A quelques encablures de la grande marche de protestation que l’opposition organise le 21 mai, le Parena annonce les couleurs à travers une déclaration signée de son Vice-président Me Amidou Diabaté.
Le Parena se soucie de la situation générale du Mali qui « reste très préoccupante, douze mois après la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale ».
L’État a toujours du mal à exercer sa souveraineté sur de nombreuses contrées.
La région de Kidal échappe toujours au contrôle de l’État. Il n’y a plus d’État à 10 kms de Tombouctou.
Plusieurs cercles de la région de Mopti, il n’y a pas d’administration, pas d’école, pas de centres de santé fonctionnels.
Pour le Parena, la recrudescence des activités des groupes djihadistes et l’immobilisme de l’État central ont créé une insécurité et une instabilité qui assombrissent chaque jour l’horizon du pays. «
La situation dans laquelle se trouve notre Nation aurait dû commander une gouvernance vertueuse. Hélas !! », désespère le parti du bélier blanc, qui décèle de nouveaux scandales de détournement de deniers publics au sujet du programme gouvernemental de fibres optiques, de Nouvelles surfacturations au détriment des FAMAS, le filet social mué en caisse noire du Ministre, les milliards destinés au Nord.
Lire la déclaration :
Déclaration du COMITé DIRECTEUR DU Parena
DILAPIDATION DES RESSOURCES PUBLIQUES :
AN B’A DUN PIYAN, FOYI TÈ BO A LA!
I. Introduction
Douze mois après la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale, la situation générale du Mali reste très préoccupante.
L’État a toujours du mal à exercer sa souveraineté sur de nombreuses contrées. La région de Kidal échappe toujours au contrôle de l’État.
Tous ceux qui voyagent en sixième région savent qu’à 10 kms de Tombouctou, il n’y a plus d’État.
Plusieurs cercles de la région de Mopti sont déstabilisés:
– pas d’administration,
– pas d’école,
– pas de centres de santé fonctionnels.
Les violences meurtrières survenues dans le Kareri (cercle de Tenenkou) dans la seconde moitié d’avril ont accru les inquiétudes relatives à la cohésion nationale.
La recrudescence des activités des groupes djihadistes et l’immobilisme de l’État central ont créé une insécurité et une instabilité qui assombrissent chaque jour l’horizon du pays. Chaque semaine, le sang coule au Mali, chaque semaine, des familles sont endeuillées au nord, au sud, à l’est, à l’ouest ou au centre.
La situation dans laquelle se trouve notre Nation aurait dû commander une gouvernance vertueuse.
Hélas !!
En dépit de ce sombre tableau, les affaires défraient la chronique, en toute impunité.
II. Succession ininterrompue de scandales:
1. Le programme gouvernemental de fibres optiques
Le conseil des ministres du 14 octobre 2015, tenu sous la présidence du Chef de l’État, a approuvé un marché relatif au Réseau national de large bande du Mali. Conclu entre le Gouvernement de la République du Mali et la Société chinoise HUAWEI TECHNOLOGIES CO, LTD, ce marché d’un montant de 35 milliards 213 millions 172 mille 169 francs CFA est financé sur un prêt de China Eximbank.
Négocié quelques mois auparavant, ce prêt avait été approuvé par le gouvernement, lors du conseil des ministres du 11 juin 2014 présidé par le Premier ministre Moussa Mara.
Dans le « cadre du Plan stratégique national des technologies de l’information », ce prêt chinois devrait financer la construction de 1300 kilomètres de fibre optique allant de Kourémalé (frontière guinéenne) à Tombouctou en passant par Bamako, Ségou, Niono, Léré et Goudam.
Quoi de plus normal qu’un pays aussi enclavé comme le Mali cherche à se connecter au réseau mondial de transport de données avec une qualité optimale de service (Internet à très haut débit)?
Mais … car il y a un mais …
Déjà en 2011, la même China Eximbank avait accordé un prêt de 20 milliards 169 millions de francs CFA au gouvernement du Mali. Ce prêt a été ratifié le 11 juillet 2011 par l’Assemblée Nationale. Le conseil des ministres du 3 août 2011 avait attribué le marché d’installation de 930 kilomètres de fibres optiques à …HUAWEI.
