de ce qui est arrivé en Libye. Les velléités de rébellion exprimées au Nord du pays ont fait ressurgir beaucoup d’appréhensions et de craintes. Mardi dernier, une militante de la société civile nous a fait cette réflexion : ‘’ Pourquoi des Touarègues quittent-ils la Libye avec des armes et s’installent à Gao, Kidal et Tombouctou sans que personne ne bronche, pourquoi le silence d’ATT ? ‘’ L’universitaire Attaye Ag Mohamed nous avait aussi fait part de ses inquiétudes : ‘’ je ne vois pas ce qui rassure dans les médias en ligne, les autorités doivent communiquer et rassurer les populations, car, il y a toujours une solution à un problème. ‘’ Il faut ajouter que la zone est déjà sous l’emprise de plusieurs menaces. Le consultant Ousmane Touré déclarait lors d’un atelier : ‘’ Les régions Nord du Mali (Gao, Tombouctou et Kidal) restent caractérisées par une situation d’insécurité chronique se traduisant par un banditisme armé, des conflits armés intra et inter communautaires, des prises d’otages, des attitudes de méfiance entre communautés. ‘’ En somme, cette atmosphère délétère impacte inévitablement sur les élections générales de 2012 dont l’organisation est aujourd’hui sujette à caution.
Une bonne frange de la classe politique et de la société civile a dénoncé l’absence de fiabilité du fichier électoral et décrié les réformes constitutionnelles jugées inopportunes. A l’occasion d’une conférence de presse, le 24 août dernier, à la Bourse du travail, Adama Diakité, président du Forum des organisations de la société civile, avait demandé à tous ceux qui étaient au présidium de se regrouper pour combattre la révision constitutionnelle. Il avait lu la déclaration de la coordination Touche pas à ma constitution qui indique que les réformes consistent en une remise en cause des acquis du 26 mars 1991, en ce qu’elles introduisent l’inégalité entre les citoyens, l’exclusion des binationaux de la candidature à la présidentielle, le renforcement excessif des pouvoirs du président de la République, induisent un accroissement exponentiel et injustifié des dépenses publiques, allègent dangereusement la procédure de réforme constitutionnelle, laquelle pourrait se faire désormais au niveau du parlement, excepté celles touchant à la limitation et à la durée du mandat du président de la République.
Le 30 juin dernier, au Cicb, des experts du comité désigné pour le choix du fichier électoral avaient fait état de l’aveu de carence de l’administration, concernant la mise en œuvre du fichier sur la base du recensement administratif à vocation d’état-civil qui, pourtant, avait obtenu l’adhésion de l’écrasante majorité de la classe politique. Mahamadou Sissoko de l’Urd avait tenu à être très précis : ‘’ les experts, avait-il dit, ont trouvé un consensus, mais les partis politiques ne sont pas convaincus de l’efficacité de cette mesure. ‘’ En effet, un groupe de 43 partis politiques devenus aujourd’hui le Gps-2012 avaient fait des propositions au gouvernement pour améliorer le fichier. Le Gps attend toujours la réponse idoine des autorités à ses propositions.
De ce fait, plusieurs observateurs de la scène politique malienne ont déduit de ce climat d’insécurité générale l’impossibilité de tenir les élections générales dans des conditions d’apaisement, de transparence et de fiabilité requises. La neuvième semaine nationale de la sécurité routière qui s’étendait du 10 au 16 octobre 2011 a été l’occasion de faire des constats alarmants. En effet, selon le rapport du Centre hospitalier universitaire Gabriel Touré, en 2011, il y a eu 4986 accidentés contre 3788 l’année dernière. Selon les mêmes statistiques, sur 12.000 consultations annuelles, 30% sont des traumatismes crâniens. A propos de l’éducation, la rentrée des classes, cette année s’est faite sous fond de crise, en l’occurrence, celle des enseignants affiliés au Syndicat national de l’éducation de base (Syneb).
Lors d’une conférence de presse, les syndicalistes avaient déclaré qu’ils avaient démarré l’année par une grève, à cause de la non satisfaction de certaines de leurs doléances, dont l’intégration de tous les enseignants de la fonction publique des collectivités à la fonction publique de l’Etat. Aujourd’hui, des populations s’interrogent sur ce qu’ils considèrent comme la passivité de l’Etat qui devrait beaucoup plus s’investir pour régler les problèmes, de manière globale et durable, au lieu d’agir au cas par cas.
C’est vrai que le régime ATT a beaucoup investi dans les infrastructures (routes et logements sociaux) mais, dans l’ensemble, le pays demeure toujours dans la précarité ambiante, comme s’il fallait rester dans un perpétuel recommencement. Au cours de nos différentes enquêtes, l’absence de communication, notamment avec la société civile et les différentes communautés, a été régulièrement fustigée. En outre, la présence des forces de sécurité maliennes au Nord a été sollicitée par plusieurs ressortissants du septentrion qui dénoncent l’absence d’autorité de l’Etat. La crainte de la présence de forces étrangères a été, aussi, exprimée. En fait, malgré les multiples projets et programmes qui y ont été initiés, la précarité des régions du Nord tarde toujours à trouver des réponses économiques pérennes.
Baba Dembél
Le Républicain 04/11/2011