La première justement à s’être indignée de ce qu’elle appelait le massacre de Benghazi, dès février, c’est-à-dire au début des revendications pluralistes parties de cette ville rebelle en écho au printemps tunisien et égyptien. Mais sans compter que les promesses faites pendant la guerre n’engagent que ceux qui y croient, rien ne pouvait apporter autant de grain au moulin des adversaires de la résolution 1973 que la foire d’empoigne en cours ou imminente autour du pétrole libyen, et ce avant même avant la fin des combats à Tripoli. Nous savions tous que les pays avaient des intérêts, pas des amis. Mais vouloir se payer si rapidement et avec le minimum de scrupules sur la bête envoie le message le plus rassurant aux dictatures des pays pauvres.
C’est quoi ce message ? Que l’action des grandes puissances n’était pas principalement pour protéger la Cyrénaïque des représailles d’un fou qui y avait, il est vrai, sinistre mémoire. Déduction : si Benghazi n’a pas été décimé et si la Libye s’apprête pour la démocratie, ce ne sera donc que par voie de conséquence. Avertissement : démocrates des pays sans ressources stratégiques, débrouillez-vous ! La morale n’est pas sauve.
Mais la realpolitik ne triche pas. Elle n’a pas triché hier, au Congo où Kabila père est entré avec une armée de capitaines…d’industrie américains. Elle ne triche pas aujourd’hui en Birmanie liberticide où Total fait la loi. Elle ne triche pas non plus en Syrie où demain, vendredi, le pouvoir s’acquittera du rituel macabre de tirer sur un peuple aux mains nues.
Adam Thiam
Le Républicain 25/08/2011