C’est ce même accord qui permit la démission du président sortant, l’investiture du président intérimaire, la désignation d’un Premier ministre de pleins pouvoirs et l’amnistie des événements liés au putsch du 22 mars. Si tout avait marché comme prévu, le deal aurait été salué. Sans être orthodoxe puisqu’il légitimait une junte. Mais il y eut les événements du 30 avril et du 21 mai, et entre les deux les tergiversations de la Cedeao. Il y eut surtout l’application scandaleuse d’une disposition vitale de l’accord-cadre qui misait sur les indispensables leviers de la concertation et du consensus.
Car au nom d’une révolution portée par des légitimités contestables, d’un appel d’air sociologiquement compréhensible mais perverti et d’un agenda revanchard, un gouvernement du fait accompli est formé. Erreur révélatrice d’un criard déficit de sens politique ou plan machiavélique de confiscation de la démocratie pour laquelle le sang des Maliens a été versé il y a vingt et un ans, des acteurs utiles au retour effectif à la légalité constitutionnelle sont transformés en spectateurs.
Et mis en quarantaine parce que l’on a fait de la politique partisane une lèpre. Pourtant Att n’était d’aucun parti, or il est chargé de tous les maux aujourd’hui. Ensuite ce pays doit ses progrès majeurs à l’action politique. Peu importe d’où il vient et qui il est Cheick Modibo Diarra est aujourd’hui un politique.
Peu importe pourquoi et comment il a fait son putsch, le Capitaine Sanogo est un politique. Il n’est point de cité sans politique. Donc halte à la stigmatisation. La vénalité et l’exemplarité ne sont l’apanage d’aucune catégorie. Et chacun est nu sous ses habits. Qu’on ne vienne pas tromper le pays au nom d’une illusoire virginité morale. Les denrées essentielles à cette transition restent l’expérience et la sincérité démocratique des acteurs. De tous les acteurs.
Adam Thiam
Le Républicain Mali 13/06/2012