Il faut réduire les pouvoirs de nomination du président pour le bien de la démocratie
Après l’arrêt de la Cour constitutionnelle l’excellent avocat Me Alassane Diop sous la forme d’une «réponse de candide à mon excellent confrère Me Cheick Oumar Konaré». Nous vous invitions à découvrir ses propositions pertinentes à notre avis !
Je ne suis pas du même avis que vous cher confrère.
Bien que je ne sois pas un constitutionnaliste, la question me semble-t- il, n’est pas tant la réduction des pouvoirs de la Cour constitutionnelle qui sont au demeurant absolument pareils dans la quasi totalité des États modernes de tradition francophone, qu’une question de choix et de mode de désignation de ses membres, leur qualité intrinsèque faisant référence à la compétence avérée en droit constitutionnel et le comment de la désignation comme membre de la Cour.
Faut-il désormais les élire tout simplement par la communauté des magistrats, professeurs d’université, professions libérales et élus politiques de la nation, en un mot la société civile ? Ou doivent-ils au contraire être nommés par tirage au sort tout simplement ? Ou encore faut-il permettre au président de la République, la seule institution du pays, la faculté de nommer un ou deux membres de la cour, tout le reste étant désigné par la société civile désormais comptable de ses choix devant la nation ?
Dans le meilleur des cas, aucun membre d’une Cour comme celle-ci dont les décisions sont, par définition sans recours, ne doit être nommé par une institution de la République, de surcroît par le président de la République et celui de l’Assemblée nationale. Tout le travers inattendu viendrait pourtant de là.
Il faut amputer ces institutions de la république de ces pouvoirs de sujétion. Ce devoir atavique de reconnaissance envers le nominateur-bienfaiteur ou tout simplement le pacte secret de fidélité au détriment de l’intérêt public.
Certains pays parviennent à faire hisser des hommes ou femmes d’honneur dans cette Cour et qui restent fidèles à la République et à leur serment. Le Niger par exemple doit l’ancrage de sa république à sa Cour constitutionnelle qui a eu à invalider une élection présidentielle et faire échec à une modification constitutionnelle jugée non consolidante (3e mandat).
Au Mali la Cour constitutionnelle, sous feu Salif Kanouté, s’est plutôt bien comportée et n’a jamais été autant décriée parce qu’elle était constituée par de vrais publicistes rompus à la matière.
Loin de moi toute idée de dévaloriser les membres de cette Cour. Mais, je pars d’un simple constat empirique pour affirmer que notre Cour constitutionnelle gagnerait à être présidée par un juriste publiciste reconnu faisant l’unanimité de la communauté intellectuelle du Mali.
La «Cour Manassaenne» est constituée en majorité par de magistrats privatistes chevronnés qui ne sont pas pour autant des doctrinaires du droit constitutionnel. La présidente elle-même n’en est pas une. C’est une insuffisance à combler par rapport à la sous-région.
Réduire les pouvoirs de la Cour constitutionnelle me semble impossible voire dangereux. Cette réduction va aboutir à quoi ou conduire à quel résultat :
-par la création d’une juridiction d’appel ?
-réduire les pouvoirs par-ci et les redistribuer par-là ?
Pour ma part, il faut au contraire se battre pour obtenir tout simplement la modification des modes de désignation des membres de notre Cour constitutionnelle et prier pour que les élus ou les nommés soient à la hauteur du service attendu.
Me Alassane Diop
P.S : La titraille est de la rédaction