Le 21 novembre 2011, le ministre de l’économie numérique, Modibo Touré, a lancé les travaux de pose du réseau de fibre optique devant relier Gao à Labezzanga (frontière du Niger) en passant par Ansongo, et Gao à Tinzawaten (frontière avec l’Algérie) en passant par Kidal.
Entre 2011 et 2015, ce sont 55 milliards 382 millions qui ont été prêtés au Mali par la banque chinoise d’import-export et qui seront remboursés par le contribuable malien.
En outre, le coût du kilomètre de fibre optique au Mali bat tous les records connus en Afrique et dans le monde: avec 35 milliards pour installer 1300 kms de fibre, le kilomètre revient à 27 millions de FCFA.
Pour quel usage?
Sotelma/Malitel et Orange-Mali ont installé, chacune de son côté, plusieurs milliers de kilomètres de fibres à leurs frais.
Le programme gouvernemental d’installation de fibres optiques, s’il est conduit à terme, est une duplication des parcours déjà réalisés par les opérateurs de télécommunication
Tous les spécialistes le reconnaissent, le programme gouvernemental de fibres optiques a été bâclé. Ce sont des milliards, voire des dizaines de milliards qui se sont « évaporés » et qui continueront de s’évaporer si le projet n’est pas repris en mains pour être rééquilibré et moralisé.
Quelle est la pertinence d’un tel programme? Pourquoi le gouvernement endette nos enfants à hauteur 55 milliards pour « réaliser » ce qui existe déjà dans une large mesure ?
Au regard de l’important potentiel économique du secteur, la Banque Mondiale s’était, dans le temps, intéressée au programme gouvernemental de fibres optiques. Elle s’est retirée en 2015 à cause des pics-macs et de l’opacité qui y règnent.
Le PARENA invite le gouvernement à dire au peuple pourquoi la Banque Mondiale s’est retirée de l’accompagnement du programme de fibres optiques au Mali alors qu’elle continue d’appuyer ce secteur chez plusieurs de nos voisins.
En vérité, pour beaucoup, le service public de fibres optiques au Mali n’a d’autre objet que d’ouvrir un marché pour enrichir des fonctionnaires et des hommes politiques.
Il est urgent de regarder de près ce programme, en conduisant un audit impartial afin de déceler les détournements et les immenses pots de vin versés à divers échelons administratifs et politiques.
2- Nouvelles surfacturations au détriment des FAMAS : Combien coûte une pick-up sur la route de Koulouba?
Plusieurs valeureux officiers et soldats sont tombés sur le champ d’honneur, victimes d’attentats terroristes : le chef de bataillon Karim Niang le 05 février 2016 à Tombouctou, le colonel Salif Baba Daou, le 11 mai 2016 à Ebanguimalane, le chirurgien-commandant Mamadou S. Camara à Gao, le 14 mai 2016
Dans tout autre pays, le sacrifice ultime consenti par les jeunes maliens sur les théâtres d’opération aurait mis un bémol au pillage des ressources destinées à la défense et à la sécurité du peuple martyr. Pas au Mali !
Jugez-en !
Le 16 avril dernier, plusieurs ministres se retrouvent au Génie Militaire pour la remise de 42 pick-up au MOC (mécanisme opérationnel de coordination), un des instruments de l’Accord d’Alger.
La presse publique et privée couvre l’événement. Le coût des 42 pick-up? Deux milliards 300 millions de francs CFA! Soit 54 millions 761.904 F CFA! Quel est le prix moyen d’une pick-up sur le marché? 10, 12, 14 millions ! Ne sommes-nous pas devant une surfacturation de 300 à 400%?
En janvier 2016, le gouvernement a remis aux forces de sécurité 30 pick-up. Coût de l’opération: 800 millions de francs soit 26 millions 600 mille francs l’unité!
Avec de telles pratiques, comment peut-on préparer les FAMAS à combattre l’hydre terroriste?
