La convocation du collège électoral en vue du référendum constitutionnel du 18 juin a fini par étaler au grand jour les ambitions de deux têtes de proue de l’exécutif, à savoir le Président de la Transition Assimi Goïta et le premier ministre Choguel K Maiga. Rien qu’à en juger par les agissements de leurs partisans lors des meetings de vulgarisation de la constitution et surtout la guerre de positionnement entre les premiers responsables des différents mouvements de soutien aux deux personnalités, l’on se pose la question de savoir s’il n’y a pas de bataille de leadership entre les deux hommes. La question peut paraitre incongrue pour certains compte tenu de la subordination du second au premier et qu’un petit décret pris un matin de bonheur peut faire abroger toutes dispositions antérieures liées à la nomination du PM, ce qui lui fera taire toute ambition. Mais l’équation ne semble pas aussi facile pour le Président de la Transition. Tous les grands observateurs de la scène politique malienne s’accordent aujourd’hui à dire qu’il ne sera pas du tout facile de se débarrasser de Choguel K Maiga au risque de le rendre populaire. Ce scénario ressemblerait fort curieusement à celui du Président Alpha Oumar Konaré et son Premier ministre Ibrahim Boubacar Keita. Le premier a eu toutes les peines du monde à se débarrasser du second. Autres temps autres mœurs et en plus les contextes sont différents, mais le peuple demeure le même.
En effet, les premiers grands rassemblements en vue de la vulgarisation de la nouvelle constitution ont donné lieu à une démonstration de force des partisans de deux chefs de l’exécutif. Les Forces du changement pour le Mali Koura regroupant des militants du M5 RFP et d’autres associations, sont réputées être proches du PM Choguel K Maiga, tandis que le Forum des Forces du changement regroupant l’URD, la Forsat Civile, l’AREMA, le COREMA pour ne citer que celles-ci sont vent debout pour le Président de la transition. Si l’objectif des meetings est d’informer, de sensibiliser et de vulgariser le projet de nouvelle constitution afin que le OUI puisse l’emporter le soir du 18 juin, il n’en demeure pas moins que le souhait affiché des partisans de tous les deux camps est de voir leurs mentors faire acte de candidature à la prochaine présidentielle. Surtout que le verrou de l’interdiction d’être candidat aux prochaines échéances électorales, en ce qui concerne les autorités de la transition, sauterait après l’adoption de la nouvelle constitution. Aujourd’hui l’horizon s’éclaircit et rien qu’en analysant la floraison d’associations, de regroupements politiques on est en bon droit de se demander si les deux têtes de l’exécutif n’ambitionnent pas d’être sur la ligne de départ de la prochaine présidentielle. Le divorce entre Assimi et Choguel sera-t-il consommé après le référendum ?
Le départ du PM ne pourrait jamais être à l’ordre du jour avant le référendum au risque d’allonger la liste des opposants à la nouvelle constitution. Ainsi pour ne pas multiplier les fronts anti constitution, le Président de la transition est obligé de garder le PM Choguel K Maiga, pour donner toutes les chances de réussite à son premier test électoral. Une autre raison de son maintien à la tête du gouvernement pourrait être leur intérêt commun à préserver, celui de voir adopter par le peuple la nouvelle Constitution, celle qui ferait sauter les verrous qui empêcheraient les autorités de la transition de faire acte de candidature. Pour les partisans d’Assimi comme ceux de Choguel, l’adoption de la nouvelle constitution rendra caduque la Charte et l’ancienne constitution, ce qui ouvrirait un boulevard aux autorités actuelles. Donc pour toutes ces raisons Assimi Goïta est obligé de garder son PM jusqu’après le referendum. Même après le referendum l’équation Choguel sera à plusieurs inconnues quand on sait que l’homme a plus d’un tour dans son sac et avec la grande expérience politique qui est la sienne, il est capable de se rendre victime pour s’attirer la sympathie du peuple et vouloir capitaliser cette nouvelle donne pour en faire un atout électoral.
En somme, ni le président de la transition encore moins le PM ne doivent faire acte de candidature afin de rester conforme à leur engagement. Quant à leurs partisans qui s’agitent, la plupart d’entre eux sont des opportunistes sans scrupules capables de vendre leur âme au diable.
Youssouf Sissoko
Alternance