Les deux principaux candidats à la présidentielle au Zimbabwe, le chef de l’Etat Emmerson Mnangagwa et l’opposant Nelson Chamisa, se sont dits confiants mardi dans leur victoire aux élections générales, les premières depuis la chute de Robert Mugabe après près de quatre décennies au pouvoir.
Les résultats officiels des élections présidentielle, législatives et municipales, qui se jouent essentiellement entre la Zanu-PF, le parti aux commandes depuis 1980, et le Mouvement pour le changement démocratique (MDC), n’ont pas encore été annoncés.
Mais M. Chamisa, le jeune patron du MDC, a revendiqué dès mardi matin une « victoire éclatante ».
« Nous avons fait remarquablement bien » contre Emmerson Mnangagwa et la Zanu-PF, a-t-il affirmé, en se basant sur un décompte des voix portant sur « la majorité des plus de 10.000 bureaux de vote » du pays.
« Nous sommes prêts à former le prochain gouvernement », a-t-il lancé sur son compte Twitter.
Rapidement, M. Mnangagwa, patron de la Zanu-PF et ancien bras droit de M. Mugabe, lui a répondu en sous-entendant qu’il menait la course.
« Les informations obtenues par mes représentants sur le terrain sont extrêmement positives », a-t-il assuré. « En train d’attendre patiemment les résultats, conformément à la Constitution », a-t-il ajouté sur son compte Twitter, se disant « enchanté par le taux de participation élevé ».
– « Aucune fraude » –
Les Zimbabwéens se sont rendus en nombre lundi aux urnes pour ces élections historiques.
Selon la commission électorale, le taux de participation se situait aux alentours de 75% une heure avant la clôture des bureaux de vote lundi.
M. Mnangagwa, qui a succédé en novembre à M. Mugabe à la suite d’un coup de force de l’armée et de son parti, cherche à obtenir par les urnes la légitimité du pouvoir.
Avant les élections, il était donné favori de la présidentielle, même si l’écart avec son principal adversaire s’était récemment réduit, selon un sondage publié il y a une dizaine de jours.
Si aucun candidat n’obtient la majorité absolue des suffrages au premier tour, un second tour sera organisé le 8 septembre.
La commission électorale du Zimbabwe, très critiquée par l’opposition pendant tout le processus électoral, a affirmé mardi que les élections n’avaient été entachées d' »aucune fraude ».
« Nous voudrions montrer au peuple zimbabwéen que nous, à la commission électorale du Zimbabwe (ZEC), ne volerons pas le choix » des électeurs, a assuré sa présidente Priscilla Chigumba. « Quelque soient nos résultats, ils refléteront exactement » ce que le peuple « a décidé », a-t-elle encore dit.
Le président Mnangagwa, soucieux de se démarquer de son ancien mentor Robert Mugabe, avait promis des élections « libres et justes », alors que les scrutins des deux dernières décennies ont été entachés de violences et de fraudes.
– « Avides de changement » –
Pour preuve de sa bonne volonté, il avait invité, pour la première fois en seize ans, des observateurs occidentaux à surveiller le processus électoral.
En campagne, M. Mnangagwa, ancien vice-président et ministre de M. Mugabe, a promis un « nouveau Zimbabwe » et la relance de l’économie, au bord de la faillite.
Devant les banques, les longues files de clients en quête d’un peu de liquide sont quotidiennes depuis des années. Les diplômés viennent chaque jour grossir les rangs des sans emploi, alors que le taux de chômage avoisine les 90%.
M. Chamisa, âgé de 40 ans et sans grande expérience politique, a lui fait de son âge son arme principale pour détrôner le parti au pouvoir depuis l’indépendance en 1980.
Pendant la campagne, cet orateur au style vestimentaire toujours impeccable a naturellement su séduire un électorat jeune, en quête de sang neuf.
Dans les rues d’Harare, des habitants s’inquiétaient mardi des réactions du parti au pouvoir en cas de défaite.
« Il est exclu que la Zanu-PF accepte » la victoire du MDC, a estimé Tracy Kubara, une commerçante de 26 ans. « On sait que des gens vont être battus en particulier dans les campagnes, comme ça fut le cas dans le passé », a-t-elle prévenu.
« Le MDC n’acceptera » pas si il perd, a-t-elle toutefois ajouté à l’AFP, prédisant que « les gens descendront à coup sûr dans la rue parce qu’ils sont avides de changement ».
Depuis son indépendance, le Zimbabwe n’a connu que deux chefs de l’Etat, tous les deux issus du même parti, la Zanu-PF. D’abord M. Mugabe, contraint à la démission en novembre à l’âge de 93 ans, puis M. Mnangagwa, qui a pris sa revanche après avoir été limogé quelques semaines plus tôt de son poste de vice-président.
(©AFP / 31 juillet 2018 12h18)