Avec les contestations tous azimut des ces derniers jours, le Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga fait certainement face au plus grand cauchemar de sa vie politique. Mais, il n’est pas lâché par son employeur. Et les jours prochains doivent être déterminants sur son maintien ou non à la Primature.
La température est à son maximum au Mali, au propre comme au figuré, en ce mois d’avril réputé pour sa canicule sous nos tropiques. La canicule politico-religieuse qui s’y ajoute cette année risquerait fort d’exploser le thermomètre si rien n’est fait pour conjurer la situation.
Le Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga fait face actuellement à une contestation sans précèdent dans sa vie politique. Fusible du président de la République, le Premier ministre devait répondre au mécontentement populaire exacerbé par les tueries de Dioura et d’Ogassagou. Sans compter la crise scolaire et la conjoncture socioéconomique qui frappe la grande majorité des ménages du pays.
Si ses détracteurs politiques lui reprochent son intransigeance ou le débauchage d’une vingtaine de députés du parti au pouvoir (RPM), certains leaders religieux à l’image de Mahmoud Dicko ou le chérif de Nioro l’accusent de vouloir répandre des valeurs occidentales au Mali (homosexualité) et de vouloir diviser les religieux.
Le chérif Bouyé Haïdara de Nioro du Sahel s’était ouvertement opposé à la nomination du Premier ministre sans avancer aucune raison valable comme s’il avait un droit constitutionnel de contester la nomination d’un responsable de ce rang.
La tuerie d’Ogassagou a alors été l’étincelle de trop qui a mis le feu aux poudres des leaders religieux qui réclament maintenant avec insistance la tête du Premier ministre. A défaut, ils menacent de balayer tout le régime en faisant descendre leurs fidèles et d’autres frustrés de la République dans la rue. Et la démonstration faite par Mahmoud Dicko et ses alliés (opposants et leaders religieux) le 5 avril 2019 a été assez édifiante pour prouver ses capacités de nuisance au pouvoir.
Si la rencontre du président de la République avec les leaders religieux du lundi 8 avril dernier est organisée pour faire redescendre le mercure, elle n’a pas pour autant rassurée les Maliens. Dans tous les cas, rien de consistant n’a filtré de la rencontre à part des messages de paix diffusés à la télévision nationale. Un exercice dont on est coutumier au Mali.
Y a-t-il eu un tête-à-tête entre le président IBK et l’imam Mahmoud Dicko, meneur par excellence de la contestation contre le régime ? Ont-ils parlé de la démission du puissant Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga ? Ce sont autant de questions que leurs compatriotes se posent aujourd’hui. Mais, bien malin qui saura y répondre.
IBK dans un dilemme cornélien
Avec cette rencontre, qui ressemble à une recherche d’apaisement plus qu’à une recherche de solution définitive aux problèmes posés, le régime risquerait de filer du mauvais coton.
Aujourd’hui, IBK se trouve dans un dilemme cornélien : refuser de démettre son Premier ministre et faire face à la contestation de l’hydre ou démettre son chef du gouvernement et donner à jamais un pouvoir pernicieux aux leaders religieux ! Seul le bon sens peut aider le président de la République à trouver une solution à une situation qui, visiblement, le dépasse.
Et, la motion de censure annoncée contre le Premier ministre à l’Assemblée nationale semble aussi ne pas être d’un mauvais goût pour le président qui aurait brandi la dissolution du méli-mélo politique. En plus de cette situation, l’épée de Damoclès des religieux, les revendications corporatistes, les grèves illimitées dans presque tous les secteurs, dont la plus pernicieuse est celle des enseignants, risqueraient fort d’affaiblir le régime déjà éprouvé par la sécurisation du pays.
D’où la nécessité pour IBK d’assumer ses prérogatives de Chef de l’Etat en allant dans le sens de l’intérêt national. Il faut aujourd’hui des décisions pertinentes et courageuses pour calmer le peuple en restaurant la confiance entre le sommet et la base ! Et il ne s’agit plus de sacrifier des boucs émissaires. Mais, d’aller réellement dans le sens des aspirations exprimée par les Maliens !
Hachi Cissé