Fin de mandat : Le tumulte des grands dossiers politiques


Si Att est parvenu à  faire adopter son projet de loi portant révision de la constitution par les députés à l’Assemblée nationale sans coup férir, avec l’adhésion de 141 députés et seulement 3 oppositions, le plus difficile reste à faire. Comment organiser dans un délai très court un référendum  et des élections présidentielles et législatives libres et crédibles ? Cette inquiétude des Maliens a été portée sur la place publique par le rapport de la Commission des lois de l’Assemblée nationale sur le projet de loi portant révision de la constitution.

 

« La plupart des personnes ressources écoutées, représentants de la classe politique, de la société civile, personnalités politiques, civiles et scientifiques, estiment que si le projet de loi portant révision de la constitution paraît pour l’essentiel, de nature à renforcer et consolider le processus démocratique, il ne faudrait pas que l’organisation du référendum destiné à l’approuver, perturbe l’organisation des élections générales de 2012. Tous estiment que le principal défi du moment est la bonne organisation d’élections libres, crédibles et transparentes », a clairement indiqué le rapport.

Avant de recommander au gouvernement que « le référendum soit organisé après la période légale de révision des listes électorales, sur la base d’un fichier consensuel avec des listes électorales fiables, corrigées et mises à jour ». Le ministre Daba Diawara, devant les élus de la nation, a donné des assurances. Malgré tout,  nombreux sont les Maliens qui doutent fort de la capacité du  gouvernement malien à organiser un référendum et tenir l’organisation des élections crédibles dans les délais constitutionnels. « Un gouvernement qui a été incapable, en cinq ans,  de doter le pays d’un fichier électoral digne de ce nom, veut nous convaincre de sa capacité d’organiser un référendum et de tenir les élections dans les délais, souffrez que nous doutions », a indiqué un tenor de la scène politique malienne.

Quel fichier pour quel référendum ?

Donc, avec  l’adoption du projet de loi portant révision de la constitution par l’Assemblée nationale, la problématique de l’organisation du référendum  et des élections présidentielle et législatives crédibles dans le délai constitutionnel, se pose avec beaucoup d’acuité. En effet, en  absence d’un ficher électoral digne de nom, l’on est en droit de s’interroger sur la qualité du  fichier qui servira de base à l’organisation du référendum.

Le Gouvernement ne va quand même pas demander aux Maliens d’aller au vote référendaire sur la base de l’ancien fichier Race, contesté par tous. Du moment que rien ne nous indique que le fichier consensuel,  à défaut d’un fichier biométrique qui sortirait du Ravec, ne verra le jour d’ici la fin octobre,  voire novembre ou décembre 2012. Et  le référendum risque de se tenir à trois ou quatre petits mois avant l’élection présidentielle. Et, comme dans notre pays, le plus souvent les moyens font défaut, l’on  peut se demander  où l’Etat va-t-il trouver les 48 milliards de Fcfa jugés nécessaires, en si peu de temps, pour financer tout le processus. Au moment, où ces questions perturbent le sommeil de millions de Maliens, le gouvernement se montre incapable d’arbitrer entre les partis politiques de la majorité et ceux de l’opposition qui n’arrivent pas à s’entendre sur la répartition des dix postes de la Ceni qui reviennent aux formations politiques.

Au lieu de chercher une solution claire et acceptable pour tous à un problème qui ne devait jamais exister,  le Gouvernement,  dans sa politique de l’autruche, à la surprise générale de tous,  louvoie en allant  sortir une seconde liste de partis politiques  prébendiers  qui se réclameraient subitement de l’opposition.  Mais dans quel intérêt, Att a-t-il attendu la fin de son mandat pour mettre sur la table des chantiers politiques aussi importants pour la stabilité du pays ? Et, si tout cela participait d’une stratégie ? Dans tous les cas, il n’est pas à exclure  que le président Att puisse avoir une préférence parmi les éventuels candidats à sa succession. Sur un tout autre plan, par rapport au code des personnes et de la famille, l’exécutif  initiateur du projet de loi adopte aujourd’hui un profil très bas.

À la suite de la contestation musclée  des  associations et organisations musulmanes du pays, le président Att a été obligé de renvoyer le texte à une seconde lecture. Même si, aujourd’hui, l’on peut saluer des avancées notables en termes de consensus entre les députés et les responsables des organisations musulmanes du pays, sur le Code des personnes et de la famille,  rien ne garantit que le texte sera adopté avant le départ du président Att du pouvoir. Quid de la loi portant suppression de la peine de mort ?

Assane Koné

Le Républicain 04/08/2011