Un audit urgent de la gestion des crédits alloués à la défense et à la sécurité dans le cadre de la loi de programmation militaire s’impose.
3-Le filet social: la caisse noire du Ministre
Au lendemain de la dévaluation du franc CFA (en 1994), le gouvernement d’alors avait mis en place un « filet social » pour soutenir les couches les plus vulnérables de la société malienne.
Un service public, l’Agence pour le Développement Social (ADS), devenue Fonds de Solidarité Nationale (FSN), a été mis en place pour gérer le « filet social ».
Avec la nomination en 2013 de M. Hamadoun Konaté comme ministre chargé de la Solidarité, celui-ci en fera sa vache laitière. C’est le ministre et ses collaborateurs directs qui gèrent des milliards destinés aux pauvres.
En 2014, 2015 et 2016 la dotation budgétaire annuelle au titre du filet social a été de dix (10) milliards cinq cent millions (10 500 000 000) FCFA. De cette enveloppe, chaque année, quatre (4) milliards de francs (4 000 000 000F) CFA sont mis à la disposition du ministre que celui-ci gère directement comme sa caisse noire: à la tête du client !
Rien d’étonnant que ce ministre soit d’une générosité proverbiale : quand il voyage avec d’autres ministres, c’est lui qui paie leurs factures d’hôtel et de restaurant et leur donne « l’argent de poche » en sus, malgré leurs frais de mission !
Plusieurs ministres et hauts cadres de l’État ont bénéficié des largesses du ministre de la Solidarité.
4- La vente avortée de la Place du cinquantenaire et les opérations immobilières fumeuses
Grâce à la vigilance des forces démocratiques au Mali et dans la diaspora, le plan concocté pour céder la Place du cinquantenaire à des hommes d’affaires douteux proches des cercles du pouvoir a été mis en échec.
Entrepris, les ministres des affaires foncières et de l’administration du territoire avaient conjointement signé un ordre aux fins de satisfaire l’appétit glouton des «golden boys» du régime qui, avec leurs associés véreux, voulaient ériger un hôtel et un centre commercial sur la Place destinée aux cinquante ans du Mali indépendant.
Si ce plan a échoué, de scandaleuses opérations immobilières sont en cours dans plusieurs communes de Bamako et dans des capitales de pays voisins.
Ainsi, un ministre s’est fait attribuer près d’un hectare dans l’emprise du fleuve à la cité du Niger.
Un autre poursuit tranquillement ses acquisitions immobilières tous azimuts.
5- Les milliards destinés au Nord
Lors de la dernière session du comité de suivi de l’Accord d’Alger, plusieurs participants ont posé des questions sur la transparence et la traçabilité des milliards dépensés au titre du Nord.
Tout le gouvernement est fortement interpellé sur cette question. Il y va de la crédibilité du processus de paix.
III. Conclusion
L’étendue et l’ampleur de la mauvaise gestion prend des proportions inquiétantes. Le Mali en crise est devenu le royaume de l’impunité. Ceux qui sont au pouvoir se permettent tout. Sans aucune conséquence.
Le PARENA invite le président de la République et le gouvernement à se ressaisir.
Il apparaît indispensable d’ordonner un audit impartial sur :
1. Le programme gouvernemental de fibres optiques : où sont partis les milliards des premières phases ? Pourquoi continuer à dupliquer les tracés déjà réalisés par la SOTELMA et par ORANGE? A quelles fins ?
2. La gestion du filet social.
3. La gestion des crédits affectés aux forces armées et de sécurité dans le cadre de la Loi d’orientation et de programmation militaire.
4. La gestion des fonds destinés au Nord.
5. La gestion de l’Institut national de prévoyance sociale.
D’ores et déjà, le PARENA invite le Bureau du Vérificateur Général à enquêter sur la dilapidation à ciel ouvert de l’argent public.
Bamako, le 17 mai 2016
Pour le Comité Directeur
Le Président/PO
Le premier vice-président
Me Amidou Diabaté
Source:Le Republicain 19/05/2016.