A quelques jours de la Saint Valentin, les organisateurs de Congo na Paris ont consacré la première rencontre « Meet’up CNP » de l’année autour du mariage en Afrique subsaharienne.
Le 8 février, l’hôtel Napoléon à Paris, dans le huitième arrondissement, a accueilli le premier « Meet’up CNP » autour du thème de la dot. La proximité de la fête de la Saint Valentin, la fête des amoureux et de la célébration des liens affectueux, a permis aux organisateurs d’explorer les traditions, les mythes et les dérives qui touchent à cette cérémonie codifiée.
Par respect des us et coutumes de l’Afrique subsaharienne, les panélistes ont reconnu que la dot est une institution importante et incontournable dans la célébration du mariage au sein des sociétés africaines et mérite une réelle considération.
Cette vieille tradition africaine traverse les siècles. Plus qu’un préalable, elle unit les deux familles des mariés, respectueuses toutes deux de la coutume. Lors de la cérémonie de la dot, un procédé formel de négociations complexes est mené par les « Nzonzi », littéralement en kongo, les porte-paroles, pour instituer le mariage entre les deux familles. Il leur appartient de parvenir à une entente mutuelle sur le bon respect des exigences de la dot.
Une fois le décor de la palabre instauré aux bons soins de la modératrice Ntumba Biayi, pour Gilbert Goma, journaliste, un des quatre panélistes, certes la dot répond à des rites mais cette union n’est autre que le mariage, « nul besoin de le qualifier de traditionnel ». Il le définit comme étant au même pied d’égalité que celui que l’on appelle « moderne ». « Ce serait le faire reléguer au second plan », s’est insurgé le journaliste. Et d’affirmer qu’au Congo, aucune cérémonie de mariage n’est acceptée à la mairie sans que l’incontournable dot ait été versée.
« Nous devons préserver cette symbolique qu’est la dot », a affirmé Serge Diantantu, auteur-dessinateur et deuxième panéliste. « Dans le Bassin du Congo, ces belles noces ont été, depuis très longtemps, à la fois la reconnaissance, la valorisation et surtout le gage de l’union élargie de deux familles », a-t-il fait constater en gageant de sauvegarder les traditions créatrices d’un climat de confiance et de compréhension mutuelle à un niveau profond entre les deux familles.
La sauvegarde est aussi la préoccupation de Milau K Lutumba, sociologue du panel. « La dot revêt une dimension spirituelle », a-t-il démontré. Et d’expliquer que « tout le long du procédé, le respect mutuel et la dignité vis-à-vis du monde visible et de l’invisible est de rigueur selon que la tradition jouit d’un système matriarcal ou patriarcal. Nos ancêtres ont mis au premier plan la femme. C’est de celle-ci que le potentiel de reproduction est assurée, c’est par elle que passe la pérennité de la descendance, donc la survie du clan », a-t-il soutenu.
En guise de témoignage, Cathy Tshiteya, l’unique femme du panel, s’est prononcée pour la continuité de la dot même si elle est exposée aux abus du monde moderne. En République démocratique du Congo, dans sa province d’origine, la dot constitue l’apport, par la famille de l’épouse à leur fille, aux besoins du ménage. Elle se dit fière d’avoir honoré cette tradition, même si son époux est d’un autre pays ».
Lors des échanges avec la salle cosmopolite, Randy DJ a apporté également son témoignage en relatant qu’au niveau de la diaspora, plusieurs jeunes aspirent à honorer la tradition de la dot. Pourtant, certains d’entre eux dénoncent son coût élevé, devenu exorbitant au point d’être en rupture avec la symbolique de plus en plus confuse lors des cérémonies actuelles. L’on constate des exagérations jusqu’à inclure les frais consentis à la formation de jeunes filles ou à faire valoir la couleur de leur peau.
Quand on remonte dans le temps, en France, à l’époque de la dot, l’auteur Guy de Maupassant constatait des abus pour le mariage de Me Simon Lebrument avec Mlle Jeanne Cordier. En Inde, les familles sont arrivées à s’inquiéter dès la naissance de leurs filles car, la dot reviendrait chère. Et que dire de certains pays africains tels le Sénégal, le Gabon ou la Côte d’Ivoire où semble-t-il, hier c’était un panier de kolas et aujourd’hui, il faudrait mettre des villas ou des voitures 4 X 4 ?
Au Congo, officiellement, elle reste à 50 000 F CFA même s’il est question de l’ajuster au coût de la vie à hauteur de 300 000 F CFA. La conscientisation sur ce sujet est ouverte : faut-il être pour ou contre ?
Charlotte Kalala, présidente de Congo na Paris, promet de proposer prochainement d’autres sujets à débattre aussi passionnants pour, à chaque rencontre, s’imprégner d’« un retour vers le pays »,s’agissant des traditions du Bassin du Congo.