Car, il faut bien que quelqu’un paye la facture – le pétrole de la Cyrénaïque le fera- mais alors le devoir d’ingérence invoqué ne sera plus très humanitaire. Ensuite, Obama, Sarkozy,
Cameron ne peuvent plus, l’orgueil des superpuissants n’admettant pas généralement le mea culpa, venir dire au monde qu’ils avaient surestimé la rébellion et sous-estimé la résilience des forces loyalistes. Enfin, l’enlisement mettrait plus en relief le double standard des missiles sur Tripoli et des sanctions ciblées contre Damas et il faudrait s’expliquer là-dessus à Paris, Londres ou Washington. Expliquer quoi? Qu’une vie syrienne ne vaut pas une vie libyenne. Que Tel Aviv souhaite -donc doit l’obtenir- le statu quo à Damas.
Que ce sont pour toutes ces raisons que la vie des militaires occidentaux est engagée en Libye même si ceux-ci courent très peu de risque, bénéficiant de la suprématie douillette du ciel. Déjà, des voix s’élèvent, y compris en Occident, pour dénoncer la politique du deux poids-deux mesures entre d’une part la Syrie et le Yémen qui massacrent leurs populations et la Libye où le pouvoir a compris la nécessité d’une plus grande ouverture. L’Union africaine et les opinions africaines, témoins de l’incohérence des décideurs du monde, ont aujourd’hui, toutes les raisons de s’insurger contre la résolution 1973 et l’usage sélectif fait du devoir d’ingérence.
Adam Thiam
Le Républicain 26/04/2011