La nomination du nouveau Premier ministre a suscité beaucoup d’espoir chez les Maliens, notamment auprès de la jeunesse parce que le peuple dans son ensemble aspire au changement et qu’au-delà des luttes partisanes, il est de l’intérêt de tous les Maliens de voir un mandat présidentiel réussi. Chaque Malien a suivi avec intérêt la Déclaration de Politique générale. Et, il est plaisant de voir un jeune Premier ministre, brillant orateur, s’adresse à l’hémicycle devant les élus du peuple. Il n’est pourtant pas lieu ici de relire ce discours, mais de se pencher sur l’un des points retenant l’attention des économistes : La question de la dette intérieure. Nul n’est censé ignorer que la période 2008-2011 est celle de la crise financière mondiale qui n’a épargné aucune nation.
Pointer cette période pour condamner la dette intérieure malienne qui n’a augmenté que d’un point à cette époque, là où des États européens sont tombés en faillite, serait pour le moins démagogique. Ainsi, lorsque le Premier ministre qui ne peut ignorer l’histoire économique contemporaine affirme «que l’endettement s’est fait entre 1995 et 2012 par une mafia qui s’est enrichie et que le gros de l’endettement s’est fait de 2008 à 2011», il est permis de croire qu’il se lance dans une rhétorique populiste pour justifier les difficultés de trésorerie actuelles du gouvernement. Cela au risque de jeter le discrédit sur l’Administration et les ministres des Finances précédents qui ont mis un point d’honneur à maintenir la dette intérieure malienne sous la barre de 4 % du PIB, là où les pays voisins ont plus du triple. (Voir Tableau 1).
Les gouvernements de 1992 à 2012 ont toujours honoré le service de la dette rendant le coût de l’emprunt moins cher au Mali, illustrant la confiance des investisseurs en notre économie. C’est ce qui fait que les fournisseurs ne refusent pas de livrer le carburant à EDM ou que les commerçants honorent leurs traites. Sauf si l’UEMOA et le Fonds monétaire se trompent sur leurs chiffres : à part le Burkina Faso, aucun pays de l’UEMOA n’a un taux de dette intérieure plus faible que celui du Mali dans la période indiquée par le Premier ministre (Voir tableau 2). Ce même tableau montre clairement dans la période 2008-2011 une augmentation de la dette intérieure dans tous les pays de l’UEMOA à part ceux dont les indices faisaient dix fois celui du Mali. Doit-on supposer que dans tous ces pays où la dette dépasse largement le seuil du Mali «De véritables bandits ont endetté l’Etat» ? Or, selon le rapport du FMI sur l’augmentation de la dette intérieure de la zone l’UEMOA «La majeure partie était due à des investisseurs sur le marché régional et à la BCEAO. (http://www.imf.org/external/french/pubs/ft/scr/2012/cr1259f.pdf) page 58. Cela s’explique par la récession mondiale forçant les pays à se replier sur les fonds internes. Ce tableau indique aussi que la moyenne UEMOA est environ 3 fois supérieure à la dette malienne. Ainsi, le Mali a beaucoup de défauts, mais il convient de ne pas remettre en question les efforts là où l’on a fait mieux que les autres. Pour finir ce tableau prévoit que la dette intérieure du Mali diminuera à partir de 2014 pour atteindre 1.8%, alors nul ne saurait se prévaloir demain de cette amélioration qui est prévu depuis 2011 justement.
À l’ADM, nous apprécions cette DPG à sa juste valeur, car nombre d’idées phares que nous avons initiées y sont évoquées, notamment : la refonte de l’éducation par renforcement des filières sources d’emploi, l’excellence et la déconcentration ; la régionalisation comme mode de décentralisation, la création de pôles régionaux de développement, d’incubateurs d’entreprises et de champions nationaux ; l’amélioration des revenus du peuple, la performance de l’administration, et le service civique ; une nouvelle architecture urbaine et l’aménagement des berges du Niger ; la transparence, l’équité et la justice ; un État fort et stratège ; le peuple malien comme finalité du développement. Autant de projets qui restent à chiffrer et réaliser.
Aussi, l’estime conduit à rappeler au Premier ministre que ceux qui s’expriment au nom de l’État le fassent clairement en situant les responsabilités au risque, sinon, d’insulter tout le monde par des insinuations.
Madani TALL