Cela pour garantir la neutralité de la transition en mettant comme garde-fou l’inéligibilité de ces responsables de la transition. A cette rencontre, l’éventualité de la candidature du Premier ministre Cheick Modibo Diarra est revenue à plusieurs reprises en termes de protestations des représentants des partis politiques. Selon le ministre Moussa Sinko Coulibaly, « il est écrit dans tous les documents que la transition doit être neutre. On ne peut pas être juge et partie … On ne peut pas être de cette transition et avoir des ambitions politiques. Ça ne se fera pas. Parce qu’en acceptant que des membres de la transition soient dans la course, nous courrons le risque de fausser le jeu ». La transition a mission de s’occuper de la reconquête du nord et l’organisation d’élections libres et transparentes. Si certains ont tenu à ce qu’un communiqué soit produit dans ce sens par le gouvernement, c’est parce que des zones d’ombres persistent, malgré cette réaction apparemment claire du ministre.
Ce qui explique l’alerte sonnée par l’éditorialiste du 22 septembre : la transition malienne en danger. « Une transition partisane, politisée à des fins personnelles, régionalistes, ethniques ou communautaires, serait source de tous les dangers. Elle n’aura alors rien réglé. Elle en rajouterait au contraire, à la confusion, à la crise et favoriserait le conflit permanent. C’est en tout cas ce spectre qui se dessine avec la confirmation de la candidature du Premier ministre, Cheick Modibo Diarra, à l’élection présidentielle prochaine », a écrit l’éditorialiste. Le Premier ministre, en plus de l’avoir dit en conseil des ministres, l’aurait également déclaré à des partenaires du Mali, quelques jours avant la fête de Tabaski. Ces informations sont assez scandaleuses et lourdes de conséquences pour la transition malienne, car frisent la volonté chez le Premier ministre de maintenir un régime d’exception au Mali, plus de vingt ans après l’ouverture démocratique. Comment ne pas rappeler la jurisprudence de 1991-1992, où à la fin de la transition démocratique ni le président du Comité de transition pour le salut du peuple ATT, ni son Premier ministre Soumana Sako ne se présentât. « Alors, pourquoi le Premier ministre veut-il changer les données ? A lui de choisir : se soumettre à une transition impartiale ou se démettre », souligne le confrère.
Le mémorandum du Front uni pour la sauvegarde de la démocratie et de la République (FDR) du 18 octobre dernier, à l’attention des hauts responsables de l’Union africaine, de la CEDEAO, de l’OIF, des Nations Unies et de l’Union Européenne, a reproché une gestion partisane de la Transition au Premier ministre Cheick Modibo Diarra, alors que cette période par définition doit être inclusive et neutre. Sous le couvert de la formation du gouvernement d’union nationale, le 20 août 2012, plus des 3/4 des ministres représentent les forces favorables au coup d’Etat, se plaint le FDR. « En outre, le Premier ministre, Chef du Gouvernement de Transition, est le Chef d’un parti politique. Il utilise l’appareil d’Etat et les moyens de l’Etat à des fins politiques partisanes. Il ne fait aucun mystère de son projet de se présenter aux prochaines élections présidentielles, au motif, qu’aucune disposition de l’Accord-cadre du 06 avril 2012 ne l’en empêche », précise le mémorandum.
Le Premier ministre n’accorde par là aucune importance au message à la Nation du président de la République, le 29 juillet 2012 : «…il reste entendu que ni le Président, ni le Premier ministre, ni les Ministres ne pourront se présenter à la prochaine élection présidentielle». La gestion partisane de la Transition s’observe enfin à travers le processus d’organisation des Concertations Nationales. D’où le refus du FDR d’y prendre part.
S’il est hors de question que les partenaires cautionnent de telles combinaisons et que les acteurs politiques maliens n’abandonneront pas la lutte, alors où le Premier ministre Cheick Modibo Diarra veut-il conduire le Mali ?
B. Daou
Le Republicain 05/11/2012{jcomments on}