Du Nord au sud Les autorités intérimaires divisent à nouveau les Maliens

A peine la liste des autorités intérimaires fut publiée, les dissensions opposant les protagonistes ont éclaté au grand jour sur fond de menaces de la part d’une partie des populations. Les autorités intérimaires devant gouverner les communes du Nord du Mali divisent jusqu’au Sud du pays. Mais au Nord, tout se passe dans un climat déjà pourri par des disparitions non expliquées de personnalités influentes de groupes armés rivaux.
C’est d’abord le gouvernement qui semble se mettre sur le dos tous les protagonistes de l’accord de paix avec la publication de la liste controversée des autorités intérimaires, ces nouvelles structures devant gouverner temporairement les affaires locales dans les régions du Nord. Non contents de leur mise à l’écart, les patriotes de Gao ont été les premiers à dénoncer la liste des nouvelles autorités, indiquant qu’elle fait la part belle aux groupes armés.
Ces représentants de la société civile de Gao avaient pourtant mis en échec la première tentative d’installer les autorités intérimaires en juillet dernier. Ce qui ne passe chez ces contestateurs, c’est l’occasion offertes aux-ex rebelles de quitter Kidal pour revenir narguer la population qui garde encore un douloureux souvenir des viols, pillages et autres exactions commises par les groupes armés qui s’étaient alliés aux terroristes pour occuper le Nord en 2012.
Contre toute attente, ce sont les ex-rebelles qui sortent du silence le 18 octobre pour dénoncer ce qui est une injustice à leurs yeux. Pour Sidi Brahim Ould Sidatt et plusieurs autres responsables de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), le gouvernement a allègrement violé l’entente signée le 19 mai dernier, un document selon lequel la taille de l’autorité intérimaire doit être égale au conseil qu’elle remplace.
La CMA qui a tout de même salué la publication de la liste comme une avancée appelle le gouvernement à corriger cette «inégalité » qui donnerait plus de représentants à leurs rivaux de la Plateforme. Par exemple, à Tombouctou, au lieu de 12 conseillers, le gouvernement à mis 13, tout comme à Kidal où 11 conseillers vont être remplacés. A Menaka, au lieu de 15, le gouvernement a choisi 17 membres.
Mais la sortie de la CMA cache mal un problème interne lié au choix des membres des autorités intérimaires. En effet, plusieurs mouvements qui s’étaient inféodés à la CMA au sein du comité de suivi de l’accord sortent bredouilles, leurs représentants ne figurant pas sur la liste des membres des autorités intérimaires.
Ces mouvements constitués par la CPA (Coalition des peuples de l’Azawad), la CMFRII et le MSA (Mouvement pour le salut de l’Azawad) accusent d’ailleurs le ministre de l’Administration territorial, Mohamed Ag Erlaf, de favoritisme envers les ex-rebelles de Kidal qui seraient de la même communauté que le ministre.
Le climat était déjà tendu entre les groupes armés du Nord du Mali où de nouvelles organisations paramilitaires ont vu le jour récemment. Dans la foulée, de nombreux membres de la CMA (dont Cheick Ag Aoussa) ont perdu la vie dans des circonstances confuses. «Les prises de position de la CMA constituent les germes d’instabilité à Tombouctou et Taoudénit », a expliqué Hamma Ag Mahmoud, un dissident du MNLA.
Par ailleurs, les autorités intérimaires sont loin de faire l’unanimité au Sud du pays où les reproches se multiplient au sein de l’opinion nationale. En attendant, de Bamako aux villes du Nord, le gouvernement aura fort à faire pour aplanir les divergences autour de l’installation des autorités intérimaires qui émanent pourtant de l’accord d’Alger.
Soumaila T. Diarra