Dans l’autre, c’est le moindre mal. L’enlisement nuira, en effet, à l’unité d’une Libye qui risque de se replier sur les lignes promues par Khadafi lui-même. Et la partition de ce pays immense compliquerait l’enjeu sécuritaire d’un espace sahélo-saharien dont la turbulence est une manne inespérée pour les nébuleuses terroristes, celles qui existent comme celles que la chienlit prolongée pourrait faire naître. On aurait voulu souhaiter une telle diligence sur la Côte d’Ivoire meurtrie, effrayée, terrée chez elle ou jetée sur les routes de l’exode, déchirée entre une légitimité qui n’a pas les moyens de se faire justice et une stratégie du fait accompli qui attise, de son côté, le conflit.
Trois mois de crise, plusieurs centaines de blessées, plus de trois cent morts, viols et violences en série, couvre-feux et bruits quasi permanents de canon, le paradis d’hier devenu un vrai enfer, un pays qui fout le camp, des voisins qui croisent les doigts et qui savent qu’ils seront tôt ou tard infectés à leur tour: il est devenu urgent et très urgent d’agir et d’agir radicalement en Côte d’Ivoire. Pour mettre fin au calvaire d’une nation qui, au-delà du mépris, de l’indifférence et des larmes de crocodile, mérite l’admiration par son vote massif et l’espérance de paix au bout d’un scrutin historique.
Aider à leur juste conclusion les révolutions de l’Afrique du Nord mais décider que la région subsaharienne doit se débrouiller toute seule relève de l’erreur politique, source de mortelles tragédies en Côte d’Ivoire aujourd’hui et ailleurs sur le continent demain. Car l’Afrique subsaharienne a brûlé ses vaisseaux, galvaudé les valeurs et au final, ses arbitres sont autant de joueurs et chacun de ses procureurs est un accusé en sursis.
Adam Thiam
Le Républicain 01/03/2011