Mais chirurgie profonde et salvatrice si Alassane Ouattara stimule et protège une télé libérée et libre à la place de la télévision godillot des démocraties de la Baule. Une télé de rupture en un mot, à l’image du président ivoirien investi lui-même par de sanglantes ruptures, mais à juste raison car force doit rester au droit. Or les peuples ont droit à l’information pas à la propagande, au débat contradictoire pas au soliloque.
Si Alassane Ouattara résiste au réflexe d’accaparement des télés nationales par des dirigeants africains frileux, il sera allé plus loin que ses pairs, mais en très peu de temps, vers l’Afrique de demain.
Celle qu’impose la seconde génération des démocraties du continent dont certaines furent arrachées au prix du sang. Au-delà de la noblesse, en soi louable, de refuser les baillons et les muselières dans son pays, Ouattara démontrerait alors, de la plus belle façon, que son objectif n’était pas le pouvoir pour les délices qu’il offre. Il démontrerait qu’il n’a rien à cacher. Il démontrerait, au contraire, que son pouvoir est solide non pas parce qu’il sait dissimuler mais parce qu’il s’est obligé à la transparence.
Une télé qui n’est pas la voix de son maître est un enjeu en démocratie où la quantité des médias ne rime pas forcément avec la qualité qu’il faut en attendre pour que le projet démocratique soit réellement le raccourci vers le bien-être des nations. Car les médias publics sont aussi nécessaires que les cabinets d’audit. Ils sont un indicateur de la qualité de gouvernance. Ouattara le sait. Puisse t-il ne pas l’oublier. Au nom de l’inévitable effet domino que produirait une autre attitude vis-à-vis de la presse sur un continent dont les télés, dans leur écrasante majorité, servent le triste dessein d’anesthésie générale.
Adam Thiam
Le Républicain 09/08/2011