La diaspora sénégalaise constitue la 15e région du pays. Celle de Chine, décrite comme «rangée», souhaite participer au développement du Sénégal. Pour ce faire, elle ambitionne de saisir les opportunités de la coopération Chine-Afrique.
En Chine, la communauté sénégalaise dont la présence est plus remarquée à Guangzhou, dans la province du Guangdong, à Yiwu dans le Zhejiang, à Shanghai et à Beijing, mène une vie paisible. Elle est décrite comme étant un «groupe rangé et respecté». Ama Samba Diouf, entrepreneur sénégalais, établi à Zhejiang, président de la communauté sénégalaise à Yiwu en Chine, a bouclé ses dix ans dans ce pays. Il témoigne que les Sénégalais résidant en Chine font partie des communautés les plus respectées dans ce pays. «Nous sommes une référence. Nous n’avons pas d’ennuis en termes de comportements», se félicite-t-il. Dr Oumar Niang, Sénégalais vivant à Shanghai, ajoute : «notre communauté est très intégrée professionnellement». «Nous avons des professionnels qui travaillent dans le circuit administratif ou mouvement sportif ; et d’autres dans le business», indique-t-il.
Bakary Tirera, homme d’affaires sénégalais basé à Guangzhou et directeur général du groupe Crestone, une compagnie de trading, a lui aussi vécu plus de dix ans en Chine. Rencontré lors de notre séjour à Yiwu, à la mi-novembre 2024, il abonde dans le même sens, saluant l’attitude de nos compatriotes dans l’Empire du milieu. Toutefois, d’après lui, ils font face à quelques contraintes d’ordre administratif, notamment la délicate question de renouvellement et de l’établissement des passeports. Tirera estime que cette problématique majeure mérite une attention particulière des nouvelles autorités de la République. Il souligne que pour renouveler ce document administratif, certains sont obligés de retourner au pays ou de se rendre en Arabie Saoudite.
Un bureau de passeport à Beijing
Cette question préoccupe également Cheikh Diop, homme d’affaire sénégalais vivant à Shanghai. Ancien étudiant, il souhaite que cette doléance figure parmi les priorités du nouveau régime. Son compatriote Dr Oumar Niang, Sénégalais vivant à Shanghai, ne manque pas de solliciter la création d’un bureau de passeport à Beijing ou à Guangzhou. Ama Samba Diouf rappelle que la diaspora sénégalaise mérite plus, car ayant beaucoup contribué à la troisième alternance. Il appelle le nouveau régime à corriger ce hiatus. Cette doléance a été soumise au président de la République, Bassirou Diomaye Faye, lors de son séjour en Chine en début septembre 2024, dans le cadre du neuvième Forum de coopération économique Chine-Afrique (Focac).
L’autre contrainte qu’il relève est liée à des mésententes entre hommes d’affaires sénégalais et fournisseurs chinois. Très souvent, selon Tirera, cela est dû à la non conformité des marchandises, au non respect des délais de livraison et à des erreurs sur les transactions. «En effet, certains commerçants achètent des marchandises via des plateformes en ligne. À son avis, la barrière linguistique constitue souvent «un obstacle» et conduit ainsi à une «mauvaise interprétation» des commandes. «La Chine est un pays particulier. Si on ne maîtrise pas le mandarin, on peut être confronté à des difficultés», poursuit Amar Samba Diouf.
Pour ces cas précis, la police chinoise joue la carte de la neutralité et réoriente les parties vers le bureau de médiation. «Il s’agit des arrangements à l’amiable qui ne profitent pas souvent aux étrangers», déplore Bakary Tirera, magnifiant l’assistance des services consulaires et de l’association des Sénégalais de Chine qui interviennent, à chaque fois que de tels problèmes surviennent. À ce titre, Cheikh Diop pense que la présence de l’autorité consulaire doit être plus «prégnante en anticipant sur d’éventuels conflits», surtout en allant à la rencontre des Sénégalais partout en Chine.
Rôle de tampon
Par ailleurs, Bakary Tirera souligne que la diaspora sénégalaise de Chine, notamment les hommes d’affaires, doivent saisir les opportunités de la coopération Chine-Afrique dans le sillage du neuvième Focac. «La Chine peut aider l’Afrique à franchir un cap dans une coopération gagnant-gagnant», rappelle-t-il. À cet effet, le gouvernement sénégalais peut, selon lui, davantage soutenir les commerçants résidant en Chine. Il s’agit, de son point de vue, de miser sur leurs expériences et leur savoir-faire «afin de créer des passerelles favorisant le transfert de compétences et de technologies». Il a, par conséquent, souhaité l’installation d’un bureau dédié aux commerçants et hommes d’affaires sénégalais en Chine. Lequel pourra jouer le rôle de tampon entre eux et les fournisseurs chinois. «Cette structure va permettre aux entrepreneurs sénégalais de mieux évoluer en Chine.
Elle pourra aussi aider certaines entreprises chinoises à davantage explorer le marché chinois et à investir dans notre pays. Ce qui pourra contribuer à l’industrialisation de notre pays et à la création d’emplois», affirme-t-il. Relativement au transport des marchandises de la Chine au Sénégal, Tirera note qu’il n’y a quasiment pas de difficultés, si on se conforme aux procédures douanières et fiscales. Le seul hic est la hausse du coût de transport qui est indépendante du gouvernement chinois, car liée aux compagnies maritimes, dit-il. Par ailleurs, il sollicite un assouplissement des procédures douanières au Sénégal en s’inspirant en la matière de la Chine. «L’allégement des procédures douanières relatives à l’importation de certains engins et machines sera bénéfique pour le Sénégal et favorisera l’industrialisation», avance le commerçant.
Souleymane Diam SY (Beijing, Correspondant)
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