Le Président de la République, dans une adresse solennelle à la nation, le samedi 30 novembre 2019, a annoncé la tenue du Dialogue National Inclusif le 14 décembre. Cette date, si elle a été applaudie par la Majorité présidentielle, qui s’impatientait d’y aller, elle semble être un non-événement pour l’Opposition qui n’y prendra pas part. Cette dernière le qualifie même de monologue entre partisans du régime. Le Président de la République en fixant la date au 14 a-t-il pris les dispositions nécessaires pour que la participation soit la plus large possible ? Ou bien c’est juste un coup de Com ou un sondage d’opinion pour se faire une idée de l’audience que l’opinion nationale et internationale se fait de ce dialogue ? Que devrait-il faire pour convaincre les opposants au dialogue d’y prendre part ?
Après six ans de tergiversations, de pilotage à vue, de crises à répétitions, de saupoudrage, nombreux étaient les citoyens maliens qui avaient fondé de l’espoir sur l’initiative d’un dialogue qui regroupera tous les fils et toutes les filles de la nation. Mais force est de reconnaitre que beaucoup ont désenchanté et pensent que la montagne ne pourrait accoucher que d’une maigre souris. Pourquoi tant de réticences de la part des opposants alors qu’ils en étaient l’un des initiateurs ? Selon nos informations, l’Opposition soupçonne le Président de la République d’avoir un agenda différent de celui du Mali et qui se résumerait à la réforme constitutionnelle, laquelle révision permettrait la mise en œuvre intégrale de l’Accord pour la paix et la réconciliation, ce qui scellerait infailliblement la partition du Mali. Pour l’Opposition au dialogue, il faudrait qu’il soit le plus inclusif possible, qu’il n’y ait pas de sujets tabous et que les décisions qui en seront issues aient force de lois, donc contraignantes. Ce qui n’est pas la grille de lecture de la majorité, qui prête à l’opposition des intentions inavouées et un complot pour faire chuter le régime. Sinon, martèle-t-elle, le Président s’est engagé à être le garant de l’application des décisions issues du dialogue. IBK est de bonne foi et aura fait beaucoup de concessions pour que le dialogue soit inclusif a-t-elle conclu. Ces deux positions sont-elles irréconciliables ? La réponse est non surtout quand la Majorité et l’opposition disent se battre toutes pour le Mali. Elles doivent faire l’effort de se retrouver et d’être au chevet du Mali qui est gravement malade.
L’annonce de la date de la tenue du dialogue National Inclusif au 14 décembre 2019, surtout à moins de deux semaines, sans que tous les préalables ne soient satisfaits, pourrait être un coup de Com du Président de la République pour tâter le pouls de l’opinion. S’il ne veut pas encore gaspiller les maigres ressources du contribuable malien, il se doit de convaincre d’abord les Opposants, ensuite s’engager solennellement devant le peuple à respecter et faire respecter les décisions qui seront issues du Dialogue. Pour persuader les Opposants à participer au dialogue, IBK ne doit pas manquer de recettes et de ressources humaines crédibles pouvant aborder les acteurs sociopolitiques afin de trouver un large consensus autour du Mali.
En somme, le Président de la République pourrait surseoir au Dialogue National Inclusif à la date annoncée pour donner toutes les chances au consensus autour de ce grand rendez-vous pour le Mali. Aucun orgueil ne devrait le pousser à faire le forcing, tout comme il ne doit pas avoir honte de reporter si c’est pour permettre à tous les acteurs d’être à la gare d’embarquement, car pour le Mali chacun compte.
Youssouf Sissoko