D’abord, il est là depuis 1987 et l’alternance et le renouvellement des élites politiques constituent la lame de fond des vagues qui ont balayé Ben Ali, Moubarak et peut-être bientôt Kadhafi. Ensuite, le pays des hommes intègres fait face à une grogne scolaire latente autant qu’à une mutinerie sur fond de défiance armée contre l’appareil judiciaire, donc une des pierres d’angle de la démocratie. Enfin, Laurent Gbagbo, même s’il n’a plus le coffre d’antan, soufflerait volontiers sur des braises inespérées.
Inespérées pour le chef Bété pour lequel Compaoré fut un os. Inespérées également pour l’opposition burkinabé. Un des ténors de celle-ci, Benwendé Sankara, a d’ailleurs demandé, vendredi, la démission ni plus ni moins de son adversaire triomphalement réélu il y a juste cinq mois au premier tour d’une compétition qui, il est vrai, était jouée d’avance. Avec le temps, Compaoré a gagné en expérience. Il connaît bien son peuple et son pays relativement bien gouverné ne traîne pas de casseroles connues.
Les épreuves qu’il a traversées, notamment la crise consécutive à l’assassinat de Thomas Sankara et plus récemment du journaliste Norbert Zongo, plaident pour qu’il gère les soubresauts actuels avec le tact qui l’a jusque-là sauvé. Mais plus personne ne peut jurer de rien : l’Afrique est sur l’axe d’un tsunami politique, avec pour épicentre : la rage d’une jeunesse déboussolée, le quotidien précaire des masses laborieuses et l’absence ou la lenteur de mobilité sociale.
Adam Thiam
Le Républicain 30/03/2011