Unanimement, le message était cet hommage à titre posthume
Mon Très Cher Cousin,
La nouvelle est tombée comme un couperet. « Dis-moi que ce n’est pas vrai », s’est écriée ma collègue Médiatrice Kiburenté qui tombe dans une stupeur indescriptible. Hé oui ! C’est la triste réalité, à 54 ans, Dr Tèmè s’en est allé.
Dans ta croisade pour la santé, tu fus vaincu, les armes à la main dans un tragique accident. Mon brave cousin, tu as passé une bonne partie de ta carrière dans cette région, d’abord comme Médecin-chef à Kadiolo, puis en qualité de Directeur régional de la santé.
Aujourd’hui, la mort t’a s arraché à l’affection de tous ceux-là qui t’ont côtoyé. Les hommages fusent de toutes parts. Les larmes aux yeux, la gorge nouée, notre doyen, Brehima Diallo murmure : « Le Mali vient de perdre un cadre modèle de par sa disponibilité, son intégrité, son engagement, son efficacité et son professionnalisme. » Tes anciens collègues aussi témoignent : « Consciencieux et humble, mais surtout habile dans le travail, on ne peut que le regretter ».
Fidèle à ton savoir, à tes qualités de médecin émérite et d’homme de grand cœur, pétri du serment d’Hippocrate, tu t’en es révélé un fervent disciple, Dr Témé. Lors de ton bref passage en qualité de chef de la division santé à la Direction régionale de Kayes, tes patients n’ont-ils pas parcouru plus d’un millier de kilomètres de Kadiolo à Kayes, parce que convaincu du sacerdoce que tu as su incarner.
Certes la mort emporte l’homme soit-il un grand, mais elle reste impuissante face à la grandeur d’âme de l’illustre disparu que tu es cher cousin. Tu mérites un hommage appuyé, car tu as soulagé tes patients, tu les as parfois guéris, mais indéniablement, tu as toujours été à leur écoute.
Oui le pacte qui te liait au Kénédougou vient d’être rompu lâchement par la mort au détour de la voie reliant Bougouni à Sikasso. Là où tu l’attendais le moins. Ton dernier combat, tu l’as dédié à ces braves hommes, femmes et enfants du terroir.
« Allo grand cousin. Que puis-je pour toi ? » me lanças-tu ce vendredi 2 mars 2012 lors de notre dernière conversation téléphonique. Et moi de te répondre : « Cela fait juste une paye que je n’ai pas de tes nouvelles. Je voulais non seulement m’assurer que tu vas bien, mais aussi te signifier que nous pensons à toi cousin, même lorsque nous ne te sollicitons pas pour un briefing des journalistes sur la malnutrition !» Le sourire dans la voix, tu rétorquas : « Ah bon, merci cousin ! Je suis content d’avoir de tes nouvelles aussi… » Oui Médiatrice avait raison d’être dubitative, car elle avait parlé avec toi quelques jours plus tôt. J’étais loin de penser, même dans le pire de mes cauchemars, que je n’entendrai plus ta voix. Que je composais ton numéro de téléphone pour la dernière fois. Nous en sommes certes affligés, mais que pouvons –nous contre la volonté de Dieu ?
Dr Témé, nous témoignons de l’estime que les journalistes tant étrangers que maliens ont pour toi. En plusieurs occasions tes communications magistrales sur toutes les questions de santé, au gré des visites de terrain et autres ateliers de production dans tes zones d’intervention sont restées pour eux une source incommensurable d’inspiration. Pour eux c’est « une bibliothèque qui vient de brûler. » En mars 2011, tu fus leur hôte à l’occasion de la caravane médiatique contre la malnutrition.
Ensemble, nous avons arpenté les chemins sinueux des régions de Kayes et de Sikasso. Oui mon cher Cousin, je n’oublierai jamais que tu n’hésitais pas à descendre de ton véhicule pour le mettre à la disposition des missionnaires. Car dans ta brève, mais si riche carrière, tu as a été porté sur les résultats. Homme d’envergure et de dialogue, tu as toujours su apporter ton appui indéfectible et tes conseils éclairés aux missions de terrain.
Docteur, tu as été de tous les combats pour l’émancipation des femmes et des enfants. Et ta remarquable contribution à la mise en œuvre du programme de coopération Mali-UNICEF t’a valu ce rôle prépondérant lors des foras sur la problématique de la santé communautaire au Mali.
Ta disparition a plongé en deuil ton département, le Ministère de la santé. Tes collaborateurs sont inconsolables. Je les comprends et je partage cette peine avec eux.
Ton cousin Mahamadou Talata Maïga, très affligé me charge de te dire « qu’à l’égard de toutes les autres choses, il est possible de se procurer la sécurité mais à cause de la mort, nous les hommes habitons une cité sans murailles : c’est la cité de vivre qui n’a d’autres murailles que soi et c’est ce que l’on appelle la santé… » Et « celui qui sauve une vie, sauve l’humanité toute entière. ». Le Docteur Tèmè sauva des vies, malheureusement comme le disait LAMARTINE : « Le livre de la vie est le livre suprême qu’on ne peut ni fermer ni rouvrir à son choix. On voudrait revenir à la page où l’on aime, et la page où l’on meurt est déjà sous nos doigts. »
Puisse, Allah, le vrai « Ama », le Tout Puissant dans sa Clémence et sa grande miséricorde, consoler les populations du Kénédougou, tes collaborateurs et ta famille. Puisse-t-il t’accueillir dans sa grâce et t’accorder au paradis, le repos éternel de l’âme. Amen !
Ton Cousin,
Ismaël Maïga