Le coup d’Etat du 18 Août 2020 est le quatrième d’une longue série qui a débuté un 19 novembre 1968. Mené de la façon la plus élégante et d’une main de maître par des jeunes officiers, tous des colonels, ce putsch, bien que considéré comme un crime imprescriptible par la Constitution du 25 février 1992, a été salué parce que libérateur. Sa particularité, comme d’ailleurs celui du 26 Mars 1991, est qu’il s’est passé après une insurrection populaire contre le régime qui a mis à genou le Mali. Comme une sorte de délivrance, ce coup d’Etat du CNSP a été favorablement accueilli par une frange importante du peuple, surtout celle regroupée au sein du Mouvement du 5 juin Rassemblement des Forces Patriotiques, M5 RFP. Ce Mouvement du 5 juin a été sans nul doute le facteur affaiblissant le régime IBK et qui a fini par créer les conditions favorisant l’avènement des militaires sur la scène politique. Mais très vite, ces derniers ont voulu tourner le dos au M5 RFP en nourrissant la prétention de diriger la transition envers et contre toute la communauté internationale et même l’opinion nationale dans sa large majorité. Elles souhaitent que la transition soit dirigée par des civils, mais la junte, ayant déjà pris goût au pouvoir, semble avoir son propre agenda, celui de diriger la transition. Parviendra-t-elle à le faire ? Pourra-t-elle résister aux sanctions internationales ? Quel risque courre-t-elle en s’accrochant vaille que vaille au pouvoir ?
Assimi Goita et ses compagnons auteurs du putsch du 18 Août 2020 ont rendez-vous avec l’histoire. Ils ont une occasion idoine d’écrire l’une des pages les fabuleuses de notre pays en acceptant de rendre le pouvoir aux civils et cela dans un bref délai. Cette option est la meilleure pour eux d’abord et pour le pays qui souffre déjà du poids de l’embargo. Que la junte comprenne qu’il n’y a pas d’autres alternatives que de se soumettre aux injonctions de la CEDEAO, pour éviter à notre pays une situation dramatique. Les militaires ont leur place dans les casernes et au front, mais pas sur la scène politique. C’est pourquoi l’organisation sous régionale exige un transfert du pouvoir aux civils et donne même une date butoir pour l’exécution de sa décision. Donc, le CNSP a jusqu’au mardi 22 septembre 2020 pour installer des civils à la présidence et à la primature. Passé ce délai, le Mali subira un embargo total et la junte sera prise pour responsable de toutes les conséquences qui en découleront. Pour éviter que le Mali ne s’écroule totalement, alors même que le coup d’Etat avait été considéré comme un coup de grâce, la junte doit accepter les principes de la CEDEAO, parce que le pays ne pourra pas résister aux sanctions de la communauté internationale.
Les membres du CNSP doivent sortir des calculs politiciens pour n’être que des patriotes soucieux de la paix, de la stabilité et du développement de leur pays. Qu’ils sachent que le temps joue en leur défaveur et courent véritablement les mêmes risques que les auteurs du coup d’Etat de 2012. Assimi Goita et ses hommes doivent prendre langue avec le M5 RFP si ce n’est déjà fait, afin de convenir d’un schéma harmonisé pour la gestion de la transition. La composition du collège devant choisir les hommes et les femmes pour la diriger la transition. Avec le partenaire naturel qui est le M5 RFP, le CNSP n’a d’autres choix que de composer une équipe homogène en respectant les principes de la CEDEAO pour un démarrage effectif de la transition, après plus d’un mois de temps perdu pour rien.
Youssouf Sissoko